En dépit des protestations de son directeur, le bail du cinéma d’art et d’essai Arenberg se termine dans moins de deux mois.
Etait-ce un signe prémonitoire ? Pour sa 22e édition, de juin à septembre derniers, l’Arenberg, situé au sein des Galeries royales Saint-Hubert, a fait le choix inédit de déplacer son festival à succès » Ecran Total » (25 000 visiteurs) au cinéma Plaza Art de Mons. Un premier pas extra-muros qui semble annoncer la suite des événements, à savoir son déménagement intégral. La raison ? Des arriérés de loyers importants, d’un total de 350 000 euros en plus de trois ans. Mais aussi, l’arrivée d’un projet concurrent sur la table de la Société des Galeries Saint-Hubert (voir encadré). Le couperet ne tarde pas à tomber : le 31 décembre prochain, le bail ne sera pas renouvelé et l’Arenberg, remercié. N’en déplaise à son directeur, Thierry Abel, et aux plus de 30 000 signataires d’une pétition en faveur de son sauvetage.
Une page se tourne. Une de plus, car l’histoire cinématographique des Galeries est longue. En 1896, elles abritaient la première projection publique du cinématographe Lumière en Belgique. L’Arenberg s’y installe en 1987. Durant vingt-cinq ans, la petite équipe de Thierry Abel £uvre en faveur d’un réel projet social et culturel, qui transcende le grand écran pour prendre la forme d’un centre de rencontres et d’échange. Aux multiples activités, convoquant annuellement 70 000 cinéphiles aux âges, attentes et horizons divers ; ainsi que près de 35 000 enfants (en 2010), lors de sorties scolaires, dossiers pédagogiques à la clé. Un travail de longue haleine qui porte ses fruits, l’Arenberg ayant réussi à s’imposer en véritable institution bruxelloise, temple de l’art et essai. Mais ce succès se mesure plutôt chichement en espèces sonnantes et trébuchantes. Il se chuchote que la Communauté française porte à bras-le-corps le cinéma le plus subsidié de la capitale. Lequel aurait perdu, en moins de douze ans, 35 % de sa fréquentation, soit 40 000 spectateurs.
Un centre de cinémas
Serait-ce une des raisons pour lesquelles Thierry Abel a imaginé en parallèle, voici des années, un » centre de cinémas « , adossé au Wiels forestois, haut lieu de l’art contemporain à Bruxelles ? Dans un communiqué, il ne cache pas que » la création d’un tel lieu permettra de gagner une plus grande indépendance financière en augmentant la part d’autorentabilité par rapport à l’argent public grâce à une offre commerciale étendue et aux économies d’échelle « . Et ce, en rassemblant autour du bâtiment classé des anciennes brasseries Wielemans-Ceuppens, cinq salles de cinéma (dont une de 400 places), de l’horeca, des bureaux et un espace commercial. Si l’étude de faisabilité commandée par Beliris est encourageante, les estimations de budget le sont moins : 18 millions d’euros.
Toujours est-il que l’Arenberg sera sans-salle-fixe d’ici à une poignée de semaines. Et Thierry Abel d’enchaîner les réunions avec la Fédération Wallonie-Bruxelles pour parer au pire, en un temps record.
FRÉDÉRIQUE MASQUELIER