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Daniel Ek, l’entrepreneur « normal » (portrait)

Le patron de Spotify, qui vient de soutenir le controversé podcasteur Joe Rogan, est un homme qui préfère avancer. Vite, bien et avec retour sur investissements.

Spotify n’a pas de contrôle éditorial sur les productions qu’elle diffuse, tel est en substance le message passé la semaine dernière par le site de streaming musical. Il fait suite à la polémique provoquée par le podcast The Joe Rogan Experience, accusé de formuler de fausses informations sur les vaccins et de pousser à l’utilisation de l’ivermectine, un traitement non autorisé contre le coronavirus. Outrés par ces propos diffusés dans « l’émission la plus écoutée au monde » (onze millions d’abonnés par épisode), plusieurs artistes – Neil Young, Bruce Springsteen, Joni Mitchell… – ont demandé à ce que leur musique soit retirée de la plateforme. L’accord d’exclusivité conclu avec Joe Rogan, lui, n’a pas été modifié, seuls quelques épisodes ont été supprimés, et les employés de Spotify ont eu droit aux explications de leur patron: « Il y a beaucoup de choses que Joe Rogan dit et avec lesquelles je ne suis pas du tout d’accord et que je trouve très offensantes [mais] si nous voulons […] réaliser nos audacieuses ambitions, cela signifiera avoir du contenu […] auquel nombre d’entre nous ne serons peut-être pas fiers d’être associés. »

Daniel Ek (38 ans), cofondateur et CEO de Spotify, est originaire de Rågsved, une banlieue ouvrière de Stockholm. L’homme se définit comme introverti et assure mener une vie « classique » qu’il débute chaque jour à 6 h 30 pour s’offrir une promenade et passer du temps avec sa femme et ses filles. Un Monsieur Tout-le-Monde, en somme. A quelques exceptions près. Daniel Ek est tout de même devenu millionnaire à 23 ans. A cet âge-là, il avait déjà dirigé la maison d’enchères Tradera, le site de jeu vidéo de mode Stardoll, celui de téléchargement µTorrent et l’agence de publicité Advertigo, qu’il a revendue un million d’euros.

Surnommé « Spice » pour sa propension à épicer ses histoires afin de les rendre plus croustillantes, Ek (chêne en suédois) est le petit-fils d’une chanteuse d’opéra et d’un pianiste de jazz. Un amour pour la musique dont il dit avoir hérité, même si c’est en informatique qu’il se fera surtout remarquer en vendant, dès sa prime adolescence, ses premiers sites Web.

En 2006, riche mais limite dépressif, le Suédois se rappelle à son passé un peu pirate: il développe, avec Martin Lorentzon, dans son appartement, Spotify. La plateforme profite des ennuis judiciaires de ThePirateBay (un autre site suédois de partage peer-to-peer), du manque d’ergonomie du rival Deezer et sans doute d’une certaine oisiveté d’Apple Music pour décoller et rassembler aujourd’hui plus de trois cents millions d’utilisateurs actifs. Le trentenaire dit agir par passion, comme lorsqu’il annonce préparer, au printemps 2021, une offre de rachat du club de foot anglais d’Arsenal, son club préféré, soutenu par trois de ses anciennes gloires: Thierry Henry, Patrick Vieira et Dennis Bergkamp. Dans le même temps, des centaines de musiciens se rassemblent sous la bannière « Justice at Spotify » pour réclamer un meilleur système de rémunération du streaming.

Figure du mythique top 100 des personnalités les plus influentes de la planète du Times en 2018, Ek estime que les musiciens « ne peuvent plus se contenter de sortir des disques tous les trois ou quatre ans ». D’où, peut-être, son investissement massif dans l’industrie des podcasts, où les revenus publicitaires ont rapporté 842 millions de dollars en 2020. Un vrai Monsieur Tout-le-Monde.

Dates clés

  • 1983: Naissance à Stockholm.
  • 1988: A 5 ans, il reçoit sa première guitare et son premier ordinateur, un Commodore.
  • 2008: Spotify est mis en ligne.
  • 2018: Introduction en Bourse de Spotify à New York, sans faire retentir la célèbre cloche de Wall Street.

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