Le pacte d’Egmont, occasion manquée

Sur le papier, BHV est scindé et les francophones obtiennent des concessions. Leo Tindemans porte une lourde responsabilité dans la non-application de cet accord communautaire historique.

Au lendemain des élections d’avril 1977, Leo Tindemans, désigné formateur, engage des négociations sur les grands dossiers qui divisent Flamands et francophones. Y participent les partis de la future coalition : les socialistes, les sociaux-chrétiens, mais aussi le FDF et les nationalistes de la Volksunie. Après plus de deux semaines de réunions au palais d’Egmont, à Bruxelles, ces partis signent, dans la nuit du 24 au 25 mai, un vaste accord communautaire. Les Flamands obtiennent la scission de l’arrondissement de BHV (Bruxelles-Hal-Vilvorde), qui déjà empoisonne la vie politique du pays, mais un lien est préservé entre Bruxelles et les francophones de la périphérie (les six communes à facilités, plus sept autres). Ces derniers vont pouvoir voter pour des candidats bruxellois et continueront à remplir les formalités officielles en français.

Mais ce  » pacte d’Egmont  » est mal accueilli par les associations culturelles du nord du pays, hostiles aux solutions proposées pour Bruxelles et sa périphérie. La Volksunie est accusée d’avoir trahi la cause flamande en accordant trop de concessions aux francophones. Deux dissidences extrémistes de ce parti, le Vlaams Nationale Partij, de Karel Dillen, et le Vlaamse Volkspartij, de Lode Claes, se créent cette année-là et fondent ensemble le Vlaams Blok, actuel Vlaams Belang.

Sensible aux critiques flamandes, qui touchent aussi son parti, le CVP, Tindemans hésite sur l’attitude à adopter.  » Il avait signé cet accord à contre-c£ur et n’a, de toute évidence, manifesté aucun enthousiasme à le concrétiser « , assure le constitutionnaliste et sénateur CDH Francis Delpérée. Interpellé au Parlement par ses partenaires de gouvernement, le Premier ministre finit par présenter la démission de son cabinet au roi. L’accord, modifié l’année suivante par les accords du Stuyvenberg, ne verra finalement jamais le jour. Tindemans porte une lourde responsabilité dans cet échec.  » On a raté cette année-là l’occasion de pacifier les relations communautaires, confirme Francis Delpérée. Le pacte d’Egmont aurait mis un terme au contentieux sur BHV et aurait réglé la question du droit d’inscription en périphérie. Le système, certes un peu bancal, prévoyait qu’un francophone de Wemmel ou de Rhode-Saint-Genèse exerce ses droits politiques à Uccle, Etterbeek ou dans toute autre commune bruxelloise. « 

Selon le constitutionnaliste, le  » spectre du pacte d’Egmont  » rôde toujours :  » Le flop de 1977 vient du fait qu’après la signature du pacte, un an et demi s’est écoulé sans qu’il se concrétise, période pendant laquelle il y a eu beaucoup d’agitation, des marches, des manifestations. Quand un accord politique est conclu, il doit être rapidement appliqué. Les partis qui viennent de s’entendre sur les contours d’une sixième réforme de l’Etat en sont bien conscients. « 

O.R.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire