Sans un toit en ordre, la vente d’un bien immobilier reste compliquée. © BELGA/BELPRESS

Ces aménagements et travaux qui ne donnent pas de vraie plus-value à votre logement: «Dans l’immobilier, un et un ne font pas toujours deux»

Récupérer sa mise lors de la revente d’une maison ou d’un appartement n’est pas toujours si simple. Surtout si les choix posés en matière de rénovation ou d’aménagement ne réalisent qu’une faible plus-value. Salle de bain et cuisine restent cruciales, mais l’isolation et l’entretien global gardent la priorité.

La salle de bain semble sortie d’un magazine de décoration. Elle donne envie d’y passer des heures et a coûté une fortune. Les photos de l’agence immobilière ont parfaitement mis en valeur l’endroit. Lors de l’expertise, les vendeurs ont pourtant déchanté en réalisant qu’une fraction seulement du coût de la rénovation de cette pièce a été valorisée. La plus-value réalisée reste largement inférieure au coût des travaux.

Des cas comme ceux-là, les agents immobiliers en rencontrent autant dans une carrière qu’il n’y a de briques sur une façade. Le prix d’un bien dépend toujours d’une série de critères immuables, qu’une jolie robinetterie ne suffira pas à faire grimper au-delà d’une certaine logique. «Une maison qui ne permet pas de se projeter, un quartier qui attire peu, des problèmes de conformité divers, des travaux commencés partout mais terminés nulle part: vous aurez beau avoir la plus jolie salle de bain du monde, une maison reste toujours un tout. Personne n’achète un bien pour une seule pièce», analyse Caroline Lejeune, présidente de Federia, la fédération des agents immobiliers francophones.

Pas une simple addition du montant des travaux

Entre biens plus modestes et maisons d’exception, cette gérante d’une agence immobilière en province de Liège a tout vu passer. Et les vendeurs qui énumèrent les travaux entrepris, espérant simplement récupérer leur mise, elle connaît. «Pour fixer le prix d’une maison ou d’un appartement, nous nous basons toujours sur la valeur intrinsèque de ce qu’on y trouve, dans sa globalité. Ce n’est pas parce qu’on met 15.000 euros dans une superbe cuisine que le prix du bien va grimper d’autant. En immobilier, un et un ne font pas toujours deux, voire jamais. La valeur d’une maison n’est pas la simple addition des sommes qu’on y a engagées.»

Parmi les pièces-clés, la salle de bain et la cuisine restent évidemment cruciales. Elles présentent l’avantage de montrer rapidement si le bien est un peu dans son jus ou correctement entretenu. En cas de rénovation, l’idée est de rester dans une juste mesure, en fonction du style de bien, du quartier, de ce que peut valoir réellement une maison ou un appartement de ce standing, à cet endroit-là.

«Il faut rénover intelligemment, martèle Caroline Lejeune. Aujourd’hui, le premier réflexe doit concerner l’isolation et l’énergie, tout ce qui touche au certificat PEB (NDLR: performance énergétique du bâtiment). Un bien classé en dessous de la norme « D », cela devient directement beaucoup plus difficile à vendre. A côté de cela, pour trouver un acquéreur rapidement, il faut que le bien soit propre, rangé, bien entretenu. Il y a toutes sortes d’acheteurs différents sur le marché, mais il faut pouvoir plaire à M. et Mme Tout-le-monde.»

Gare à l’ultrapersonnalisation

C’est d’ailleurs de là que découlent les «pires» investissements ou aménagements possibles dans un bien immobilier selon l’experte: ceux qui dépendent trop des goûts personnels. «Des éclairages superbement intégrés un peu partout mais d’une couleur peu commune, une salle de sport ultra équipée qui fait perdre une chambre, une décoration prononcée en fonction d’une passion… Les agents immobiliers ont déjà tout vu. Un bien dans lequel personne d’autre que vous ne peut se projeter, c’est un bien qui ne se vendra pas et sûrement pas au prix espéré

Si l’idée est de revendre rapidement, il s’agit donc d’optimiser et de rationaliser les coûts, tout en cherchant à être dans l’air du temps, avec des goûts simples et des choix neutres. «Il y a aussi un virage qui s’opère actuellement, avec de jeunes acheteurs, qui ont baigné dans ces images de rêve sur les réseaux sociaux, etc. Ils cherchent du beau, aménagé harmonieusement, qui doit leur plaire en un coup d’œil. La valeur sur le marché commence à être fortement influencée par ce critère esthétique, pour ces clients-là, même si parfois la qualité pêche un peu», constate la présidente de Federia.

