Au cœur de Bruxelles, un quartier emblématique vacille. Les Marolles, haut lieu de mémoire populaire et de mixité sociale, sont menacées par la spéculation immobilière et la gentrification. A travers le collectif Coop’Haute 51, des habitants en appellent à la défense du droit au logement.
Ils appellent ça la loi du marché. Nous, nous y voyons un enrichissement scandaleux, bâti sur l’expulsion des habitants. Au cœur de Bruxelles, un quartier chargé d’histoire est en train de perdre ce qui faisait sa singularité: une vie de proximité, une richesse humaine née du mélange des générations, des cultures et des parcours. Les Marolles, ce lieu de mémoire et de vie, risquent de devenir un décor vide, privé de celles et ceux qui lui donnent une âme. Lentement, méthodiquement, le quartier est vidé de ses habitantes et habitants historiques à cause de l’envol des loyers et des valeurs immobilières, qui les remplacent par des façades aseptisées, des appartements de luxe et des locations Airbnb.
Et tout cela pour quoi? Pour quelques points de rendement supplémentaires dans des bilans froidement optimisés. Pour satisfaire l’appétit insatiable d’investisseurs qui ne voient dans une rue que son «potentiel de plus-value», dans un immeuble que sa rentabilité, dans une famille que des charges locatives à évacuer.
C’est la réalité que vivent les habitantes et habitants de la rue Haute 51, où un projet innovant –la Coop’Haute 51, une coopérative portée par les locataires eux-mêmes– cherche à sauver 20 logements à loyer abordable. Face à la vente de leurs logements, ils et elles se sont mobilisés pour racheter leur immeuble. Réunir leurs forces et leurs moyens dans une coopérative, voilà la solution pour sauver leurs logements.
«Soutenir cette initiative, c’est montrer que le droit au logement ne reste pas lettre morte.»
Ce projet existe, il est crédible, il est prêt. Il a un seul défaut: il ne rapporte pas assez aux yeux de ceux qui n’ont pour seule boussole que la marge nette. Mais il offre aussi aux autorités une opportunité: donner enfin un signal clair. Soutenir cette initiative, c’est montrer que le droit au logement ne reste pas lettre morte. C’est prouver que la politique peut encore agir pour l’intérêt général!
Est-ce trop demander que de vivre dignement là où l’on a toujours vécu? Pour d’autres, il est malheureusement déjà trop tard. Ainsi, 19 locataires des rues de Nancy et Saint-Ghislain ont récemment dû quitter leurs logements ou sont sous la menace de bientôt devoir le faire, suite à la vente de ceux-ci à un promoteur immobilier dont l’objectif est de les rénover et les vendre au prix fort.
La question fondamentale du droit au logement
Car ce qui se joue ici dépasse les Marolles: c’est la question fondamentale du droit au logement dans les villes. Une ville qui expulse sa population n’est pas une ville qui évolue; c’est une ville qui trahit ses habitantes et habitants!
La gentrification est le résultat d’opérations de promotion immobilière agressives. Seuls les pouvoirs publics ont la capacité de pouvoir les freiner. Nous demandons donc instamment:
● A la Région de Bruxelles-Capitale, de mettre en place un droit de préemption collectif à un prix objectivé et de soutenir ces acquisitions collectives financièrement, de réguler fermement les loyers, et de sanctionner les abus.
● A la Ville de Bruxelles, de mener une politique plus proactive d’acquisition de logements encore abordables, comme elle l’a déjà fait dans le cas de la rue de la Porte Rouge, où le CPAS a racheté un lot d’immeubles qui allaient être vendus à un promoteur. Nous demandons également à la Ville de soutenir financièrement les projets d’habitat collectif et coopératif.
● A la société civile, aux organisations sociales et politiques, aux citoyens et citoyennes, de se mobiliser et de défendre ce qui peut encore être sauvé.
Nous, habitantes et habitants des Marolles, disons STOP:
● Stop à la gentrification rampante.
● Stop aux expulsions déguisées sous couvert d’optimisation financière.
● Stop aux Airbnb qui vampirisent nos quartiers et les vident de leur âme.
● Stop à une ville qui sacrifie les plus vulnérables sur l’autel du marché.
Le logement est un droit, pas un produit financier. Et ce droit, nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à être prêts à le défendre.
Une carte blanche initiée par les habitants et habitantes de la Coop’Haute 51.
Atelier de Recherche et d’Action Urbaines (ARAU) ASBL
Les Ateliers Populaires ASBL
Bailleurs-Acteurs du Droit Au Logement Abordable (BaDALa)
Brussels Platform Armoede VZW
Caria ASBL
Comité de la Samaritaine ASBL
Communa ASBL
Community Land Trust Bruxelles (CLTB) ASBL
Coopérative Bruxelloise d’Habitat (CoBHa)
Coordination et Initiatives pour Réfugiés et Étrangers (CIRÉ) ASBL
DIOGENES ASBL
DoucheFLUX ASBL
Entr’Aide des Marolles ASBL
Fair Ground Brussels
Fédération Bruxelloise Unie pour le Logement (FéBUL) ASBL
Fédération des Services Sociaux (FdSS) ASBL
Habitat et Participation ASBL
Infirmiers de Rue ASBL
Inter-Environnement Bruxelles ASBL
L’Ilôt ASBL
La Rue ASBL
Pavé dans les Marolles
Rassemblement Bruxellois pour le Droit à l’Habitat (RBDH) ASBL
Societal Housing Network (SoHoNet) ASBL
SoHab, association de Solidarité pour l’Habitat ASBL
Solidarité des Alternatives Wallonnes et Bruxelloises (SAW-B) ASBL
Syndicat des Immenses
TALITA (Maisons d’accueil Yemaya et Talita) ASBL
Union des Locataires Marollienne (ULM) ASBL
We Are Nature.Brussels ASBL
Wijkhuis Chambéry VZW
Wuune – Syndicat d’habitant.es
Et plus de 500 citoyennes et citoyens