Martin et Bouchez, semblables et si différents

Nicolas Martin et Georges-Louis Bouchez se ressemblent. Ils ont tout pour plaire, y compris la beauté du diable. Ils sont jeunes. Ils sont montois. Ils sont échevin et député wallon. Ils sont populaires. Ils disent ne pas vouloir dépendre de la politique, mais ils ne pensent qu’à ça.

Ils sont ambitieux. L’un est socialiste, l’autre libéral. Ils sont l’avenir de Mons et ils se détestent. L’un trouve que l’autre est de droite, l’autre aussi. L’un trouve que l’autre préfère la politique politicienne aux dossiers de fond. L’autre aussi. Ils sont les mêmes, c’est acquis. N’empêche, ils diffèrent quand même. Voici en quoi.

L’un est encore jeune, l’autre en aura éternellement l’air. Georges-Louis Bouchez a 29 ans, a participé à ses premières élections aux communales en 2012, comme tête de liste réformatrice, est encore à un âge où on peut sans honte écouter Joe FM, jeune premier ou pas, surdoué ou pas. Nicolas Martin, lui, a déjà 38 ans. La silhouette athlétique qu’il entretient rigoureusement et le sourire charmant qu’il affiche en permanence le rajeuniront encore longtemps. Il a pourtant déjà plus de vingt ans de vie politique sur les jarrets : membre du FDF à 16 ans, candidat aux communales à 18 ans, socialiste un rien plus tard.

Dans ce parti, à cet âge, compte tenu de sa précocité et de ses résultats électoraux, qu’il n’ait pas encore été ministre ni bourgmestre de plein droit serait incongru, n’était la présence très encombrante de celui qui l’a attiré au Parti socialiste et qui en a fait son successeur désigné. Vous savez bien, cet autre surdoué au sourire éternel. Celui-là même qui se plaît à glisser à ses interlocuteurs libéraux  » que si Georges-Louis Bouchez avait été au PS, il serait monté plus vite, plus haut « , alors qu’il a laissé Nicolas Martin monter très vite, mais qu’il ne veut pas le laisser monter plus haut.

L’un en a tué des plus forts que lui, l’autre des plus faibles. Protégé par Elio Di Rupo à son arrivée sur les listes socialistes comme candidat d’ouverture aux communales de 2000, Nicolas Martin n’a pas eu, jusqu’à récemment, à livrer de dangereux combats politiques. Il a écrasé ses concurrents socialistes locaux à coups de triomphes électoraux, construisant intelligemment ses réseaux et ses soutiens. Dans l’arrondissement, il a néanmoins victorieusement ferraillé avec Eric Thiébaut. Pour lui prendre la tête de liste socialiste aux élections régionales de 2014, d’abord. Pour lui succéder à la présidence de la Fédération socialiste de Mons-Borinage, ensuite. C’était gagné d’avance, dès lors que Thiébaut n’est pas, tant s’en faut, un Di Rupo boy.

Georges-Louis Bouchez, tout repéré par Louis Michel qu’il fût, ne s’en est pas moins tracé tout seul un sentier politique à la machette. Il a impitoyablement écarté de son chemin ses deux rivaux libéraux, Catherine Hocquet et Bernard Beugnies, forcément bien plus expérimentés que lui, au moment de la constitution des listes. On le sent tenté d’aller plus loin, dans sa fédération comme au parlement wallon. Il n’ira plus à la machette, mais pas par douceur d’esprit : parce qu’il pense pouvoir se permettre d’y aller au défoliant.

L’un dit qu’il sera bourgmestre mais ne le sera pas, l’autre ne le dit pas mais le sera. Georges-Louis Bouchez se pose, pour 2018, en candidat maïeur. Question de tempérament. De rapport de force aussi : c’est en exigeant beaucoup qu’on en obtient assez. Il n’a néanmoins aucune chance, en 2018, de devenir le premier bourgmestre libéral de Mons depuis 1953. Il n’est même pas assuré le moins du monde qu’il se trouvera, au PS, des gens pour défendre la reconduction de l’alliance laïque au pouvoir depuis 2000. C’est que son tempérament irrite. Un gros résultat lui sauverait peut-être la mise. La crainte de le voir pourrir la majorité de l’extérieur plutôt que de l’intérieur, comme il s’y emploie déjà avec opiniâtreté également. Nicolas Martin, quant à lui, est condamné à attendre, dans son bureau de député-échevin, certain de son fatal avènement, ignorant de son heure. Comme un dauphin dont le souverain ne vieillirait jamais.

Nicolas De Decker

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