Avec The Soft Machine, disque lumineux, Ozark confirme qu’il est l’un des musiciens les plus doués de Belgique
Le premier morceau, These Days, éclate comme un fruit trop mûr sur une cavalcade de claviers francs et de percus pressées : la voix d’Ozark Henry ne faisant que cravacher d’un cran supplémentaire la cadence naturelle de ce cinquième disque volontaire. Celui-ci aligne douze pépites qui, mine de rien, mettent la barre assez haut dans le domaine circonscrit de la pop belge : harmonies venteuses parfaitement maîtrisées, mélodies souvent adorables et textes portés comme on câline un enfant, à bout de voix, par Ozark/Piet Goddaer, né en 1970 à Courtrai où il habite toujours. De la graine de tube qui éclate dans un son aussi vivifiant que le vent de mer du Nord automnal : il y reste, néanmoins, du soleil. La preuve, ces morceaux tels que Christine, Weekenders ou Le temps qui reste (sic), toniques, futés, radiophoniques sans être redondants. Les deux (avant-) derniers disques de ce jeune homme un peu timide se sont vendus à 80 000 exemplaires rien qu’en Belgique, alors qu’un Venus ou un Girls In Hawaii ne doit pas dépasser les 10 000-15 000…. C’est peut-être ce qui rend Piet sympa, cette façon d’être un artiste à succès mais » marginal « , en dehors des coteries branchées à la dEUS. Il vient en interview accompagné de sa femme, parle un français correct mais peu volubile, et s’indigne, à juste titre, de l’épisode récent de l’Octopus Festival (de Nivelles) qui l’a programmé sans jamais confirmer son heure de prestation ni payer l’avance convenue. » Je pense qu’ils m’ont mis sur l’affiche pour attirer du monde, je ne comprends pas… » Homme d’éthique, managé par une fille bien (Katrien Klausing), Piet n’est pas peu fier d’annoncer qu’il fera Forest-National, en tête d’affiche en février prochain. Big business à situer dans une affaire musicale qui mérite plus de succès à l’export qu’elle n’en a pour l’instant. Parce qu’au final, ce qui compte, c’est l’impact de la musique. Et, dans le cas d’Ozark, celui-ci est grand : dans cette troublante époque de faux-semblants, il mérite de confirmer à l’étranger sa popularité belge, ses chansons résonnant d’une singulière vérité.
CD The Soft Machine, chez Sony-BMG, en concert le 3 février 2007 à Forest-National, www.li venation.be
Philippe Cornet