Mélanie Geelkens

Une sacrée paire de cuyes

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Domitilla déteste les hommes. Elle glisse ça, comme ça, entre une explication sur l’amendement des sols grâce aux étrons de chèvres et un mot sur les lombrics dans son compost. Mais ce bref passage-là, tout le monde le comprend avant la traduction espagnol-français. Et tout le monde rigole, même si ça n’a probablement rien de marrant.

Peut-être a-t-elle été l’une de ces sept femmes sur dix victimes de violences conjugales. Peut-être s’est-elle ramassé une beigne, un jour qu’elle revenait du champ de pommes de terre, parce que son mari l’attendait plus tôt à la casa. Ou cette fois où c’était lui qui rentrait d’avoir labouré les patates et qui avait trouvé un autre homme dans sa demeure, fût-il travailleur humanitaire. Peut-être avait-elle pris l’habitude d’encaisser, lorsque Monsieur réapparaissait, après plusieurs semaines de labeur dans les proches champs de coca. Les poches pleines mais les bourses vides, les narcos s’étant (aussi) chargés du paiement en nature.

Domitilla ne raconte rien de ce que tant de paysannes péruviennes endurent, dans les montagnes de la région de Huánuco. Elle mentionne juste son premier époux, celui qui avait décidé d’allègrement arroser leur monoculture de papas d’engrais et de pesticides, et qui l’a quittée il y a vingt-cinq ans. Puis le second, avec qui elle vivait  » en bas « , dans un appartement où elle ne faisait rien d’autre que d’entretenir celui qui l’entretenait. Pour finalement revenir  » en haut « , dans la maison de ses parents agriculteurs.

Ça n’a l’air de rien, mais recevoir chez elle, sans homme, ces gringos de journalistes accompagnant Islas de Paz (1), c’est déjà un exploit, dans ces terres chatouillant les nuages, où une femme ne prend généralement pas publiquement la parole. Ou pas sans fixer le sol. Ou pas sans s’excuser de l’absence d’un mari. Ou pas sans s’en prendre une. Au Pérou, comme dans les quatre autres pays où elle est active, Iles de Paix n’intervient pas pour ça, à la base. Mais difficile de nier cette dimension du genre, latente dans toutes les familles aidées par l’ONG belge. Encourager la transition agro- écologique pour améliorer la qualité de vie, c’est bien. Eviter que bobonne déguste, c’est mieux.

Christian Castro Herrera, ancien facilitateur de terrain, se souvient de ses premières réunions de village. Les femmes restaient tellement muettes que, pour connaître leur avis sur les activités de développement à privilégier, il avait fallu leur demander de coller des pastilles à côté des photos qu’elles préféraient. Ainsi les cuyes s’étaient retrouvés ornés de gommettes.

Elles les connaissent bien, ces cochons d’Inde, pour les sentir courir entre leurs jambes dans leur cuisine aux murs de suie. Du sol à la casserole, difficile de faire plus court circuit ! D’abord, il a donc fallu convaincre que ces bestioles pouvaient vivre sans fumée ni chaleur, dans leurs propres enclos. Puis les construire, avec l’aide de Monsieur. Histoire qu’il ne se sente pas exclu du processus d’émancipation de sa chère et tendre… Pour, enfin, encourager l’élevage comme activité économique. Les revenus 100 % féminins passent mal, paraît-il. Mais le bénéfice, pour elles, est aussi non matériel : journées de formation, apprentissage de la lecture et de l’écriture, conscientisation des époux aux tâches effectuées par leur moitié…

Enfin, conscientisation de certains d’entre eux. Parce que, bon, il y en a qui envoient bouler les humanitaires qui se risquent à établir un semainier répertoriant les tâches de chacun, mais surtout de chacune. Il n’y a pas qu’au Pérou, d’ailleurs, que coucher sur papier les activités ménagères respectives au sein d’un couple pourrait se révéler surprenant.

