Humez-moi ce théâtre !

Olivier Massart lance la saison du théâtre le Public dans Des souris et des hommes. Il la clôturera avec Claude Gueux, tout en ferraillant en tournée dans Les Jumeaux vénitiens : rencontre avec un comédien qui fait bouillir ses tréteaux comme ses marmites !

Un colosse avec un sourire de tendre et l’aisance d’un athlète, un acteur de tragédie américaine, de commedia dell’arte, de monologue hugolien… : le comédien Olivier Massart explose ces dernières saisons ! Boulimie ? Mot mal choisi pour ce diplômé de l’école hôtelière !  » Je garde un plaisir démesuré à faire la cuisine, à manger, à boire. J’aime faire mon marché, trouver l’adéquation du repas avec les amis de ma table. Choisir, inventer, improviser, préparer, soigner la saveur, le fond et la forme, pour partager avec d’autres… et pour un plaisir éphémère. Que de connivences avec le théâtre ! Il n’y manque que les applaudissements ! Il faut aussi savoir apprécier la cuisine du terroir et la plus recherchée, le soufflet de sole homardine ou le stoemp saucisses !  »

L’homme est donc né avec un fourneau dans le berceau. Et le théâtre s’y est taillé une place plus tard, en douceur, par la brèche d’un professeur de français et par un stage avec Philippe Sireuil.  » J’étais un complet néophyte, mais ça a commencé à fermenter dans mon esprit. Diplôme hôtelier en poche, j’ai voulu m’inscrire au Conservatoire de Paris. Je me suis retrouvé à Bruxelles, dans la classe d’André Debaar. Je ne connaissais rien ni personne !  » En trois ans, l’apprenti décroche son prix et se prépare à patienter…  » Je n’avais pas une gueule de jeune premier ; depuis mon adolescence, j’ai toujours paru plus vieux que je ne le suis à l’intérieur. Avec les années, l’adéquation s’est faite. L’image et le son sont devenus synchrones et les rôles intéressants sont apparus… J’ai l’impression aujourd’hui de mieux maîtriser mes moyens. Je ne suis plus aussi tributaire du désir des autres, je peux le provoquer, suggérer des rôles, comme je l’ai fait pour celui de Stanley dans Un tramway nommé désir, au Public.

Si l’homme prend son plaisir à sauter d’un genre à l’autre, il avoue son fil rouge :  » J’essaie toujours de creuser l’humanité du rôle. Car je crois que c’est cette part du miroir que le personnage envoie au spectateur qui le touche. J’ai peur d’entrer sur scène si je n’ai pas trouvé cette clé-là. Et c’est déjà arrivé, avec le Javert des Misérables, par exemple, à Villers-la-Ville. A l’inverse, le Lenny des Souris et des hommes est un puits d’humanité en soi, donc plus facile. Mais une scène assez stylistique comme Les Jumeaux vénitiens, de Goldoni, possède aussi des miroirs que l’on peut tendre : la peur, l’égoïsme. »

Olivier Massart est devenu un acteur fidèle de la maison de Michel Bogen. Paradoxe pour un homme qui refuse de se laisser enfermer et qui a pris un malin plaisir à passer d’un théâtre à un autre ?  » Quand je suis sorti du Conservatoire, j’avais un idéal : la troupe dans ce qu’elle a de positif. Répéter avec des gens que l’on connaît, avec qui on peut oser en confiance, permet de gagner beaucoup de temps aux répétitions. Au Public travaille une sorte de famille où les noyaux gravitent en tous sens. Un vrai carrefour de styles, de gens de tout horizon. Les discussions, les rencontres sur scène ou au bar sont toujours fructueuses. Il n’y a pas d’estampillage exclusif de style.  »

Homme de table, de scène, il passe aussi sur les plateaux de cinéma :  » J’y suis un ôbon acteur belge de série française », gendarme ou maître d’hôtel, mais j’aimerais apprivoiser davantage le jeu de la caméra.  » Ajoutez-lui encore le petit démon bien ancré de l’écriture, qui a déjà porté ses fruits ( Quelques fleurs, créé au Public). Ne lui reste qu’à trouver le temps et… le prisme artistique qui filtre les émotions trop intimes. Le colosse Olivier Massart avoue un tempérament d’angoissé, avec un brin de superstition.  » Si la représentation a bien marché, j’essaie de reproduire le rituel qui l’a précédé…  » l

Michèle Friche

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