» J’ai été accro au porno « 

Des personnes dépendantes de la pornographie, comme de l’alcool ou de la drogue ? Oui, ça existe ! Elles sont de plus en plus nombreuses. Le sevrage est long et ardu. Témoignage étonnant.

Je me branlais plusieurs fois par jour devant l’écran de mon ordinateur.  » John Warsen (pseudonyme) se raconte sans honte ni forfanterie. Ce vidéaste de 42 ans, marié et père de famille, revient de loin. En 1999, il installe l’ADSL chez lui et découvre que le raccordement numérique à haut débit lui permet de visionner et de télécharger rapidement des images pornographiques. Un véritable robinet du X à la maison.  » Je suis vite devenu champion du monde du « dénichage » de sites de cul gratuits « , confie John qui, pendant plus de trois ans, a englouti ses soirées dans la consommation frénétique de ce qu’il appelle aujourd’hui le  » poison « .  » J’ai confondu virtuel et réel, puis j’ai préféré le premier au second. « 

En 2002, il prend conscience de l’isolement dans lequel le plonge son addiction.  » Je me trouvais misérable « , reconnaît-il. Commence alors une lente remontée vers le monde tangible. John consulte un psychiatre spécialisé dans les pathologies de dépendance. Il réalise aussi un clip dans lequel il exorcise sa souffrance (1). Enfin, en mai 2005, il découvre le site www.orroz.net et son forum (http ://orroz.forumactif.com), créés par un psychothérapeute qui a été lui-même  » sexolique « , c’est-à-dire « accro » au sexe.

Le forum n’est plus actif depuis janvier 2006, mais on peut toujours y lire des témoignages surprenants.  » Mon addiction au porno a commencé à l’adoles-cence, à 13 ans, y écrivait Brice, le 7 décembre 2005, alors âgé de 27 ans. N’ayant pas spécialement des cours d’éducation sexuelle à l’école, on allait avec d’autres copains prendre nos leçons en regardant des films X. C’est à partir de là que je suis devenu vraiment accro. J’essayais souvent de tout jeter, mais impossible de m’en passer.  »  » Quand je suis assez motivé pour tenter une relation avec une femme, au départ je ne recherche que la tendresse, car le sexe, j’en ai des kilos virtuels quotidiennement, confiait Phoenix, un mois plus tôt. J’ai du mal à avoir une érection la première fois avec les femmes qui me plaisent vraiment. « 

Grâce au site  » orroz « , John Warsen s’aperçoit que son cas relève quasi du banal, qu’il n’est pas le seul à voir sa sexualité perturbée à cause du porno (éjaculation précoce, pannes sexuelles…). Il s’en sortira progressivement, en allongeant un peu plus chaque fois ses périodes d’abstinence. Son parcours ressemble à celui d’un membre des alcooliques anonymes (dont il a d’ailleurs fait partie pour se libérer de sa dépendance à l’alcool).  » Là, cela fait six mois que je n’ai pas rechuté, dit-il. La dernière fois, cela n’a pas duré, c’était juste un après-midi.  » Désormais, il fait l’amour avec sa femme. Réapprend le b.a.-ba de la tendresse. Récemment, il a découvert que son fils de 15 ans surfait sur des sites pornos. Il lui a parlé, sans s’énerver, en lui expliquant que ce n’était pas le reflet de la réalité. Puis il a installé un logiciel de contrôle parental sur l’ordinateur familial…

L’histoire de John est révélatrice de la place que la pornographie a prise dans notre société, surtout depuis qu’Internet et l’ADSL ont ouvert toutes grandes les portes du domicile privé au X. Et cela ne concerne pas que les adolescents. Le porno, qui existe depuis des siècles, n’a jamais été aussi envahissant. C’est pourquoi Le Vif/L’Express et La Une (RTBF) lui consacrent un dossier sans tabous, respectivement dans son prochain numéro et dans le cadre d’une émission spéciale C’est la vie en plus, diffusée le 17 octobre.

(1) Le clip de John Warsen sera diffusé au cours de la soirée  » Porno chic, porno choc  » de La Une, le 17 octobre.

Thierry Denoël

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire