Les 30 personnes toujours portées disparues après l’explosion de train au Québec ne referont plus surface. Le dernier bilan fait état de 50 morts et les drapeaux sont en berne tandis que la compagnie ferroviaire reconnaît sa responsabilité.
La catastrophe de Lac-Mégantic, au Québec, qui a « vraisemblablement » fait 50 morts, est due à une mauvaise manoeuvre du conducteur de la compagnie ferroviaire américaine propriétaire du « train-fantôme », a affirmé mercredi le PDG de la société incriminée, au lendemain de l’ouverture d’une enquête criminelle sur l’explosion de train pétrolier survenue samedi.
La police a confirmé mercredi soir les craintes sur le sort des personnes disparues avec un bilan qui s’établit désormais à 50 victimes: 20 corps ont été retrouvés et les enquêteurs cherchent encore les dépouilles de 30 autres. « Nous avons rencontré les familles de ces 50 personnes vraisemblablement décédées », a déclaré un inspecteur alors que le précédent bilan officiel faisait état de 15 morts et 45 disparus.
Par ailleurs, le président de la compagnie ferroviaire possédant le train qui a explosé s’est finalement rendu dans la bourgade québécoise, cinq jours après la catastrophe, qui constitue le pire accident au Canada depuis 15 ans. Les autorités, qui l’ont entendu dans le cadre de l’enquête criminelle, lui ont toutefois refusé l’accès centre-ville dévasté et c’est sous la pression des habitants qu’il a tenu une conférence de presse attendue.
« Les freins manuels (mécaniques) n’ont pas été appliqués de façon adéquate sur ce train et il était de la responsabilité de l’employé de le faire », a-t-il reconnu au cours de cette intervention, après avoir rejeté toute responsabilité ces derniers jours. Avant d’exploser dans la nuit de vendredi à samedi en arrivant dans la rue principale de ce village touristique, le convoi de 72 wagons-citernes, transportant chacun 100 tonnes de pétrole brut, avait été arrêté à une dizaine de kilomètres au nord-ouest le temps que les conducteurs se relaient.
Or, a reconnu Edward Burkhardt, il n’est pas sûr que le conducteur avait bien actionné l’ensemble des freins manuels avant que le train ne dévale tout seul la pente vers Lac-Mégantic. « Il nous a dit qu’il l’avait fait », a dit le PDG, mais « notre sentiment est que ce n’est pas vrai ». « Dans les faits, je pense qu’ils ne l’était pas parce que sinon nous n’aurions pas eu d’incident », a-t-il admis.
L’employé en question a été suspendu sans solde et pourrait être formellement accusé, a indiqué le patron. Alors que le débat enfle au Canada sur l’augmentation exponentielle des « trains de pétrole » ces dernières années, Edward Burkhardt a affirmé que son entreprise, présentée par les médias locaux comme une société « low-cost », respectait la réglementation. « Est-ce que les règles de l’industrie étaient adéquates? Je ne pense pas », a-t-il lancé.
Pressé de questions sur les actions que compte prendre la société pour venir en aide à la petite municipalité, il est resté vague, assurant vouloir « entamer un dialogue » pour connaître les besoins de la population, tout en prenant garde de s’avancer sur les sommes que The Montreal, Maine & Atlantic Railway, la MMA propriétaire du train à l’origine de la catastrophe, pourrait débourser.
Venue assister à son discours, Alyssia Bolduc, étudiante qui a perdu un cousin dans la tragédie, peinait à trouver ses mots pour décrire « la colère » qu’elle ressentait à l’égard du responsable. « Cet homme s’intéresse juste à son argent », a-t-elle commenté, émue.
Plus virulent, un homme d’une quarantaine d’années s’époumonait de rage devant les policiers qui barraient l’accès à la conférence de presse: « Assassin, pourquoi t’as peur de nous… On n’a pas d’armes, on n’est pas des Américains, on est civilisés ».
De son côté, la Première ministre québécoise Pauline Marois a annoncé que le drapeau de la province francophone sera en berne sur tous les édifices publics de la province à compter de jeudi, ce pour une semaine. Le drapeau canadien sera également abaissé pendant cette période à travers le pays, a indiqué Ottawa.
Le gouvernement québécois a par ailleurs débloqué une aide immédiate de 60 millions de dollars canadiens pour la petite municipalité touristique de 6000 habitants.
« Jamais un tel événement n’aurait dû se produire », a martelé Pauline Marois, dirigeante indépendantiste, notant que « les questions sont nombreuses et toutes les réponses devront nous être données ».