Marco Rubio ne fait pas partie du cercle rapproché de Donald Trump et les deux hommes se sont affrontés par le passé en des termes amers et vulgaires. Mais près d’une décennie plus tard, le président américain lui a confié le rare privilège d’occuper les deux principaux postes de politique étrangère des Etats-Unis.
Donald Trump a chargé son secrétaire d’Etat d’assurer par intérim le rôle de conseiller à la sécurité nationale, après avoir écarté jeudi Mike Waltz, fragilisé par l’affaire des plans militaires partagés par mégarde, et désormais pressenti comme ambassadeur des Etats-Unis auprès de l’ONU.
Cela place celui que Donald Trump qualifiait naguère de « petit Marco » à la tête de l’ensemble de l’appareil diplomatique des Etats-Unis, y compris l’ancienne agence pour le développement international, avec une claire volonté disruptive. Il faut remonter au légendaire Henry Kissinger, dans les années 70, sous Richard Nixon, pour retrouver pareille double casquette.
De là à ce que l’ancien sénateur républicain, adoubé de la réputation d’être un faucon en politique étrangère, puisse acquérir autant d’influence que Kissinger, il y a monde. D’autant que le président américain a confié certaines des missions les plus délicates – de la Russie à Gaza en passant par l’Iran – à son partenaire de golf et ami d’affaires de longue date, Steve Witkoff.
Mais le chef de la diplomatie américaine semble avoir trouvé une formule politiquement gagnante, en faisant sien le programme de l' »Amérique d’abord » de Donald Trump, notamment ce qui concerne la politique migratoire, quitte même à en rajouter une couche.
Pas d’états d’âme
« Je ne m’en excuse pas. Le président a été élu pour assurer la sécurité de l’Amérique et se débarrasser d’une bande de pervers, de pédophiles et de violeurs d’enfants dans notre pays et c’est ce que nous faisons », a-t-il déclaré mercredi en défendant les expulsions d’immigrés illégaux vers des pays tiers lors d’une réunion du gouvernement américain.
Tout un symbole, le chef de la diplomatie américaine, qui est lui-même d’origine cubaine et le premier secrétaire d’Etat a parler couramment espagnol, a effectué son premier déplacement à l’étranger en Amérique centrale, dont au Salvador pour y rencontrer le président allié Nayib Bukele, qui détient des migrants expulsés des Etats-Unis dans une prison de haute sécurité. Il affiche aussi fièrement le fait d’expulser des étudiants étrangers qui ont manifesté contre Israël. « Chaque fois que je trouve un de ces fous, je lui retire son visa », a-t-il affirmé récemment.
Né à Miami, fils d’immigrés cubains, Marco Rubio est un ancien sénateur républicain de Floride de 53 ans, ultra-conservateur. Fait rare, sa nomination au poste de secrétaire d’Etat a été approuvée à l’unanimité du Sénat américain. De par son histoire familiale, il s’est élevé contre le gouvernement communiste de La Havane ou contre d’autres pays latino-américains marqués à gauche, comme le Venezuela. Il est partisan d’une ligne dure, surtout à l’égard de la Chine.
Parlant des efforts de paix dans la guerre en Ukraine, il a affiché jeudi soir sur Fox News son impatience et dit que l’Amérique avait peut-être d’autres chats à fouetter, soulignant que « ce qui se passe avec la Chine est plus important à long terme pour l’avenir du monde ». Dans une scène qui a suscité de nombreuses parodies, M. Rubio a semblé s’enfoncer silencieusement dans le canapé de la Maison Blanche pendant que M. Trump et le vice-président JD Vance réprimandaient le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors d’une réunion spectaculaire le 28 février.
Fervent catholique
Les interlocuteurs étrangers le considèrent encore largement comme la personne la plus « normale » dans l’orbite de Trump. « Nous avons le sentiment qu’il est une personne qui est encore +normale+ et qui écoutera au moins nos préoccupations et en tiendra compte », confie ainsi un diplomate d’un pays allié sous le couvert d’anonymat.
M. Rubio a en tout cas pris soin de ne pas critiquer publiquement l’administration Trump, tout en exprimant parfois son désaccord, comme lors d’une réunion à huis clos à la Maison Blanche où il s’en est pris à Elon Musk, le milliardaire qui a imposé des coupes claires dans le gouvernement.
Père de quatre filles et garçons, il évoque régulièrement ses origines sociales modestes, avec un père serveur dans un bar et une mère caissière. Il est fervent catholique n’hésitant pas à se montrer à la télévision avec une croix bien visible sur le front le mercredi des Cendres.