» Changeons la façon de considérer la création « 

Le chef français succède à Michel Tabachnik à la tête du Brussels Philharmonic et devient le tout premier directeur de l’innovant Centre for Future Orchestral Repertoire (Cffor). Un vent d’enthousiasme soufflera sur la musique du XXIe siècle.

Fondé en 1935, sous l’égide de l’INR (Institut national de radiodiffusion), le Brussels Philharmonic est arrimé au  » paquebot  » Flagey, à Bruxelles. Ces dernières années, Michel Tabachnik a propulsé la formation au- devant de la scène internationale grâce à une programmation audacieuse et à l’enregistrement de bandes originales pour le cinéma dont celle de The Artist, couronné par un Oscar. Stéphane Denève, habité par une passion dévorante et authentique, compte bien poursuivre l’ambitieuse stratégie de l’orchestre et s’engage à promouvoir le répertoire symphonique du XXIe siècle.

Le Vif/L’Express : Comment êtes-vous devenu chef d’orchestre ?

Stéphane Denève : J’ai commencé par le piano à Tourcoing, dans le nord de la France, mais très vite j’ai préféré la direction. Diriger un orchestre, c’est croire au miracle d’être ensemble, partager la musique et vibrer à l’unisson. Après des études au Conservatoire de Paris, j’ai dirigé une dizaine de productions à l’Opéra national de Paris dont La flûte enchantée et Cosi fan tutte de Mozart. J’adore les chanteurs, la voix et les mélodies. Je suis fasciné par l’aspect mélodique de la musique, plus que par les aspects rythmiques et harmoniques, car c’est le plus mystérieux. Puis j’ai entaméune carrière symphonique. Aujourd’hui, je suis directeur musical de l’Orchestre symphonique de la radio de Stuttgart, chef invité de l’Orchestre de Philadelphie et, depuis ce 1er septembre, directeur musical du Brussels Philharmonic. Le talent, l’ouverture d’esprit, la concentration et la bonne humeur de cet orchestre me séduisent énormément.

Vous êtes aussi le premier directeur du flambant neuf Centre for Future Orchestral Repertoire (Cffor). De quoi s’agit-il ?

Le répertoire orchestral actuel dépend beaucoup trop des oeuvres anciennes. Il est urgent de faire découvrir au public du monde entier les meilleures compositions symphoniques de notre siècle. Le but du Cffor est d’identifier les oeuvres créées depuis le 1er janvier 2000 qui vont devenir  » de répertoire « . Une oeuvre de répertoire, c’est une oeuvre que les musiciens aiment jouer et ont envie de rejouer et que le public souhaite entendre et réentendre. C’est aussi une oeuvre qui peut garder son pouvoir dans un contexte historique différent. Il y a très peu d’oeuvres de répertoire. On crée des oeuvres, on les joue une seule fois et on ne les rejoue jamais. Or, c’est de la musique vivante, écrite pour les vivants. Changeons la façon de considérer la création. Il faut faire ce travail pour aider les compositeurs. Nous sommes donc en train de constituer une importante base de données. Disponible en ligne et accessible à tous, elle fournira les informations sur toutes les oeuvres symphoniques créées depuis 2000 et permettra de lancer un grand débat international au sujet des partitions susceptibles de devenir les nouveaux piliers du répertoire symphonique de notre siècle.

Que proposez-vous pour la saison 2015-2016 ?

Un choix personnel et subjectif. Chaque concert (1) sera un mélange d’oeuvres des XIXe, XXe et XXIe siècles. Il faut que les gens soient curieux. L’orchestre symphonique, dans l’absolu, est en train de devenir un musée. C’est un musée, mais aussi bien autre chose !

(1) Premier concert : le samedi 19 septembre, à 20 h 15, à Flagey, à Bruxelles. Au programme : Franck, Connesson, Debussy (piano : Frank Braley). www.flagey.be

Entretien : Barbara Witkowska

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