Sony, Facebook et Samsung se jettent à l’eau. Les premiers casques de réalité virtuelle débarquent sur le marché. Un pas marquant pour cette technologie hyper- immersive. Le Vif/L’Express les a testés.
Lâcher la réalité. Perdre pied. Explorer un monde artificiel, en immersion totale. Mode d’emploi ? Enfiler un casque pour plonger dans une simulation dont les paysages et les êtres numériques réagissent naturellement aux mouvements de la tête. Jeter un oeil vers le fond du gouffre avant la descente vertigineuse d’une montagne russe bancale. Et ressentir un vertige viscéral, tout en sachant que l’on est assis sur une chaise de bureau. L’ubiquité est possible en 2015. Derrière ce tour de passe-passe, on trouve le célèbre casque Rift d’Oculus. Depuis son lancement sur le site de crowdfunding Kickstarter (il y a deux ans), une myriade d’autres casques et accessoires de réalité virtuelle lui ont emboîté le pas. Les premiers modèles arriveront très prochainement sur le marché.
Le rachat pour 1,46 milliard d’euros d’Oculus par Facebook en mars 2014 a servi de déclencheur. Attendu aux alentours de 300 euros, le Rift devrait toucher 25 millions d’utilisateurs dans le monde d’ici quatre ans. Soit, à terme, un marché de 246,6 millions d’euros, selon le consultant MarketsandMarkets.
La réalité virtuelle devrait surtout dynamiser le jeu vidéo, qui lui sert de locomotive économique et technique. Estimé à 92,8 milliards d’euros à l’horizon 2017 (73,2 milliard d’euros en 2014), le marché du joystickdope la réalité virtuelle à l’intérêt interactif imbattable. On ne se contente pas seulement de bouger la tête pour admirer, sous toutes les coutures, des paysages qui défilent, on les explore via une manette de jeu ou des détecteurs de mouvement.
Au BotKamp, à Bruxelles, la plus grande salle belge de jeux en réseau, la première version du Rift voit défiler les curieux ébahis. » Le spectacle n’est pas que dans le casque mais aussi dehors, note Berkan Galeli, employé des lieux. La peur que peut provoquer l’apparition d’un monstre au détour d’un couloir est telle que même les joueurs aguerris hurlent de terreur. Les gens sont tellement immergés qu’ils bougent instinctivement leurs bras dans le vide et essayent d’attraper des objets du décor qui les entoure. »
Version numérisée des mouvements
Souvent observé, ce comportement n’a pas échappé à SoftKinetic, qui coiffait récemment le Rift de sa webcam stéréoscopique DepthSense. Comme beaucoup d’autres, la société ixelloise a profité de l’ouverture logicielle du casque pour essayer d’y apporter une amélioration : » Le casque d’Oculus ne permettait pas de voir ses bras en action dans cet environnement virtuel, souligne Mike Nichols, vice president content & application de cette société qui a aidé au développement logiciel de la caméra de la PlayStation 4. Notre département R&D travaille donc sur une technologie de caméra 3D permettant de transposer n’importe quel mouvement du corps du joueur dans le monde numérique où il évolue. Cela permet par exemple de voir une version numérisée des mouvements de ses doigts sur le volant. »
En attendant, Google se gausse gentiment de cet emballement général. En témoigne son projet de Cardboard, casque de réalité virtuelle low-tech à assembler comme un origami avec… une boîte en carton de pizza ! L’accessoire, dont les plans se téléchargent gratuitement, demande (comme le Gear VR de Samsung) de glisser un smartphone dans sa visière. Seul achat nécessaire, deux lentilles en plastique pour une poignée d’euros. L’ensemble tourne avec quelques logiciels et services dont Street View et Exhibit (pour regarder des sculptures en 3D sous tous les angles). Les Google Nexus 4 et 5, le Moto X comptent parmi les téléphones compatibles. Les Samsung Galaxy S4/S5 aussi. Un très joli pied de nez au constructeur coréen.
Par Michi-Hiro Tamaï