L’Office européen de lutte contre la fraude (Olaf) vient de publier son rapport financier (PIF), qui offre un aperçu chiffré des politiques de lutte contre la fraude (et les irrégularités parfois coûteuses) dans l’ensemble de l’UE, mais aussi en fonction de l’Etat membre. La Belgique s’y distingue en matière de lutte contre les cigarettes de contrebande.
Pilier de la lutte contre la fraude au sein de l’Union européenne, l’Office européen de lutte antifraude (Olaf) vient de publier son 36e rapport annuel sur la protection des intérêts financiers de l’UE (le «PIF», à ne pas confondre avec le rapport annuel). Truffé de statistiques et de sigles se référant aux ressources étatiques touchées par les fraudes et/ou irrégularités en lien avec l’UE (droits de douane, TVA, contrefaçons, etc.), ce document (et ses nombreuses annexes) permet de saisir l’impact des politiques menées en la matière.
Cas de fraudes en hausse
Verdict pour l’année 2024? «Bien que le nombre total d’irrégularités signalées par les autorités compétentes de l’UE et des Etats membres –13.589 au total– ait légèrement diminué en 2024 par rapport à 2023, le nombre de cas de fraude signalés a, lui, augmenté pour atteindre 1.364, soit une hausse de 26% par rapport à 2023», peut-on lire. Une augmentation qui «pourrait résulter des recommandations répétées de la Commission adressées aux Etats membres ces dernières années, les incitant à mieux déclarer les fraudes détectées.»
La Belgique, au milieu de tout cela, se distingue particulièrement en matière de lutte contre le trafic de cigarettes. Parmi les onze Etats membres ayant signalé la soixantaine de cas de contrebande pour un préjudice total estimé de près de 32 millions d’euros en taxes, la Belgique se montre particulièrement efficace: cinq cas signalés pour un montant estimé de 25 millions d’euros à elle seule.
Plus globalement, la Belgique a signalé 31 cas de fraude en lien avec les intérêts financiers de l’UE, pour un total de 28,4 millions d’euros. C’est plus du double par rapport à 2023 (11,5 millions)… et près de la moitié moins qu’en 2022 (53,8 millions). A noter que, si l’on y ajoute les cas d’irrégularités non frauduleuses (plus nombreux), cela porte le total à 49,2 millions d’euros.
Au niveau de l’Union, comme l’avait déjà présenté le rapport annuel à la mi-juin dernier, l’an passé, l’Olaf a clôturé 246 enquêtes, en a ouvert 230 et recommandé aux Etats membres le recouvrement de quelque 871,5 millions d’euros, empêchant au passage que 43,5 millions d’euros soient dépensés indûment.
Storytelling: comment l’Olaf habille sa com’
Les chiffres, les enquêtes, les procédures, c’est important mais ce n’est pas forcément ce qui amène le citoyen européen à se pencher sur une organisation telle que l’Olaf. Qui, en plus de ses rapports (lire ci-dessus), multiplie les «snapshots» (instantanés) pour faire parler de ses enquêtes, même de celles qui fâchent au sein des institutions européennes.
Exemple récent avec la publication, élégamment illustrée façon roman graphique, de quatre résumés d’enquêtes ayant touché les affaires internes de l’Union, du renvoi d’ascenseur présumé à des soupçons de corruption en passant par les atteintes à la réputation de l’UE…
Parmi ces faits loin d’être anecdotiques, on notera ces quelque «120.000 euros de paiements indus d’indemnités et de salaires versés à deux employés d’un organisme de l’UE», l’enquête établissant que le directeur a «approuvé les indemnités», ainsi que le fait que «les membres du personnel les ayant acceptées savaient que ces paiements enfreignaient les règles», souligne l’Olaf.
Autre affaire, tout aussi fâcheuse, concernant des irrégularités et un manquement à l’éthique de la part d’un haut fonctionnaire d’une institution de l’UE. «La personne en question était soupçonnée d’avoir effectué des voyages professionnels dans des pays non membres de l’UE, dont une partie des frais était prise en charge par ces pays ou par des entités qui leur étaient liées. L’enquête s’est également penchée sur une éventuelle divulgation d’informations sensibles et/ou confidentielles à des pays tiers ou à des entités extérieures», révèle l’Olaf, sans toutefois divulguer le nom de l’institution en question ou la personne mise en cause.
Bilan de l’investigation: «Il a été confirmé que la personne n’avait pas déclaré ses vols, son hébergement, les cadeaux reçus, ni les avantages offerts à son conjoint lors de plusieurs déplacements professionnels», «qu’un opérateur économique d’un pays tiers avait offert au haut fonctionnaire et à sa famille des billets d’avion et des nuitées à l’hôtel gratuits», et «que ce haut fonctionnaire avait manqué à son devoir de professionnalisme, de loyauté et de confidentialité en partageant indûment certains documents internes et sensibles avec une entité d’un pays tiers qui n’était pas le destinataire prévu.»