» Si vous n’êtes pas d’accord avec le PS, vous êtes un collabo… « 

Olivier Mouton Journaliste

 » … un fasciste ou un imbécile « , s’inquiète le politologue de l’UCL, qui a eu maille à partir avec des représentants du parti. Il parle d’un  » sectarisme inquiétant « .

Politologue français arrivé en Belgique il y a neuf ans pour étudier l’évolution du fédéralisme, Vincent Laborderie sait désormais combien il est délicat de s’attaquer au PS dans une Wallonie qui reste sous sa coupe. Le 24 octobre dernier, cet assistant de l’UCL critique vivement, à la RTBF, la campagne de communication menée par les socialistes contre les injustices du gouvernement Michel Ier. Il appuie son argumentation par un texte sur son blog :  » Quand le PS bascule dans le populisme décomplexé.  » Très vite, ce dernier fait le tour des réseaux sociaux.

Patrick Prévot, député au parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, s’étrangle sur Twitter :  » Au fait, @VLaborderie, votre billet a été rédigé en collaboration avec le Centre Jean Gol (NDLR : service d’études du MR) ?  » Tandis que le politologue plaide son indépendance politique, l’élu PS persiste :  » Excellente blague ! Relisez votre  » essai « … Et la plupart de vos tweets politiques.  »

Stupéfait, Vincent Laborderie rédige un nouveau texte sur son blog. On y lit :  » Le procédé est révélateur d’un sectarisme assez préoccupant de la part de personnes très proches de l’ex et futur président du premier parti politique. Patrick Prévot fut en effet le secrétaire particulier d’Elio Di Rupo quand il était Premier ministre.  » Le politologue cite aussi un autre conseiller du Premier ministre sortant, Jérémie Tojerow, qui multiplie les recadrages de ceux qui ne sont pas dans la ligne socialiste sur les réseaux sociaux.

Avec le recul, le politologue reste abasourdi :  » Le PS estime être le seul représentant du bien, du juste, du bon, dit-il au Vif/ L’Express. Si vous n’êtes pas d’accord avec lui, vous êtes soit un collabo, soit un fasciste, soit un imbécile qui ne sait rien alors qu’eux, ils ont l’IEV (NDLR : Institut Emile Vandervelde, service d’études du parti). C’est un parti agressif et arrogant.  »

Di Rupo ?  » Une erreur !  »

Cette posture morale, prolonge Vincent Laborderie, est sans précédent et dictée par le rejet du PS dans l’opposition fédérale :  » En décrétant que le ministre de l’Intérieur N-VA Jan Jambon n’était pas le bienvenu dans sa ville, Paul Magnette a démontré que le PS ne reconnaît pas la légitimité du gouvernement fédéral en raison de la présence de la N-VA et d’une idéologie qui ne lui convient pas. Cette position est nouvelle. Le PS a négocié avec la N-VA à deux reprises, en 2007 et 2010, et Paul Magnette a fait deux débats télévisés avec Bart De Wever avant les élections. A ce moment-là, cela l’arrangeait, il est vrai, d’être présenté comme le premier francophone…  »

Selon Vincent Laborderie, la réélection d’Elio Di Rupo à la présidence du parti témoigne d’une  » absence totale de remise en question « .  » Le PS se voit encore comme le parti dominant ou ultradominant dans l’espace francophone alors que ce n’est plus le cas, analyse-t-il. Jamais l’écart n’avait été aussi minime avec le MR qu’aux dernières élections, si l’on met même de côté l’exception de 2007, quand le MR était passé devant !  »

Dans ce contexte, la stratégie  » A gauche toute !  » du moment est une erreur.  » Le PS a fait un virage à 180 degrés. Durant la campagne électorale, il se voulait garant de l’Etat fédéral, de l’apaisement. Désormais, il dénigre le gouvernement fédéral, n’est plus du tout consensuel et tient un discours aussi dur que le PTB pour éviter que la FGTB ne tombe dans ses bras. Ce qui est incroyable, c’est que pour incarner ces stratégies diamétralement opposées, il est emmené par le même homme ! A terme, je suis persuadé que le parti va y perdre. Di Rupo a cassé son image de Premier ministre et d’homme d’Etat. En optant pour la gauche, il se coupe d’une part de l’électorat plus centriste, plus consensuel ou moins politisé. Or, le PTB ne représente jamais que 5,7 % des voix en Wallonie et les électeurs risquent de préférer l’original à la copie…  »

Olivier Mouton

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