En six ans, l’Europe a versé 1,3 milliard d’euros de subsides à la Wallonie et à Bruxelles. Qui sont les gagnants, qui sont les perdants ? Le Vif/L’Express dresse le bilan, à l’aube d’une nouvelle programmation plus équilibrée.
Le grand rendez-vous a lieu tous les six ans. Et 2014 constitue une année charnière dans la course aux titanesques subsides européens. En Wallonie, à Bruxelles et en Flandre, des centaines d’acteurs publics et privés épuisent en ce moment les fonds structurels européens octroyés pour la période 2007-2013. D’ici quelques mois, la programmation de subventions calibrées à l’horizon 2020 prendra le relais. Avec le même objectif : investir des milliards dans le potentiel économique de chaque région du pays.
L’Europe dispose de deux puissants leviers pour répartir cette manne dédiée à l’innovation et à la compétitivité : le Fonds européen de développement régional (Feder) et le Fonds social européen (FSE). De 2007 à 2013, l’enveloppe allouée à la Wallonie et à Bruxelles s’élève à plus de 1,3 milliard d’euros. Zones d’activités économiques, infrastructures urbaines, centres de recherche… Cofinancé avec les Régions, l’investissement final atteint plus de 3 milliards d’euros.
Alors qu’un comité d’experts analyse dans la plus grande discrétion les projets déposés pour la programmation 2014-2020, l’heure est au bilan. Le Vif/L’Express a rassemblé les données permettant d’établir la répartition des subsides du Feder (hors FSE) et leur bénéfice à l’échelle communale depuis 2007. Qui sont les gagnants ? Qui sont les perdants ? Les écarts illustrent le travail de lobbying mis en oeuvre dans les différents bassins de vie.
Les gagnants
Le Hainaut et la province de Liège concentrent l’essentiel des subsides européens pour la programmation 2007-2013. Le constat de l’époque reste le même aujourd’hui : » Les deux métropoles que sont Charleroi et Liège ne jouent pas pleinement leur rôle de moteur socio-économique « , indique Rudy Demotte (PS), ministre-président wallon sous la précédente législature et désormais à la Fédération Wallonie-Bruxelles. En raison d’un PIB (produit intérieur brut) moyen par habitant inférieur à 75 % de la moyenne européenne, la province de Hainaut a intégré l’axe » Convergence » dédié aux régions moins développées. Le montant des subsides cofinancés (Feder et FSE) s’y élève à plus d’un milliard d’euros. Mons et Charleroi ont englouti plus de 200 millions pour le Feder tandis que La Louvière et Lessines ont chacune décroché plus de 100 millions. La performance de Lessines (18 500 habitants) s’explique par l’important subside alloué pour l’extension de l’usine Baxter.
Liège, de son côté, devait partager le gâteau de l’axe » Compétitivité régionale et emploi » avec les autres régions du pays. La cartographie des montants répartis dans le cadre du Feder fait apparaître trois prétendantes liégeoises dans le top 10. Parmi les succès évoqués par l’Agence de développement économique liégeoise (SPI) : la valorisation des quais de Meuse, l’extension du Liège Science Park sur une ancienne friche industrielle et la construction de la tour Giga, dédiée aux biotechnologies.
Les perdants
Si la machine de guerre liégeoise a épargné les plates-bandes hennuyères, Namur a souffert en 2007 avec le cuisant échec de la candidature de la Citadelle. Le bourgmestre de l’époque, Jacques Etienne (CDH), avait fustigé le » langage bling-bling de certains bureaux d’étude » et les manoeuvres politisées autour d’un comité d’experts sans représentant namurois. La donne vient de changer. La Ville a intégré les pôles prioritaires pour les fonds européens. » Je me réjouis que l’on ait aujourd’hui une vision plus large des enjeux de développement territorial « , confie son bourgmestre Maxime Prévot (CDH).
Restent les provinces de Luxembourg et du Brabant wallon. La première a obtenu une enveloppe plutôt modeste en 2007 : seulement 4,8 % du montant de la manne Feder wallonne. Pour la prochaine programmation, l’intercommunale de développement économique Idelux espère en obtenir 8 %, notamment grâce à l’intégration d’Arlon parmi les pôles prioritaires. Quant au Brabant wallon, son standing plutôt aisé l’a quasiment exclu des débats en 2007. Seule la commune d’Ottignies-Louvain-la-Neuve, portée par son université, est présente dans le top 40.
Bruxelles sous-subsidiée
La logique européenne du PIB moyen par habitant a porté préjudice à la manne bruxelloise. La richesse qui y est produite ne correspond pas au niveau de vie réel de ses habitants. En 2007, la Région de Bruxelles-Capitale n’a pu investir que 115 millions d’euros pour le Feder, dont 57 millions en provenance de l’Europe. Ce montant sera doublé pour la prochaine tranche de subsides.
Les projets sélectionnés dans le cadre de la programmation 2014-2020 des fonds structurels européens ne seront connus que l’année prochaine. Seule certitude à ce stade : l’investissement global dépassera 2,5 milliards d’euros pour la Wallonie et Bruxelles. Avec une répartition plus harmonieuse des subsides.
Le tableau du Vif/L’Express reprenant les montants investis par commune pour la programmation Feder 2007-2013 est consultable sur levif.be.
Par Christophe Leroy