Succession
Au premier semestre 2025, 26.112 Belges ont déjà renoncé à une succession gratuitement. © Getty Images

«La Belgique a connu deux crises»: pourquoi de plus en plus d’héritiers refusent une succession

Au cours des cinq dernières années, le nombre de renonciations de succession a augmenté. Une hausse évocatrice des événements qu’a traversés la Belgique, entre crise sanitaire et économique.

En 2024, 58.459 Belges ont renoncé gratuitement à une succession. Soit une augmentation de plus de 12.000 renonciations par rapport à 2020 (46.217). Au premier semestre 2025, 26.112 Belges ont renoncé à une succession gratuite, «alors même que le nombre de décès n’a pas augmenté par rapport à il y a trois ou quatre ans (NDLR: durant et après la pandémie)», commente Sylvain Bavier, notaire et porte-parole de la Fédération des notaires.

A cette augmentation au cours des dernières années, deux explications. La première est une modification de la loi. Avant 2018, seuls les greffes de tribunaux étaient compétents, «moyennant un droit de greffe qui variait en fonction du nombre de renonciations», indique le Louviérois. Après 2018, pour désengorger les tribunaux, la compétence a été confiée exclusivement aux notaires. Grâce à des campagnes de communication, le grand public a été, chaque année, plus nombreux à connaître la possibilité de renoncer gratuitement à la succession via un notaire.

Seconde raison: les crises successives. «La Belgique a connu deux crises. La première, sanitaire, a entraîné une augmentation du nombre de décès. La seconde est économique, avec un phénomène de paupérisation d’une partie de la population. Les Belges n’avaient presque plus rien à léguer», expose le notaire.

Des dettes trop importantes aux refus de convenance

Les Belges peuvent renoncer gratuitement à une succession, à une condition: que les actifs nets ne dépassent pas 6.093,20 euros très exactement. Autrement dit, les actifs de succession tels que le solde des comptes bancaires du défunt, ses actions et obligations, son véhicule, ou encore ses biens immobiliers, ne doivent pas être beaucoup plus élevés que les passifs de succession (les dettes, y compris les prêts hypothécaires). Si l’actif dépasse ce plafond, la procédure de renonciation devient payante. «Il faut compter entre 400 et 500 euros, et cela augmente en fonction du nombre d’héritiers», complète Sylvain Blavier.

Comme le précise la plupart du temps le notaire, les successibles renoncent à un héritage en raison de dettes du défunt trop importantes. «Mais dans de très rares cas, je dirais environ 2% des dossiers, il s’agit de renonciations de convenance. Quand l’héritier ne souhaite pas recevoir l’argent d’un défunt avec qui il n’était pas en bons termes ou qu’il n’avait pas revu depuis longtemps», ajoute-t-il.

Pas de place pour les regrets

Lorsqu’une personne refuse une succession, celle-ci passe à la génération d’après, à savoir ses enfants. Si certains d’entre eux sont mineurs, le juge de paix devra obligatoirement donner son accord pour qu’un parent puisse renoncer à la succession à sa place. «S’il n’y a plus de génération après celle-ci, il faut alors se tourner vers les collatéraux, c’est-à-dire les frères et les sœurs, voire les cousins, énumère le porte-parole de Fednot. S’il n’y a plus personne, la succession devient vacante. On va alors nommer un curateur. Par la suite, c’est l’Etat qui héritera du bien.»

Une fois que la renonciation est inscrite dans le Registre central successoral, pas de retour en arrière possible. D’un côté, la bonne nouvelle, les créanciers du défunt ne pourront plus s’adresser à l’héritier pour le paiement de leurs créances. De l’autre, celui-ci «renonce à tous les biens de la succession. Il n’est donc pas possible de réclamer des objets personnels, par exemple des photos», avertit Sylvain Bavier. Il ne pourra en principe pas non plus exercer un droit sur des actifs intéressants dont il n’avait pas connaissance avant de signer l’acte de renonciation. La loi reconnaît une seule situation dans laquelle un héritier pourrait rétracter sa renonciation: la rétractation doit être faite avant l’expiration du terme de la prescription, à savoir 30 ans, et un autre successible ne doit pas avoir accepté la succession avant lui.

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