1.0En décembre dernier, j’ai eu la chance de partir au #perou , dans la province de Huanuco, l’une des plus pauvres du pays. .
Le voyage était organisé par l’ONG @ilesdepaix et parrainé par le chef doublement étoilé au #michelin , @degeimbresanghoon . Le thème était la transition agroécologique, mais j’ai découvert là-bas que le travail de terrain portait aussi sur l’amélioration des conditions de vie des femmes. .
À Huanuco, selon les #statistiques officielles, 7 femmes sur 10 sont victimes de violences conjugales, physiques ou psychologiques.
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L’un des vecteurs de leur #émancipation est l’élevage de cochons d’Inde, qui se prononce… « couille », en espangol 😅
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L’occasion était donc doublement belle d’en faire une chronique, à lire dans le Vif et sur le site !
#ilesdepaix #airdutemps #sanghoondegeimbre #chef #gastronomie #cuisine #agroecologia #transition #developpementdurable #ecologie #nourriture #feminisme #feministe #violencespsychologiques #violencessexuelles #violences #couple #egalite hommefemme #levif #humanitaire #peru

Photo : @eglantinen ❤unesacreepairehttps://www.instagram.com/unesacreepaire214239090852223490551718499408_21423909085Instagramhttps://www.instagram.comrich658

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En décembre dernier, j'ai eu la chance de partir au #perou , dans la province de Huanuco, l'une des plus pauvres du pays. . Le voyage était organisé par l'ONG @ilesdepaix et parrainé par le chef doublement étoilé au #michelin , @degeimbresanghoon . Le thème était la transition agroécologique, mais j'ai découvert là-bas que le travail de terrain portait aussi sur l'amélioration des conditions de vie des femmes. . À Huanuco, selon les #statistiques officielles, 7 femmes sur 10 sont victimes de violences conjugales, physiques ou psychologiques. . L'un des vecteurs de leur #émancipation est l'élevage de cochons d'Inde, qui se prononce… "couille", en espangol 😅 . L'occasion était donc doublement belle d'en faire une chronique, à lire dans le Vif et sur le site ! #ilesdepaix #airdutemps #sanghoondegeimbre #chef #gastronomie #cuisine #agroecologia #transition #developpementdurable #ecologie #nourriture #feminisme #feministe #violencespsychologiques #violencessexuelles #violences #couple #egalite hommefemme #levif #humanitaire #peru Photo : @eglantinen ❤

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(1) Du 10 au 12 janvier, Iles de Paix organisait sa 50e collecte annuelle de fonds.

Réalités virtuelles

 » Every cool girl is half a boy.  » Ce slogan est censé faire vendre des vêtements. C’est du moins ce que la marque Zadig & Voltaire a imaginé, et qui lui vaut aujourd’hui de faire partie des nominés du premier Lazy Marketing International Award (prix du marketing paresseux). Comme Fisher Price et ses robots roses vendus dix euros plus cher que les bleus, ou Marbaise, magasin de chaussures, qui scande qu' » un jour, les femmes domineront le monde, mais qu’aujourd’hui, c’est les soldes « . Sept associations/groupements européens, dénonçant le sexisme dans le marketing, ont sélectionné une dizaine de campagnes diffusées en 2019. Depuis le 13 janvier, via Facebook, les internautes sont invités à voter pour leur pire tiercé. Le  » gagnant  » sera dévoilé le 24 janvier. Toute publicité est-elle réellement bonne à prendre ?

4%

des 95 000 oeuvres faisant partie de la collection permanente du musée d’art de Baltimore sont signés par des femmes. L’institution américaine a donc décidé, en 2020, de n’acquérir que des réalisations féminines et y consacrera deux millions de dollars. Une manière  » d’éveiller les consciences […] et de corriger un déséquilibre « , a déclaré le directeur au Baltimore Sun.

Elles lisent, en plus !

Une sacrée paire de cuyes

Bon, Mesdames, après avoir bossé, récupéré les enfants, fait les courses, préparé à manger, il faudra lire un peu. Par exemple, le tout nouvel ouvrage T’as pensé à… ? , un  » guide d’autodéfense  » sur la charge mentale (Le Livre de poche), signé par Coline Charpentier, créatrice d’un compte Instagram du même nom. 160 pages de diagnostic, d’argumentation (pourquoi il ne suffit pas de changer de mec) et de solutions, en politique, à l’école, au travail… Après ça, faudra pas oublier de mettre les petits au lit, hein !

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