Lauréat du Concours Reine Elisabeth 2013, le jeune Israélien revient au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles pour nous régaler avec le Concerto d’Edvard Grieg.
Né à Moscou en 1984, Boris Giltburg a grandi à Tel-Aviv où il a commencé à étudier le piano dès l’âge de 5 ans. Un quart de siècle plus tard, après avoir joué dans des salles les plus prestigieuses (comme le Concertgebouw à Amsterdam) et après avoir travaillé avec des chefs comme Neeme Jarvi ou Emmanuel Krivine, il est devenu un artiste épanoui, à la curiosité insatiable et au répertoire immense.
Le Vif/L’Express : Vous allez interpréter, avec l’Orchestre National de Belgique, le Concerto pour piano d’Edvard Grieg, son seul concerto pour piano, rarement joué. Pourquoi ce choix ?
Boris Giltburg : J’adore Grieg, sa musique me touche de manière très profonde. Pour moi, elle est la version musicale de la nature scandinave. Edvard Grieg n’avait jamais écrit une seule mauvaise note, le niveau de ses oeuvres est très élevé et très homogène. Dans son Concerto pour piano, il y a une richesse et une inspiration de la première à la dernière note. C’est vrai qu’il est peu joué et je suis d’autant plus content de le faire connaître. Le Concerto a un impact très direct et immédiat, c’est une musique universelle.
Le Concours Reine Elisabeth a-t-il changé votre carrière ?
Il a changé ma vie. Je vais vous expliquer pourquoi j’y ai participé. En 2011, j’ai décroché le deuxième prix au Concours Arthur Rubinstein à Tel-Aviv, mais j’ai essuyé pas mal de critiques. On me reprochait un jeu trop carré et pas assez de liberté musicale. Pendant deux ans, j’ai travaillé ces aspects-là. Le Concours Reine Elisabeth était une épreuve personnelle. Le premier prix et le prix du public m’ont prouvé que je l’ai réussie. Ce concours m’a apporté une résonance dans le monde entier et la fréquence de mes concerts a quasi doublé.
On vous compare à Sviatoslav Richter ou à Arthur Rubinstein. Est-ce flatteur ou énervant pour un pianiste qui veut suivre sa voie ?
Ce sont deux de mes idoles, donc, oui, c’est un peu flatteur (sourire). Cela dit, quand je les entends, je ne pense pas pouvoir jouer comme eux. Un artiste ne peut pas échapper à soi-même. Tout artiste a son histoire et sa sensibilité. Je crois qu’il faut prendre comme seule référence la partition. Si on essaie d’imiter un pianiste, c’est du second hand. Je me base sur la vérité musicale, c’est plus important que de mettre ma personne à l’avant-plan.
Vous parlez six langues et vous traduisez en hébreu de la poésie, notamment celle de Rainer Maria Rilke. La poésie a-t-elle encore sa place aujourd’hui ?
La traduction est un hobby, je n’ai pas l’ambition d’être publié. Le livre d’heures de Rilke est un livre de prières. Les 134 poèmes qu’il réunit sont comme des lettres écrites à Dieu. J’y travaille depuis trois ans. Pour moi, la poésie c’est la richesse du monde exprimée en trois ou quatre lignes. Elle a le pouvoir de nous toucher immédiatement. On se sent enrichi. La poésie est éternelle et ne va jamais disparaître.
Vous venez de signer un contrat avec le label Naxos. Quels sont vos projets discographiques ?
Je suis très heureux de commencer cette collaboration. Naxos représente l’accès à la musique pour tous. Le premier CD sortira en février 2015 avec les oeuvres de Robert Schumann : Papillons, Carnaval et Davidsbündlertänze. Ce sont des univers théâtraux et féeriques. Schumann, c’est de l’imagination pure !
Le 19 octobre, à 15 heures, au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles. www.bozar.be
Entretien : Barbara Witkowska