Guillaume Gautier
La chronique de Guillaume Gautier | Genk a renversé la hiérarchie: le modèle d’Anderlecht, c’est eux
Genk a battu Anderlecht avec une équipe jeune et enthousiaste, notamment sortie d’un centre de formation qui fait des merveilles. Les Limbourgeois sont devenus le modèle à suivre que les Bruxellois prétendent toujours être.
Sur sa pelouse bruxelloise, là où la crainte de repartir avec une correction dans les valises n’existe presque plus au fil des années de vaches maigres qui s’enchaînent, Anderlecht avait pourtant la recette d’un dimanche à l’ancienne. Un choc teinté de soleil, une entame de match réussie et trois générations d’enfants de Neerpede sur le terrain. Du vétéran Dendoncker au jeune Maamar en passant par l’espoir inassouvi Yari Verschaeren, les supporters des Mauves ont cependant dû se résoudre à constater les ravages du temps qui passe. Ni la puissance de Dendoncker, ni les dribbles courts de Verschaeren ne redeviendront un jour comme avant. Sans Mario Stroeykens, blessé, le centre de formation réputé de longue date comme le meilleur du pays n’avait plus grand-chose pour briller.
Notamment parce que l’un de ses joyaux éphémères jouait dans le camp d’en face. Comme Bilal El Khannouss deux années avant lui, Kostas Karetsas a étalé sa classe sur le terrain du Lotto Park en portant les couleurs des visiteurs. Une sorte de double coup de poignard, celui qui fait mal à l’équipe sur le terrain et aux cœurs des supporters dans les tribunes. Le double départ vers Genk des deux créateurs, à quelques mois d’intervalle, avait pesé lourd dans le dossier du départ de Jean Kindermans. Vénéré par les supporters, représentant majeur de ce que les fans des Mauves appellent «l’ADN d’Anderlecht», le patron de la formation bruxelloise avait payé cher la gestion manquée de certains dossiers. Le Sporting de la capitale était en train de perdre la guerre des jeunes, et il fallait à tout prix lancer un nouveau souffle pour le sauver.
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Aujourd’hui, Neerpede panse encore ses plaies. Ses joyaux s’envolent de plus en plus tôt, notamment le supersonique Julien Duranville, parti pour presque autant de millions que de matchs joués sous le maillot de la maison. Si le modèle économique du football ne permet évidemment plus aux clubs belges de garder très longtemps leurs meilleurs talents, l’idée est qu’ils puissent tout de même fouler pendant un an, voire plus si affinités, la pelouse locale avant de remplir les caisses. Au-delà de la défaite d’un dimanche, Genk était un miroir déformant et douloureux. Parce qu’en face, il y avait quatre talents de moins de 21 ans qu’on imagine bien partir pour une somme à huit chiffres après avoir lutté pour le titre.
En coulisses, le centre de formation du Sporting d’Anderlecht a commencé sa mue. Une course à la modernité pour laquelle il était longtemps resté dans les starting-blocks, la faute à une supériorité nationale qui permettait de se contenter de la réputation pour attirer les meilleurs talents dans la capitale sans se remettre en question. Puisque ce n’était plus le cas, et que les concurrents avaient particulièrement bien développé leur académie pour refaire leur retard, il fallait se réinventer. Dans les couloirs de Neerpede, on dit que le processus est en cours. Le problème, pour la formation, c’est que les idées d’aujourd’hui ne se transforment pas en faits avant plusieurs années. Et qu’à Anderlecht, on perd de plus en plus patience à force de regarder les trophées et les talents dans le rétroviseur.
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