20% addition restaurant
Pour les restaurateurs, être présent sur des plateformes en ligne comme TheFork est presque devenu indispensable. © Getty Images

Voici comment économiser 20% sur son addition au restaurant

Pour faire face à la crise de l’Horeca, les restaurateurs font du rabais. De leur propre chef ou fortement incités par les plateformes en ligne, des établissements proposent des réductions de 20 à parfois 50%. Ils espèrent de la sorte attirer de nouveaux clients, mais à toute médaille son revers.

Entre la pandémie et la guerre en Ukraine, difficile d’être restaurateur. A l’augmentation des prix de l’énergie et des matières premières s’ajoute une désertion généralisée des clients. Une étude de Comeos mettait en avant une baisse de 10% de la fréquentation des établissements Horeca, entre 2019 et 2023. Si la même année, le bureau d’études Sirius Insight notait un regain d’intérêt des Belges pour les sorties au restaurant, celui-ci s’est surtout fait sentir du côté des snacks et autres fast-foods, plus rapides et aussi moins chers. Dans les chiffres, cela s’est traduit par la faillite de pas moins de 1.950 PME du secteur de la restauration et de l’hébergement, en 2024, note le SPF Economie. 4.947 emplois ont, en outre, été supprimés. Le secteur «représente environ 17% des PME défaillantes et des pertes d’emplois», cette année-là, indique l’administration fédérale.

Pour faire face à cette crise, certains restaurateurs tentent le tout pour le tout pour attirer le chaland. A l’image du Zinneke, un restaurant schaerbeekois qui, sur son site, propose des promotions. Les clients qui réservent une table entre le mercredi et le dimanche, et partent avant 20h20 très précisément, bénéficient d’une ristourne de 25% sur leur addition, hors boisson.

Ces promotions n’étonnent pas Emmanuel Didion, président f.f. de la Fédération Horeca Wallonie. Inciter les clients à venir tôt et repartir tôt contre une réduction est fortement lié à une nécessité pour les restaurateurs de proposer des doubles services. Le soir, les premiers clients doivent partir avant une certaine heure, tandis que les plus tardifs ne pourront arriver qu’à partir d’une autre. «Cela permet de sécuriser une rotation et de ne plus avoir à refuser de tables. Deux services, ce sont potentiellement deux fois plus de clients et deux fois plus de plats vendus», commente-t-il. Ce principe est loin d’être nouveau, mais il est presque devenu légion après la pandémie.

Les plateformes, foires à la promo

L’établissement bruxellois n’est pas le seul à afficher des réductions, mais la plupart de ses concurrents passent par des plateformes comme TheFork, à l’instar du Mucha, à Woluwe-Saint-Pierre, qui propose constamment -20% de réduction sur l’addition, durant le service de midi. Uniquement sur les plats, les boissons étant exclues de la promotion. L’établissement ne se situant pas «dans un lieu de passage», ces réductions sont un moyen pour le restaurateur d’attirer une clientèle différente de ses habitués. Si cet objectif n’est pas véritablement atteint, admet le chef de salle, il a constaté des changements d’habitudes parmi ses clients: «Souvent, parce qu’ils paient moins cher pour leurs plats, ils compensent et se permettent notamment de commander une bouteille de vin».

Du côté de la Brasserie Beaulieu, à Wavre, ces ristournes visent à relancer l’activité, «surtout le soir», et à attirer une nouvelle clientèle. «Notre restaurant est essentiellement fréquenté par les golfeurs du château de la Bawette, et certains autres clients potentiels peuvent penser qu’ils ne peuvent pas venir y manger. Le fait que la brasserie n’est pas visible depuis la rue n’arrange rien», commente l’un des responsables de l’établissement, qui cherche une plus grande visibilité grâce aux plateformes.

Mais une telle manœuvre est-elle rentable? Le chiffre d’affaires de la brasserie wavrienne «balance», car le restaurant «vend presque à prix coûtant», mais aussi parce que TheFork prend au passage une petite commission sur chaque réservation passée sur sa plateforme. Une baisse de la plus-value qui est toutefois compensée par les habitudes des clients qui, comme à la capitale, ont tendance à commander plus que s’ils payaient au prix plein. «Ils ont tendance à prendre trois services, entrée-plat-dessert, plus de boissons, ou une bouteille de vin», ajoute le responsable.

Les revers de la visibilité

Ces «soldes sur l’assiette» sont, la plupart du temps, disponibles uniquement via des plateformes en ligne, TheFork en tête. Anciennement connu sous le nom de LaFourchette, le site français a été racheté par TripAdvisor en 2014, et est devenu, sinon la première, l’une des plus grandes plateformes gastronomiques de réservation en ligne au monde. Pour les restaurateurs, être présent sur ces plateformes en ligne est presque devenu indispensable.

Mais ce service a un coût. TheFork, par exemple, propose trois types d’abonnements: «visibility», «performance» et «entreprise». Les tarifs ne sont pas clairement affichés sur le site. Pour en prendre connaissance, il faut s’inscrire en tant que restaurateur et croiser les doigts pour que la demande soit acceptée. Selon le média suisse Le Temps, cependant, le prix de ces abonnements varie de 29 à 159 francs, soit près de 30 à 170 euros par mois. A cela s’ajoute une «commission calculée sur un pourcentage du ticket moyen par client apporté». Il faut alors compter entre trois et quatre euros, environ.

C’est aussi sans compter le Fork Festival qui, plusieurs fois par an, et durant six semaines, permet aux restaurateurs de proposer des plats ou des menus à -50%. Ceux-ci sont incités, mais pas obligés –la visibilité accrue restant tout de même un argument de poids–, de participer à l’événement, tandis que le reste du temps, ils sont libres d’afficher des tarifs réduits de 20, 25 ou 30%. Si ce système fait le bonheur des uns, les autres regrettent des périodes de promotion trop nombreuses. Pour le restaurateur, ces réductions sont de belles vitrines, mais elles ne permettent parfois pas de compenser totalement le prix couvert.

«On ne vend pas à perte, c’est interdit, mais la marge bénéficiaire est extrêmement réduite», regrette le restaurateur brabançon. Réduction, commission et abonnement compris, la présence sur la plateforme coûte à un restaurateur suisse interrogé par nos confrères entre 800 et 1.000 francs par mois (850 à 1.070 euros). «Il faut faire avec, estime-t-il. Parce qu’on sait dans certains cas que sans rabais, on aurait eu moins de monde, mais c’est un peu une forme d’emprise

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