Europalia reconstitue la célèbre chapelle des Scrovegni, chef-d’ouvre de Giotto, et éclaire l’art de Padoue au xive siècle
Giotto et l’art à Padoue au xive siècle. Espace culturel ING, Mont des Arts, 6, place Royale. Du 23 octobre au 11 janvier 2004. Tous les jours, de 10 à 18 heures, le mercredi jusqu’à 21 heures. Tél. : 02 547 22 92.
C’est l’un des plus précieux chefs-d’£uvre de la peinture italienne, et de l’histoire de l’art en général. L’exceptionnelle chapelle des Scrovegni, à Padoue, tout récemment restaurée, est désormais abritée par un sas antipollution, et ne se visite plus que sur réservation (bien à l’avance !). Les visiteurs n’y entrent que par petits groupes, pour une durée maximale de… 15 minutes. Tout est mis en £uvre pour préserver les merveilleuses fresques de Giotto (vers 1267-1337) qui décorent, en registres narratifs superposés, les murs entiers de l’édifice. Les fresques se divisent en différentes scènes, racontant les épisodes de la vie de la Vierge, du Christ, de sainte Anne et saint Joachim. Alors que, au bas des parois latérales, figurent les allégories des Vices et des Vertus, la contre-façade offre une saisissante représentation du Jugement dernier.
C’est en 1300 qu’un riche Padouan, Enrico Scrovegni, fils de Reginaldo, acquiert un terrain et commande à Giotto la réalisation d’une chapelle, £uvre totalement nouvelle pour l’époque. Probablement Enrico veut-il racheter l’âme de son père, usurier notoire, et la sienne par la même occasion, puisqu’il s’est adonné au même » vice « . Les usuriers sont d’ailleurs bien présents, dans la personnification allégorique de l’Envie, mais aussi dans l’Enfer, sous les traits, par exemple, de Judas pendu, qui fait face au Judas recevant la bourse de 30 deniers… L’ensemble des fresques et la maîtrise exceptionnelle de leur créateur û seuls quelques rares repentirs sont repérables dans l’ensemble du cycle û n’ont jamais cessé de frapper le regard, par l’expressivité des visages, l’attitude des personnages qui leur confère une remarquable puissance psychologique, l’équilibre de la composition, la perspective très neuve des décors architecturaux, la richesse et la nuance des coloris, la fluidité du rythme qui suscite cette impression de déroulement narratif calme et ininterrompu. Toutes ces caractéristiques, rassemblées là pour la première fois, en plein Moyen Age, ont fait de Giotto un artiste clé de l’histoire de l’art. On a pu dire de sa chapelle qu’elle était » miraculeusement Renaissance « . Il est vrai que Giotto, le premier, tourne ici franchement le dos à l’art byzantin, et initie la transition vers l’esthétique du Quattrocento, qu’il préfigure à tous points de vue.
Bonne nouvelle : Europalia Italie nous propose de visiter le chef-d’£uvre de Giotto… place Royale, à Bruxelles. La chapelle des Scrovegni sera, en effet, reconstituée à l’échelle d’un quart, avec reproduction photographique des fresques d’une très grande qualité. Quant à L’Eternel, le seul panneau de la chapelle, qui constitue le début du récit de Giotto puisqu’il figure le Père qui confie à l’Archange Gabriel la mission de l’Annonciation, il fera exceptionnellement le voyage, tout comme la statue en marbre d’Enrico Scrovegni, et d’autres £uvres et fragments de fresques d’élèves ou de suiveurs de Giotto. L’exposition s’élargira également au contexte artistique et historique de Padoue, faisant la part belle aux montages multimédias, aux ateliers pour enfants ou… pour adultes qui veulent s’initier à la technique de la fresque en compagnie d’un maître !
E.M.