Infatigable blasphématrice

Ses écrits lui ont souvent valu la prison, en Egypte. Ecrivaine et médecin, Nawal El Saadawi a reçu, conjointement, les insignes de docteur honoris causa de l’ULB et de la VUB.

Des cheveux blancs comme neige, une bouille de petite fille espiègle, ravie d’avoir joué toute sa vie des tours pendables aux pouvoirs en place… A 76 ans, aucunes représailles, aucun châtiment terrestre ou divin n’impressionnent plus Nawal El Saadawi, qui vient d’être honorée par l’ULB et la VUB. Née en 1931 près du Caire, l’Egyptienne, qui a obtenu, à 24 ans, un diplôme de psychiatre puis un poste de directrice au ministère de la Santé, s’est rapidement mis à dos les autorités de son pays, dès la publication d’essais contre le patriarcat, les classes dominantes ou les mutilations sexuelles subies par ses concitoyennes. Arrêtée en septembre 1981, sous la présidence d’Anouar el Sadate, elle passe trois mois dans la prison pour femmes de Qanatir, pour infraction à la  » loi de protection des valeurs contre le déshonneur « . Rien ne l’arrête, cependant : dans sa geôle, munie d’un simple crayon de maquillage offert par une détenue prostituée, elle couche sur du papier toilette ses Mémoires d’une prison de femmes qui seront ensuite publiés à Londres. Après la parution de son roman La Chute de l’Imam (1987), son nom circulant sur une liste fondamentaliste de condamnés à mort, elle s’envole avec son mari, en 1991, pour les Etats-Unis, où elle enseigne.

Cinq ans plus tard, de retour en Egypte, la voilà accusée d’apostasie (abandon public de sa foi), d’abord par des responsables religieux, puis par les instances officielles. Sommée d’expliquer au procureur général du Caire la teneur de sa pièce Dieu a donné sa démission, elle choisit de quitter à nouveau son pays natal au début de 2007. De l’étranger, elle continue néanmoins à militer, tantôt pour l’émancipation des femmes, tantôt contre les interventions militaires américaines et la mondialisation économique  » injuste « .

A l’occasion de sa double distinction en Belgique, l’une de ses £uvres pour la scène, Isis (1), à l’intrigue située dans le panthéon égyptien (mais aux critiques religieuses très contemporaines), vient d’être traduite en français par Xavier Luffin, professeur d’arabe à l’ULB.

(1) Editions Lansman.

Valérie Colin

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