Se retrouver seul devient une quête pour beaucoup. Vive les vacances spirituelles !
Dans la cohue des départs et des retours de week-ends prolongés de printemps, dans le tohu-bohu des migrations de l’été, on se prend parfois à rêver de se retrouver seul. Et, depuis quelque temps, on voit poindre une nouvelle catégorie de vacanciers à la recherche d’un peu de solitude. Surbookés, lassés d’être sans cesse débordés, d’avoir le sentiment que notre existence s’écoule un peu malgré nous, nous aspirons à reprendre nos esprits en faisant le vide. » La solitude est une aspiration forte des consommateurs « , confirme Frédéric Loeb, président de Loeb Innovation, qui aide les entreprises à transformer les tendances en produits. » La solitude devient quelque chose de rare, donc de précieux « , assure-t-il. Loeb prévoit l’ouverture de monastères non spirituels où l’on ne ferait rien sauf apprécier le silence. Selon le prêtre et psychanalyste Daniel Duigou, qui envisage d’installer un ermitage dans le désert du Sud marocain, » après le tourisme culturel monte une nouvelle forme de vacances : on veut prendre un temps d’arrêt, s’interroger sur qui on est et sur ce que l’on désire « . En même temps que nous recherchons la solitude, celle-ci nous fait parfois encore peur. » C’est un cadeau royal que nous repoussons, affirme l’écrivain Jacqueline Kelen ( L’Esprit de solitude, Albin Michel), parce que, en cet état, nous nous découvrons infiniment libres, et que la liberté est ce à quoi nous sommes le moins prêts. » Peut-être que, dans une société hyperindividualiste, nous avons encore besoin d’être rattachés aux autres. Et la solitude a une valeur thérapeutique, comme l’explique le psychiatre anglais Anthony Storr ( Solitude. Les vertus du retour à soi-même, Laffont), à condition de ne pas être subie. En France, 8,3 millions de personnes vivent seules, soit 14 % de la population. Désormais, ceux qui frappent à la porte des abbayes et des couvents ne sont pas tous en quête de spiritualité. Le monastère bénédictin de Solesmes accueille plus de 1 500 personnes chaque année. » Nous recevons de plus en plus de demandes de personnes qui éprouvent le besoin de venir se ressourcer au calme « , explique le père Louis Saultner. Et on se bouscule aussi dans les ashrams pour se lever à 4 h 30 du matin et méditer en silence. Le farniente a décidément pris un nouveau sens.
Jean-Sébastien Stehli