Une intercommunale devenue machine de guerre

L’Intercommunale du Brabant wallon ne cesse d’élargir son champ d’action et sa sphère d’influence. Au point de devenir l’un des acteurs les plus puissants de la province. Où sa croissance s’arrêtera-t-elle ? Et, à terme, quelle(s) institution(s) avalera-t-elle ?

« Les communes du Brabant wallon ne peuvent plus se passer de l’IBW. Même André Antoine, l’un de ses plus vifs opposants, l’a compris.  » L’aveu sort de la bouche d’un bourgmestre libéral brabançon. Il résonne comme un constat implacable de la montée en puissance et de la force de frappe que dégage aujourd’hui l’Intercommunale du Brabant wallon.

Active depuis 1966 dans les secteurs du développement économique, de l’assainissement des eaux usées et de la gestion des déchets, elle ne cesse d’élargir son champ d’action. Piscine, lutte contre les inondations, commissariat de police, centre de tir, promotion immobilière, caserne de pompiers, étude du tracé du contournement nord de Wavre, gestion du site du Lion de Waterloo : autant de dossiers évoqués ou lancés ces derniers mois qui témoignent de sa diversité nouvelle et de son caractère incontournable.

 » Nous ne faisons que répondre aux demandes des communes qui sont nos actionnaires, tempère Baudouin le Hardy de Beaulieu, directeur de l’IBW. Nos ingénieurs sont forts sollicités en raison de leur expertise. Nous n’avons pas de limite d’action. L’objectif est de répondre aux communes de la manière la plus efficiente.  »

Une chose est sûre : l’efficacité de cet outil qui emploie 270 personnes est saluée par tous, toutes tendances politiques confondues. Pas un mandataire, même en off, ne critique la qualité de son action. Sauf quand l’IBW a tendance à sortir des clous pour se muer en organe politique.  » L’élargissement du comité exécutif de 6 à 11 vice-présidents au lendemain des élections communales en 2012 pour satisfaire quelques libéraux déçus me reste toujours en travers de la gorge, concède André Antoine (CDH). De même que le refus de l’IBW de soutenir le projet de centre sportif de haut niveau à Louvain-la-Neuve. Elle a agi, sur ce point, en organe politique. Tant qu’elle fournit des services aux communes – et qu’elle les traite sur un plan d’égalité, encore bien – et agit en tant qu’opérateur technique, d’accord. Mais si ce n’est pas le cas, des problèmes pourraient surgir. Elle n’a par exemple pas le monopole du développement économique…  »

Et de citer, pour appuyer ses dires, la création par des investisseurs privés du centre d’affaires Axis Park, à Mont-Saint-Guibert.  » Nous ne faisons pas de politique, ce n’est pas notre rôle, répond Baudouin le Hardy de Beaulieu. Sauf dans le cas de la création du crématorium de Court-Saint-Etienne. Mais c’était une nécessité pour le Brabant wallon. Et son succès nous a donné raison.  »

Un Etat dans l’Etat ?

L’IBW, une des trois intercommunales de la province (les deux autres sont actives dans le domaine social et la distribution d’eau), est devenue une machine de guerre. Difficile de s’y opposer sans craindre un retour de bâton, sous forme de mise au ban. En tant qu’interlocuteur privilégié, tout le monde fait appel à ses services. Parfois, pour tout et n’importe quoi d’ailleurs. Un Etat dans l’Etat, en Brabant wallon ?  » Il est évident que nous sommes influents et puissants, mais ce n’est pas à moi de le dire « , relève Baudouin le Hardy de Beaulieu.

 » Il ne faut pas exagérer sa puissance et son influence même s’il s’agit d’un maillon essentiel et indispensable « , tempère André Antoine, qui tente toujours de diminuer le poids de cet outil aux mains des libéraux.  » Au fil des ans, l’IBW a pris de l’ampleur grâce à son sérieux et ses compétences, sans toutefois faire doublon avec d’autres organismes, tranche le socialiste André Flahaut, l’un de ses grands défenseurs. Si son champ d’action s’élargit, c’est parce que les communes ont moins de moyens aujourd’hui et que l’IBW agit comme bureau d’études.  »

Un constat qui pourrait encore s’accentuer dans le futur, sachant qu’une kyrielle d’ingénieurs de qualité vont bientôt devoir se tourner les pouces. L’épuration des eaux arrivant à sa fin, il va falloir occuper tout ce personnel. Réinventer le terrain d’action de l’IBW sera l’un des enjeux des prochains mois.  » La gestion de son personnel sera l’un de ses principaux défis, reconnaît-on chez Ecolo. Ses projets doivent maintenant être plus innovants dans une série de domaines, tels que le traitement des déchets.  »

A la demande de certaines communes, l’IBW avait notamment songé à développer un pôle touristique, soit en accueillant Mini-Europe, soit en reprenant au lendemain du Bicentenaire la gestion du site du champ de bataille de Waterloo. La première option est enterrée, la seconde semble suivre la même voie.

Vers de nouvelles missions

Quant à savoir si l’IBW pourrait, à terme, prendre la place de la province – une institution qui voit ses compétences de plus en plus rabotées – les avis sont partagés.  » L’intercommunale a une réelle utilité alors que la province n’a jamais prouvé la sienne, pointe André Antoine. Si l’IBW reste un organisme vertueux, efficace et technique, à terme, elle pourrait supplanter la province.  »

Et le Perwezien de citer les matières que l’intercommunale pourrait gérer aisément, comme les cours d’eau et la Régie foncière (logement).  » A terme, nous devrons compléter nos missions, reconnaît le directeur de l’IBW. Je pense que nous nous occuperons notamment de la gestion des cours d’eau. C’est également fort possible que d’autres matières nous reviennent. Nous verrons alors sous quelle forme nous existerons et la place que nous prendrons…  »

Par Xavier Attout

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