La religion musulmane pâtit des horreurs commises par Daech en son nom et d’un regard biaisé par le prisme moyen-oriental.

Les professions de foi scandant que  » cela n’a rien à voir avec l’islam  » n’y suffiront pas. La religion musulmane ne sort pas indemne de cette nouvelle annus horribilis, faite de guerres fratricides et de terrorisme au nom d’une croyance dévoyée.  » De quel « islam » parle-t-on ?  » devient dès lors une réflexion essentielle, notre vision européocentriste tendant à restreindre sa pluralité réelle.

L’islam lointain. Focalisés sur les tourments du Moyen-Orient, les Européens négligent d’autres réalités de l’islam. Ainsi, en 2015, le plus grand pays musulman, l’Indonésie (quelque 253 millions d’habitants), a consolidé son approfondissement démocratique concrétisé par l’accession à la présidence de Joko Widodo en octobre 2014. La région n’a plus connu d’attentats islamistes d’envergure depuis l’attaque d’hôtels de Jakarta en juillet 2009.

L’islam voisin. L’afflux estival de migrants démontre l’interdépendance de l’Europe avec son proche pourtour méditerranéen. Les guerres de Syrie et d’Irak ont témoigné d’une opposition de plus en plus exacerbée entre les deux principales branches de l’islam. C’est parce qu’ils se sentaient exclus du jeu politique à Bagdad par un pouvoir post-Saddam Hussein dominé par les chiites que les sunnites ont permis l’essor de l’Etat islamique. Le jeu d’influences entre puissances sunnites (pays du Golfe, Turquie…) et régimes chiites (Iran, Irak, Syrie…) est une des clés du conflit. A cette aune, le leadership de l’Arabie saoudite a été ébranlé par les accidents qui ont endeuillé le pèlerinage annuel à La Mecque (l’écroulement d’une grue, 107 tués, et une bousculade non maîtrisée, jusqu’à 2 000 tués, entre les 11 et 24 septembre).

L’islam européen. Les attentats de Paris ont précisément remis en cause l’influence de pays comme l’Arabie saoudite, et sa vision très rigoriste de l’islam, sur les prédicateurs en Europe. Au point, en Belgique, de questionner le partenariat historique sur la Grande mosquée du Cinquantenaire ou les relations économiques avec Riyad et, plus largement, d’oeuvrer à promouvoir un  » islam européen « . A aussi été interrogée à cette occasion l’absence de hiérarchie structurée de l’islam sunnite, voie ouverte à toutes les dérives. La dénonciation de l’Etat islamique par les musulmans a pourtant pris en 2015 des accents plus offensifs, le grand imam d’al-Azhar, Ahmed al-Tayeb, réclamant après la mort d’un pilote jordanien brûlé vif de  » tuer et de crucifier  » ses membres et le grand mufti d’Egypte Shawki Allam fustigeant des  » erreurs méthodologiques commises lors de l’interprétation des textes religieux « .

Gérald Papy

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire