Un dossier a été ouvert à la suite d’une série de témoignages révélés par Le Vif, qui font état du management qualifié de «brutal» de l’animateur de «La semaine des 5 heures» du temps où celui-ci dirigeait Pure FM, entre 2004 et 2015.
Des gens qui «tremblent, qui pleurent, qui lisent un texte parce qu’ils ne peuvent même pas en parler». Et qui évoquent, entre autres, des «menaces», du «harcèlement moral», du «dénigrement», des «mises à l’écart», de la «cruauté», du «chantage» et des «humiliations» de la part de Rudy Léonet, ex-animateur de «La semaine des 5 heures», émission culte de la RTBF (non reconduite à la rentrée), du temps où celui-ci dirigeait Pure FM (à présent Tipik), entre 2004 et 2015.
Début juillet, au sein de l’entreprise publique, une quinzaine de protagonistes sont venus, pendant près de trois heures, décrire auprès du service des ressources humaines le management de Rudy Léonet, alors que Le Vif, puis Le Soir, rendaient publics certains de ces témoignages. «Je serai tranquille quand je serai mort, pas quand il sera mort, parce qu’il va continuer à me torturer depuis sa tombe», s’était effondré un participant lors de la réunion, cité par Le Soir. «Les RH sont tombées de leur chaise», commentait un autre, auprès du Vif.
La justice entre en scène
L’affaire dépasse désormais le simple cadre procédural propre à l’entreprise publique, qui avait certes reconnu que les faits étaient potentiellement «inacceptables», sans toutefois envisager d’y donner une suite concrète, faute de plainte officiellement introduite en interne. Le Vif et Le Soir ont toutefois appris ce mercredi que l’auditorat du travail de Bruxelles s’est saisi du dossier. «Suite aux articles de presse faisant état d’éventuels faits de harcèlement aux dépens de personnes travaillant au sein de la RTBF, l’auditorat du travail de Bruxelles a décidé d’ouvrir un dossier d’office. L’auditorat tient à rappeler que, dans le cadre d’une information pénale (c’est-à-dire d’une enquête pénale menée par le ministère public), tout suspect bénéficie de la présomption d’innocence», confirme l’auditorat.
Jusqu’ici, Rudy Léonet s’est défendu de tout abus, faisant valoir un dossier disciplinaire «vide» et mettant ces témoignages sur le compte d’une cabale menée contre son émission coanimée avec le «Monsieur cinéma» de la RTBF, Hugues Dayez, alors que la RTBF est en proie à d’importantes coupes budgétaires, tandis que lui-même est désormais pensionné.
Le Vif avait tout de même noté que des alertes sont bel et bien remontées auprès des ressources humaines de la RTBF entre 2015 et 2024, dont certaines comportent des traces écrites. Celles-ci étaient restées sans suite jusqu’ici.
Rudy Léonet charge la RTBF
Rudy Léonet, par la voix de son avocat, voit pour sa part l’ouverture de ce dossier comme «une très bonne nouvelle. Je vais pouvoir faire entendre ma voix autrement que par le seul prisme de journalistes juges et/ou enquêteurs, nécessairement à charge et enfermés dans un narratif univoque. J’espère enfin pouvoir être confronté à de vraies personnes derrière quelques témoignages anonymes parmi des dizaines qui les contredisent: un droit fondamental qui m’a jusqu’à présent été totalement refusé et que j’attends avec impatience et sérénité.»
L’ancien animateur y voit aussi une occasion «d’exposer les dérives internes de quelques-uns à la RTBF, un système délétère qui a déjà laissé des traces dramatiques et indélébiles, et qui montre qu’elle est capable encore aujourd’hui d’organiser ou de cautionner un dossier à charge contre un ancien employé pour le discréditer, après 43 ans de loyauté, simplement parce qu’il a choisi de dénoncer des pratiques contraires à la charte des valeurs fondamentales de l’entreprise: en particulier la transparence et le respect.»
La RTBF n’avait pas réagi à l’heure d’écrire ces lignes.
