La chancelière allemande a fait montre de fermeté sur le dossier de la dette grecque et de générosité sur celui des migrants. Deux visages qui en font la personnalité de l’année.
Doktor Merkel ou Mutter Angela ? Quelle image l’histoire retiendra-t-elle de la chancelière allemande en 2015 ? Vouée aux gémonies par certains au printemps (les manifestants anti-austérité en Grèce), adulée par d’autres en automne (les candidats réfugiés sur la route de l’exode), Angela Merkel aura monopolisé la scène politique, diplomatique, économique, humanitaire au point de s’imposer comme l’incontestable personnalité de l’année.
Au lendemain du » non » grec au référendum du 5 juillet sur le plan d’aide européen, c’est l’intransigeance de la dirigeante qui est vertement critiquée. Quelques jours plus tard, l’Union européenne et Athènes scellent pourtant un accord de sortie de crise : 86 milliards d’euros seront versés au gouvernement grec en trois ans en échange de réformes profondes. La fermeté d’Angela Merkel – oubliée alors, l’intransigeance – a payé. Tout au long de la crise, elle aura fixé et maintenu le cap : prête à aider ces Grecs » insouciants » mais pas à n’importe quelle condition. Sur un dossier financiéro-économique, le leadership de la chancelière n’étonne pas. Angela Merkel va surprendre sur d’autres fronts.
Diplomatique d’abord : à l’été, c’est elle qui emmène François Hollande négocier avec Vladimir Poutine et Petro Porochenko un cessez-le-feu entre l’armée de Kiev et les sécessionnistes pro-russes de l’est de l’Ukraine. Cet activisme illustre le nouveau rôle que Merkel assigne à la politique étrangère de l’Allemagne, domaine duquel, depuis la Seconde Guerre mondiale, la puissance vaincue s’est tenue volontairement distante.
C’est pourtant sur le front de la crise des migrants qu’Angela Merkel va marquer le plus les esprits. Alors que quelques dirigeants européens commencent à s’alarmer de l’arrivée continue de candidats réfugiés sur leur territoire et que les opinions publiques manquent de céder à leurs sirènes populistes, la chef de gouvernement du plus puissant Etat de l’Union exhorte ses pairs et ses concitoyens à accueillir dignement ces personnes déracinées. Une attitude qui lui sera ensuite reprochée, y compris au sein de sa famille politique. Le dossier de la dette et celui des migrants recèlent donc une constante pour la chancelière : ses efforts pour forcer des solutions acceptables seront finalement accueillis avec une grande ingratitude. Et pourtant, l’hebdomadaire britannique The Economist l’affirme avec force en novembre, » l’Union européenne a plus que jamais besoin d’Angela Merkel « .
Gérald Papy