Le phénix informatique judiciaire

En cours depuis plusieurs mois, la modernisation du système informatique judiciaire belge s’accélère. Première nouveauté: un projet pilote de vidéoconférence pour les procès

Après les nombreux « affaires » et leurs suites judiciaires parfois chahutées qui secouèrent la Belgique ces dernières années, le ministère de la Justice tente aujourd’hui de redorer son blason en optimisant son fonctionnement par le biais des nouvelles technologies. Début juin, les détenus de Charleroi et Louvain se verront proposer une nouvelle méthode de comparution par vidéoconférence. Depuis un local de la prison où il est incarcéré, l’inculpé pourra assister au procès qui se déroulera dans une salle du palais de Justice spécialement équipée de caméras. Un tel projet repose avant tout sur une économie de temps, d’argent ainsi que sur une sécurité optimisée, explique Christophe Van Vaerenbergh, conseiller au cabinet du ministre de la Justice, Marc Verwilghen. En effet, ce nouveau système évitera la mobilisation et le déplacement du corps de police et supprimera les risques d’évasion durant les transferts. Si le cabinet se réjouit d’un tel progrès, ces nouvelles avancées technologiques sont d’ores et déjà décriées par une partie de l’ordre judiciaire qui craint la disparition des échanges privilégiés et confidentiels entre le détenu et son avocat. Mais, souligne M Van Vaerenbergh, un deuxième système sera installé dans une pièce annexe spécialement conçue à cet effet.

Bien décidé à prendre le taureau par les cornes, le ministère de la Justice travaille également depuis plusieurs mois à une rationalisation de l’ensemble de son système informatique pour lequel 25 millions d’euros ont été débloqués. Baptisé Phénix, le projet a pour objectif d’harmoniser les applications déjà utilisées par quelque 8 000 collaborateurs à travers le pays. « Le temps était venu pour la Justice belge de moderniser ses installations », explique Joannes Thuy, porte-parole du cabinet. En effet, depuis les années 1990, pas moins de treize systèmes informatiques différents ont été installés dans les divers départements du ministère de la Justice (tribunaux, greffes, parquets). Ce qui représente un entretien et un coût énormes ainsi qu’une perte de temps considérable! De fait, à chaque niveau de la procédure, toutes les données relatives à un dossier doivent être réintroduites…

Pris en charge par la firme Unisys, le projet en est à sa première phase, à savoir l’évaluation du matériel. Actuellement, il est encore trop tôt pour se prononcer sur l’état des lieux, explique Dominique Roelants, chef du projet chez Unisys. Cependant, la firme constate déjà de gros problèmes apparents tels que l’échange de données. « Mais une fois l’uniformisation effectuée, le système sera unique pour toutes les juridictions », précise-t-elle.

Une méthode d’apprentissage électronique

Afin de garantir un nouveau système informatique efficace, l’ensemble de l’ordre judiciaire est tenu informé des avancées du projet via le réseau Intranet du ministère. Chaque membre a donc un droit de regard mais également un droit de parole grâce à un forum permettant à l’équipe Phénix d’accorder ses travaux aux desideratas de ces derniers. De même, tout au long de ces réformes logistiques, le transfert se fera en douceur. Une méthode d’apprentissage électronique (e-learning) du nouveau système a d’ailleurs été prévue pour le personnel qui n’aura, dès lors, pas à souffrir d’un changement brutal, précise Dominique Roelants. « Dans un premier temps, les deux parcs informatiques cohabiteront, jusqu’au moment où le « vieux » système ne sera plus utilisé ».

Une fois le basculement opéré, d’autres changements verront le jour. Les avocats seront notamment en mesure de déposer leurs conclusions de manière électronique. Quant à la protection des écrits, le nouveau système se basera sur la signature électronique.

Fany Touitou

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