Champagne ou cava ? Ces deux appellations tracent une ligne de front sur le marché du vin effervescent. Choisissez votre camp… après avoir passé les troupes en revue.
CHAMPAGNE
Forces en présence. La réputation du champagne – synonyme de luxe et de prestige – n’est plus à faire. Basé sur la sainte trinité des cépages chardonnay, pinot noir et pinot meunier, il se distingue de nombreux vins mousseux par sa méthode d’élaboration – une seconde fermentation en bouteille – qui nécessite temps et main-d’£uvre. L’appellation champagne qui date de 1936 recouvre une zone géographique bien distincte qui s’étend de Reims au sud-est de Troyes.
Offensive. Jusqu’en 2007, année record de ventes en Belgique, la vie a été un long fleuve tranquille pour le champagne. Alors que de nombreuses régions viticoles françaises souffraient, l’appellation a montré une santé insolente et était en constante progression chaque année.
Contre-offensive. La crise sonne le glas des golden years. Fin 2008, le champagne enregistre une baisse des ventes de 6,4 % à l’export – soit 141 millions de bouteilles vendues. Du coup, le stock gonfle : 1,2 milliard de flacons sommeillent en cave. Rien ne va plus, certaines maisons écoulent la marchandise en grandes surfacesà à moins de 10 euros la bouteille.
Perspectives. A mille lieues des années noires du champagne, où le compost provenait de boues urbaines peu ragoûtantes, la région s’engage désormais dans le sens du développement durable. La conversion bio pour planche de salut ?
CAVA
Forces en présence. Fort d’une Appellation d’Origine Contrôlée qui ne date que des années 90, le cava a été longtemps méprisé. Considéré comme un parent pauvre du champagne, il a incarné les bulles de supermarché. Basé ici sur le sainte trinité des cépages macabeo, xarello et parellada, il est élaboré selon la même méthode que le champagne. En revanche, il n’est pas confiné à une aire géographique restreinte. Le raisin peut provenir de différentes régions du nord de l’Espagne.
Offensive. Depuis le milieu des années 90, le cava grappille des parts de marché. Avec l’essor de la gastronomie et des vins espagnols, son blason se voit redoré. Pour s’engouffrer dans la brèche, les producteurs consacrent un effort tout particulier à la qualité.
Contre-offensive. L’investissement sur la qualité paie. En 2008, le cava progresse de 9,6 % des ventes à l’international – soit 139 millions de bouteilles vendues. Il devient une » marque » à part entière qui incarne un juste rapport qualité-prix prisé par les connaisseurs face au champagne suspecté de vivre sur son seul nom. A qualité égale, les pro-cava estiment que son prix est 3 à 4 fois inférieur.
Perspectives. Gare au retour de bâton. La crise incite le cava à contrer le champagne sur le seul angle du prix. Les bulles espagnoles risquent de retourner d’où elles viennent et de connaître le même sort que le xérès, il y a vingt-cinq ans. Soit une nouvelle assimilation à un produit mass market peu qualitatif.
Michel Verlinden