Les choix somptuaires

Ce critère visuel ne doit malgré tout pas devenir une obsession et engendrer la folie des grandeurs. «Pour viser ce coup de cœur en un coup d’œil, j’ai déjà vu des personnes investir des sommes folles dans des extérieurs, pour planter à tout-va. Si l’on est purement dans une logique de rentabilité, personne ne parviendra à récupérer des dizaines de milliers d’euros sur ce poste. Bien sûr, cela augmente la valeur du bien, et cela va attirer des clients. Mais combien les acheteurs voudront-ils débourser en plus pour ce jardin magnifique, face à un autre plus simple et pratique dans un bien similaire? Entre 5.000 et 10.000 euros, peut-être.»

Dans le même ordre d’idée, la piscine représente l’investissement compliqué par nature. Dans un quartier prisé, plus huppé, si le tout est propre et bien entretenu, cela a du sens et attire directement une certaine clientèle. Ce qui ne sera pas forcément le cas ailleurs, surtout s’il a fallu sacrifier toute la pelouse pour pouvoir piquer une tête.

Dans une étude de 2022, en France, la plateforme d’estimation en ligne Meilleurs Agents détaillait que la présence d’une piscine faisait augmenter en moyenne de 16,1% le prix d’un bien. En Belgique, le site Immoweb a réalisé ses propres estimations, avec un impact plus limité en Wallonie, de l’ordre de 9,4 % en moyenne. Il faut donc déjà une maison d’une certaine valeur pour amortir une piscine enterrée à plusieurs dizaines de milliers d’euros.

Aménagements peu utiles et pertes

Cet équilibre à trouver se joue aussi sur d’autres postes. La domotique dans une deux façades peu chère ne sera pas tant valorisée que ça. Les pièces trop typées, comme un sauna qui fait perdre une chambre ou un cinéma aménagé dans une pièce, doivent rester l’apanage des maisons d’exception. Tout comme les garages surdimensionnés, qui, au-delà de deux places pour des voitures, ne vont plus pouvoir être correctement valorisés par rapport aux mètres carrés qu’ils occupent.

A proscrire également, les travaux qui détériorent le charme de l’ancien. «Dans une maison de caractère, il faut mettre en valeur et garder ce qui fait son cachet. La mode a parfois fait disparaître de sublimes parquets sous d’autres matériaux», regrette Caroline Lejeune.

Retrouver de l’espace

A l’inverse, les aménagements à fort potentiel se trouvent dans ceux ajoutant des pièces ou de l’espace. Une chambre dans les combles, une cuisine fermée qui s’ouvre ou une salle d’eau plus grande en supprimant une toilette attenante, pour autant qu’il y en ait toujours au moins une séparée, amèneront plus facilement une plus-value.

Enfin, il reste des travaux immanquables, sans lesquels les biens restent parfois longtemps sur le marché. «La toiture fait peur et, oui, c’est coûteux. Mais la vente est très compliquée si elle n’est pas en ordre. Depuis la crise des prix de l’énergie, le label PEB est également vital. Et il faut avoir le coup d’œil, pour agencer son bien et le présenter sous son meilleur jour. Aujourd’hui, il nous arrive de retravailler des photos, de les retoucher avec l’intelligence artificielle, en changeant par exemple la couleur des murs, afin d’aider les acheteurs à se projeter. Des biens impossibles à vendre partent parfois rapidement grâce à ça.»

L’immobilier reste un placement, dans lequel il n’y a pas de miracle non plus. En cas de vente après quelques années, il faut bien constater qu’il y a des postes de dépenses qu’un propriétaire pourra amortir, mais qu’il ne récupérera pas. A commencer par tous les frais annexes au prix du bien, comme les droits d’enregistrement ou l’acte chez le notaire. «L’idéal reste de profiter soi-même de ce qu’on aménage, en l’amortissant avec son usage personnel. Beaucoup de travaux sont parfois mal valorisés à la revente. Mais on ne leur attribuera pas la même valeur lorsqu’il s’agit d’améliorer son propre confort», conclut l’agente immobilière.

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