ET UNE TRÈS PEUREUSE RETRAITE !

La grande enquête nationale Le Vif/L’Express – iVox – AXA, la première du genre depuis l’instauration de la réforme des pensions retardant l’âge auquel, en Belgique, on pourra prétendre à la retraite, révèle un tourment de grande ampleur au sein de la population. Tant parmi les actifs que parmi les déjà pensionnés, l’inquiétude règne. Et croît. Surtout chez les francophones. Trivialement dit : la majorité du millier de Belges que nous avons sondés est convaincue qu’elle ne disposera pas d’argent en suffisance pour affronter le quotidien, une fois la retraite sonnée. Très peu savent à combien s’élèveront leurs ressources mais la plupart se préparent à devoir de toute façon se serrer la ceinture. De façon drastique.

Cette angoisse n’étreint pas uniquement les plus âgés. L’enquête que nous publions cette semaine démontre qu’elle affecte toutes les générations, dès 35 ans ! De quoi convaincre facilement et largement (90 % de notre échantillon) de recourir à un ou plusieurs systèmes de pension complémentaire. Ce qui confirme donc que tout le monde, ou presque, se prépare plutôt méticuleusement à l’après-carrière. Mais que, pour autant, personne, ou presque, ne se considère à l’abri de toute difficulté.

Comment expliquer la hantise que représente désormais la retraite ? Plusieurs facteurs interviennent. L’évolution du coût de la vie et la permanence de la crise économique, d’abord. La viabilité même du système des pensions, ensuite ; 71 % des Belges, davantage encore parmi les francophones (75 %), l’estiment  » intenable à l’avenir « . Et donc, ceux-là demandent des… réformes. Contradictoire avec l’opposition clamée à celle décidée cette année ? Pas forcément : en fait, si peu d’entre nous sautent de joie à l’idée de devoir travailler plus longtemps, 65 % défendent un modèle de financement des retraites donnant un emploi à plus de personnes. Ce qui constitue l’écueil sur lequel se brisent à peu près tous les gouvernements occidentaux, qui font de la lutte contre le chômage leur priorité mais qui se révèlent, dans les faits, les uns après les autres, incapables de favoriser la création d’un nombre de postes suffisant.

La récente réforme du système de pensions, enfin, dont le gouvernement de Charles Michel a fait un fleuron, est historique, clairement. Mais elle semble avoir brutalement brouillé les cartes aux yeux d’une majorité des Belges. Trois quarts d’entre eux s’estiment mal informés, ou ne comprennent pas les nouvelles donnes. Trois quarts rejettent la réforme, aussi. Et un petit tiers affirme, aujourd’hui, que l’allongement des années de travail pourrait influencer leur vote, aux prochaines élections fédérales, en 2019 : 30 % de la population active envisagent de donner leur voix à un autre parti que celui qu’ils ont choisi au dernier scrutin. Déduction : la formation pénalisée ne peut être que l’une de celles qui composent l’actuelle majorité (MR – N-VA – CD&V – Open VLD). Ce n’est pas acquis, mais il faudra peut-être compter avec cela, dans quatre ans.

Reste que nous voilà encore confrontés à une peur. Une autre peur. Collective, elle aussi. Mais, pour une fois, qui ne s’apparente pas à du pain bénit pour la coalition de centre-droit actuellement à la manoeuvre à l’échelon fédéral. On attend de voir avec grand intérêt comment et quand elle entend y répondre. Histoire de pouvoir, enfin, mesurer son envergure, son courage et sa cohésion.

Et, qui sait, moins trembler en songeant à demain.

de Thierry Fiorilli

 » Cette peur, pour une fois, ne s’apparente pas à du pain bénit pour la coalition de Charles Michel  »

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