La vente publique a ses avantages et ses inconvénients, mais ce ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Explications
Elle souffre d’une image parfois tronquée. Beaucoup pensent en effet que la vente notariale est une vente forcée, conséquence d’une faillite ou d’un surendettement. Résultat : elle est quelquefois associée à un sentiment de honte pour le vendeur et est considérée comme une bonne affaire pour l’acheteur. Ceux qui pensent cela auraient peut-être intérêt à réviser leur jugement. D’après NVN (Notariële verkopingen-ventes notariales), l’association chargée de gérer les ventes notariales à Bruxelles, en 2003, la part de ventes publiques forcées était de 45 %, les volontaires s’octroyant 55 % du marché. Et ces dernières voient leur nombre encore augmenter en 2004. Normal, vu la bonne santé du marché immobilier, les ventes publiques sont souvent une aubaine pour les vendeurs bruxellois, surtout pour les maisons unifamiliales et les immeubles de rapport. » Quand un immeuble est bien situé, les gens achètent au-delà de sa valeur vénale » estime Gaétan Bleeckx, notaire et président de NVN. Et de citer l’exemple d’un immeuble de rapport expertisé à 185 000 euros et adjugé à 310 000 euros. » Il suffit d’avoir deux bons amateurs et, grâce à l’effet d’émulation, le prix peut dépasser toute espérance « , poursuit Gaétan Bleeckx.
L’effet d’émulation n’est par contre pas aussi positif pour l’acheteur. Ce phénomène risque en effet de faire flamber le prix. Il appartient au candidat acquéreur d’éviter de se laisser griser par le côté exaltant des enchères. La volonté d’obtenir le bien à tout prix, ainsi que la mise en compétition lors de la vente risquent de l’inciter à faire une offre qui va au-delà de ses capacités financières et de la valeur réelle du bien.
Selon Gaétan Bleeckx, plusieurs arguments plaident en faveur des ventes publiques. L’un d’eux est la rapidité d’exécution : le vendeur trouve, en principe, son acquéreur à l’issue de la séance de vente aux enchères et l’acte de vente est dressé immédiatement. Le paiement du prix se fait quant à lui dans les six semaines de l’adjudication. Or, dans les ventes classiques, le délai entre la signature du compromis et celle de l’acte de vente peut atteindre quatre mois.
De plus, lorsque le bien est mis en vente, une série de formalités telles que les recherches fiscales, hypothécaires ou encore urbanistiques ont déjà été effectuées par le notaire. Un autre avantage est la transparence. Il est clair que, lors d’une vente publique, aucune enveloppe n’a été passée sous la table. Les acquéreurs potentiels ont en outre suffisamment de temps pour découvrir le bien et évaluer le pour et le contre de l’achat sans risquer de se faire damer le pion par quelqu’un de plus décidé.
Mode d’emploi
En pratique, comment cela fonctionne ? Certaines modalités peuvent varier d’un arrondissement à l’autre, mais les règles générales sont plus ou moins les mêmes dans tout le royaume. Depuis 2002, les notaires ont par ailleurs adopté un cahier uniforme des charges applicable dans toute la Belgique.
1. Les délais
A partir du moment où la vente publique est décidée, le notaire fait publier des annonces dans les journaux et assure l’apposition des affiches aux endroits ad hoc. Il organise également la visite des lieux pour ceux qui le désirent. La durée prévue pour cette publicité et les visites est de trois semaines. Il revient au candidat acquéreur de la mettre à profit pour examiner le bien sous toutes ses facettes, pour demander l’avis d’un expert, ce qui est fortement conseillé, ou encore pour consulter le cahier des charges. Ce document, disponible à l’étude du notaire, contient les règles générales des ventes publiques ainsi que les informations relatives au bien, telles sa situation urbanistique, locative, cadastrale ou encore l’existence de servitudes. Le candidat acquéreur devra aussi profiter de ce délai pour évaluer sa marge de man£uvre. Il est dans son intérêt de faire la ronde des banques afin de voir s’il pourra obtenir un prêt. Lors d’une vente publique, il n’est pas possible de conditionner l’achat à l’obtention d’un crédit. A partir du moment où l’adjudication (la vente) est définitive, l’acheteur ne pourra plus se dédire. Il disposera de cinq jours pour payer les frais de notaire et de six semaines pour s’acquitter du montant de la vente. Mieux vaut bien calculer son coup !
2. Adjudication provisoire ou définitive et surenchère
Lors de la séance de vente, l’immeuble peut être adjugé au plus offrant. Ce dernier deviendra propriétaire et l’adjudication est dite définitive. Le notaire et le vendeur peuvent aussi décider d’organiser une seconde séance, par exemple si le prix obtenu ne les satisfait pas. Dans ce cas, le bien sera provisoirement adjugé à un acquéreur et une nouvelle séance de vente sera organisée. Ce n’est qu’à l’issue de celle-ci que l’adjudication sera en principe définitive. » Je déconseille de faire une seconde séance. Cela retarde d’autant la vente et, en plus, il faut à nouveau payer des frais de publicité. Si le prix proposé ne convient pas du tout au vendeur, celui-ci a toujours la possibilité de retirer son offre, donc de refuser de vendre. Il peut le faire jusqu’à la dernière minute « , précise Gaetan Bleeckx.
Le bien peut aussi être adjugé sous réserve de surenchère. Lorsqu’il y a faculté de surenchère, l’immeuble est provisoirement adjugé à un candidat acquéreur lors de la séance de vente. Mais, pendant deux semaines, toute personne intéressée a la possibilité de faire une nouvelle offre. Pour autant que celle-ci soit supérieure d’au moins 10 % au prix obtenu, sans toutefois excéder 6 200 euros, une nouvelle vente sera alors organisée. Celle-ci se conclura par l’adjudication définitive du bien. Signalons que la réserve de surenchère est obligatoire lorsque la vente est judiciaire.
3. Le pouvoir du notaire
Le notaire exerce la police de la vente. Il est donc libre de trancher toute contestation entre surenchérisseur, de refuser l’offre de l’un d’eux parce qu’il la trouve trop peu crédible, d’annuler une enchère ou encore de reprendre l’une des enchères précédentes et d’adjuger le bien à son auteur. Celui-ci ne pourra alors se dédire. Lorsque plusieurs lots sont mis en vente, le notaire peut aussi décider de les mettre aux enchères séparément ou de les grouper, et il peut changer de tactique au cours de la vente.
4. Le prix
L’acquéreur devra payer le prix d’acquisition du bien, ainsi que les frais de notaire. Attention, ils sont légèrement plus élevés lors d’une vente publique. Pour un immeuble situé à Bruxelles et vendu à 190 000 euros, ils seront par exemple de 16 % au lieu de 13,9 %. Pour rappel, les frais de notaire comprennent les droits d’enregistrement, les honoraires du notaire et des frais divers. Quant au vendeur, il devra en principe s’acquitter des frais de mise en vente, qui couvrent la publicité et les visites. En général, ces débours s’élèvent à environ 3 500 euros.
Géraldine Vessière
Pour bien acheter en vente publique, il faut déterminer son budget et s’y tenir à tout prix