L’Arménie et l’Azerbaïdjan se sont engagés vendredi, à Washington, à “cesser définitivement” au conflit territorial qui les oppose depuis plusieurs décennies, a déclaré Donald Trump.
Aux côtés du président américain à la Maison Blanche, le président azerbaïdjanais Ilham Aliev et le Premier ministre arménien Nikol Pachinian ont estimé que sa médiation, menée avec un sens marqué pour les honneurs et distinctions, pourrait lui valoir le prix Nobel de la paix.
Les deux anciennes républiques soviétiques « s’engagent à cesser définitivement tout conflit, à ouvrir les relations commerciales et diplomatiques et à respecter la souveraineté et l’intégralité territoriale » de chacune, a assuré le président américain. La nature contraignante ou non de cet engagement n’est toutefois pas claire. « Vous allez avoir une très bonne relation« , a-t-il lancé à ses deux invités, ajoutant: « Si ce n’est pas le cas, appelez-moi et j’arrangerai ça« .
« Nous nous réjouissons des progrès réalisés en vue de l’établissement d’une paix durable entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie », a salué le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué, réagissant aux annonces de Washington. Son homologue iranien s’est félicité du texte tout en exprimant « sa préoccupation quant aux conséquences négatives de toute intervention étrangère, sous quelque forme que ce soit ».
Nobel de la paix
La France, où vivent des centaines de milliers de personnes d’origine arménienne, a pour sa part évoqué une « avancée déterminante », négociée « en vue de la normalisation des relations » entre Erevan et Bakou.
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président du Conseil européen Antonio Costa ont évoqué dans un texte commun « une avancée majeure… ouvrant la voie à une paix durable et viable pour les deux pays et pour toute la région ».
Londres a salué des « mesures audacieuses » pour la paix après l’accord et le « rôle essentiel » de Donald Trump et Berlin un traité « porteur d’espoir ».
Parlant de jour « historique », Ilham Aliev a proposé d’envoyer, avec Nikol Pachinian, une lettre pour soutenir la candidature de M. Trump au prix Nobel de la paix. « Qui, si ce n’est le président Trump, (le) mérite? », a demandé l’homme fort de Bakou. Il a remercié Donald Trump pour sa décision, également annoncée vendredi, de lever les restrictions pesant depuis plusieurs années sur la coopération militaire de son pays avec les Etats-Unis.
Le dirigeant arménien a lui aussi exprimé son soutien à un prix Nobel de la paix pour Donald Trump: « Nous allons défendre » cette candidature.
Les candidatures pour le prix Nobel de la paix 2025 sont closes depuis le 31 janvier et ne sont pas rendues publiques.
« Fort et intelligent »
Israël, le Pakistan et le Cambodge ont annoncé récemment qu’ils nommaient Donald Trump, lequel estime mériter amplement cette distinction pour divers efforts de médiation.
MM. Aliev et Pachinian se sont serré la main sous l’oeil de Donald Trump, et ont ensuite signé tout comme lui une « déclaration commune ». « Nous établissons aujourd’hui la paix dans le Caucase », a commenté le président azerbaïdjanais. « Aujourd’hui, nous pouvons dire que la paix a été obtenue », a déclaré le Premier ministre arménien lors d’une conférence de presse.
L’accord conclu vendredi prévoit la création d’une zone de transit passant par l’Arménie et reliant l’Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan plus à l’ouest. Cette zone de transit, qui répond à une revendication de longue date de Bakou, sera nommée « Voie Trump pour la paix et la prospérité internationale » (TRIPP, son acronyme en anglais).
Les Etats-Unis y disposeront de droits de développement, ce qui leur permet d’avancer leurs pions dans une région très stratégique et riche en hydrocarbures.
Un haut responsable américain a assuré que l’Arménie ne sortait pas perdante des tractations, car elle gagnait un étroit partenariat avec les Etats-Unis.
Karabakh
Le président américain, dont la fascination pour les régimes autoritaires est connue, a demandé à Ilham Aliev depuis combien de temps il était au pouvoir. « 22 ans », a répondu le président azerbaïdjanais. « Cela veut dire qu’il est fort et intelligent », a commenté Donald Trump. M. Aliev a été élu en février 2024 pour un cinquième mandat, avec 90% des suffrages, et après un scrutin sans véritable opposition selon les observateurs internationaux.
La question toujours très sensible du Karabakh n’a guère été évoquée vendredi à la Maison Blanche. Cette région contestée est reconnue internationalement comme faisant partie de l’Azerbaïdjan mais a été contrôlée pendant trois décennies par des séparatistes arméniens. Bakou a repris partiellement l’enclave lors d’une nouvelle guerre à l’automne 2020, puis entièrement lors d’une offensive éclair en septembre 2023.
Bakou et Erevan s’étaient mis d’accord en mars sur le texte d’un traité de paix. Mais l’Azerbaïdjan, victorieux, exige que l’Arménie modifie sa Constitution pour renoncer officiellement à toute revendication territoriale sur le Karabakh. Nikol Pachinian s’est déclaré prêt à s’y conformer, annonçant son intention d’organiser un référendum constitutionnel en 2027. Mais le traumatisme de la perte du Karabakh, appelé Artsakh en arménien, continue de diviser son pays.