
Le charbon
On ne s’attendait pas à ça de la part d’un ministre écologiste: Robert Habeck, à la tête du ministère allemand de l’Economie… et du Climat, a d’ailleurs qualifié d’«amère» la décision qu’il a prise lui-même. Etranglée par la Russie, qui a réduit ses exportations de gaz vers l’ Allemagne, cette dernière n’a eu d’autre choix que d’annoncer la relance de sa production de charbon, polluante à l’extrême. Dans un contexte de fortes tensions liées au conflit en Ukraine, Gazprom a en effet divisé ses exportations de gaz vers l’ Allemagne par trois. Actuellement, Berlin importe toujours 35% de son gaz de Russie, contre 55% avant la guerre.
Pour autant, le gouvernement allemand, composé de socio-démocrates, d’écologistes et de libéraux, ne remet pas en cause deux décisions antérieures en matière d’énergie: la sortie du nucléaire en 2022, telle qu’annoncée en 2011 et la fin des centrales au charbon, en 2030. L’ actuelle situation géopolitique provoque ainsi un retour en grâce inattendu – et à contresens de la lutte contre le réchauffement climatique –, de ces petits morceaux de roche noire, riches en carbone, qui salissaient jadis les mains des enfants et les visages des mineurs. Première sorte d’énergie fossile, bien avant le pétrole et le gaz, le charbon a pour atout essentiel d’être largement disponible et facile d’utilisation. Au rythme actuel d’extraction, il en resterait au moins pour 120 ans dans le sous-sol du monde. Il permet aussi d’ajuster la production à la demande, ce qui n’est pas le cas des énergies renouvelables. En revanche, sa combustion génère 44% des émissions de dioxyde de carbone dues à l’énergie (chiffres de 2019) alors que le pétrole est responsable de 33,7% et le gaz naturel, de 21,6%. Pour maintenir la hausse des températures sous les 2°C, comme le prévoient les divers engagements internationaux pris pour lutter contre le réchauffement climatique, il faudrait renoncer à extraire plus de 80% du charbon disponible dans le sous-sol mondial, d’ici à 2050… La combustion du charbon porte aussi atteinte à la santé de ceux qui vivent dans l’environnement des centrales, sans parler des conditions de travail des mineurs.
Le recours contraint de l’ Allemagne au charbon ne devrait pas être prolongé au-delà de 2024. La production des centrales au charbon sera donc revue à la hausse ; celles qui devaient fermer cette année en vertu du plan de transition énergétique allemand resteront en activité et appel sera fait aux centrales dites de réserve, prévues pour n’entrer en action qu’en dernier recours.
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