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Le SNI va demander un plan de sauvetage du commerce indépendant à l’Arizona (info Le Vif)

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

Face aux difficultés financières croissantes rencontrées par les commerces en centres-villes, le Syndicat neutre pour indépendants (SNI) va formuler un plan de sauvetage à l’intention du gouvernement fédéral. «Sans action rapide, le déclin en cours risque de s’aggraver».

Confrontés à la globalisation de l’e-commerce, les magasins physiques et le commerce indépendant souffrent toujours plus. Ceux situés en centres-villes n’échappent pas à la règle. En Wallonie, si chaque ville tente de se démarquer à sa manière, le constat est souvent le même: l’activité commerciale y décroît de façon édifiante. Et les différents chocs économiques encaissés ces dernières années –prix de l’énergie et des matières premières, inflation– n’ont fait qu’aggraver la tendance pour les petites et moyennes entreprises.

Commerce indépendant: fléchissement à partir de 2022, aggravation en 2025

Chiffres à l’appui. Depuis 2022, le nombre de cessations de commerces en Belgique dépasse celui des créations. Sur les six premiers mois de 2025, le taux d’ouvertures a chuté de 17%, alerte le SNI. «3.692 commerces indépendants ont été créés durant la première partie de l’année, alors que 4.420 ont fermé, relève Christophe Wambersie, secrétaire général. A titre de comparaison, en 2021, plus de 6.000 commerces avaient été créés sur la même durée. A partir de 2022, «le fléchissement est clair, avec à peine 4.030 créations».

En Wallonie, la situation est encore moins réjouissante. Le taux de «cellules vides» dans les centres-villes oscille entre 17% et 25%. «La Wallonie enregistre environ le même nombre de faillites que la Flandre, qui, elle, compte le double de commerces», compare le SNI, qui pointe donc «une tendance bien plus inquiétante au sud du pays». Par ailleurs, «les commerçants flamands sont davantage propriétaires de leurs locaux, alors que les Wallons sont majoritairement locataires, ce qui pèse sur le chiffre d’affaires».

Un plan de sauvetage du commerce indépendant va être demandé au gouvernement

Face à ce «décrochage», le SNI «va demander un plan de sauvetage du commerce indépendant fin septembre» au gouvernement fédéral ainsi qu’aux Régions», annonce Christophe Wambersie. Il contient notamment la création de «zones franches» dans les centres-villes, «où l’objectif sera de dégrever les charges sur les commerces, et de booster leur attractivité».

Le déclin du commerce des centres-villes «engendre une série de conséquences sociétales, insiste le secrétaire général. Et aujourd’hui, il manque des mesures spécifiques pour endiguer le phénomène.» D’autant plus que la seule décision ciblée évoquée par l’Arizona, à savoir la libéralisation des jours d’ouverture, «n’est pas une bonne solution à nos yeux, et encore moins pour les plus petits commerçants».

Ainsi, le SNI insistera auprès du gouvernement pour redensifier les centres-villes («le consommateur ne veut pas faire son shopping dans une ville dans laquelle une vitrine sur deux est vide»), en «offrant un terrain de jeu attractif, où l’indépendant peut à nouveau envisager raisonnablement une ouverture». Pour atteindre cet objectif, le syndicat compte sur une convergence des pouvoirs communaux et provinciaux. «Si l’environnement commercial physique en Belgique n’est pas modifié, la poursuite du déclin est inévitable. Sans régulation, la loi du plus fort règnera», alerte-t-il encore.

Compétitivité

D’autant plus que le commerce belge perd toujours en compétitivité face à ses voisins: les coûts de l’énergie (plus élevés chez nous) et l’indexation automatique des salaires (malgré ses avantages) ne plaident pas en faveur des commerces indépendants.

«Pour les magasins physiques dans les centres-villes, il ne sera sans doute jamais possible de réellement concurrencer l’e-commerce, mais ils ne doivent pas perdre espoir pour autant», encourage Kim Fredericq Evangelista, chief economist chez Comeos, la fédération belge du commerce et des services. Les commerçants en ville peuvent davantage jouer sur les aspects conseils, commodité ou expérience client. Tout n’est pas rose, mais les acteurs physiques peuvent s’en sortir, à condition de se réinventer.»

La question des commerces en centres-villes «est cependant très délicate, concède l’expert de Comeos, et varie fortement d’un centre-ville à l’autre, et d’un type de commerce à l’autre.» 

Les plans (trop flous?) de l’Arizona

Si, dans l’accord de gouvernement, la protection des commerces en centres-villes ne fait donc pas l’objet de mesures précises, certaines pourraient toutefois contribuer à améliorer la situation, «comme les baisses de cotisations sociales ciblées sur les bas et moyens salaires». Cette mesure «peut avoir un effet positif sur la création d’emplois, même s’il faut accélérer le rythme, et transformer les déclarations d’intention en actes».

D’autres mesures, notamment concernant la flexibilité sur le marché du travail et la simplification administrative, «peuvent également déboucher sur des résultats positifs pour les commerçants».

Lutter contre les achats transfrontaliers

D’autre part, l’Arizona affiche aussi sa volonté de lutter contre les achats transfrontaliers; 50% des Belges résident en effet à moins de 50 kilomètres d’une frontière. «[Ces achats] ajoutent un problème supplémentaire pour les magasins de nos centres-villes.»

En ligne, la concurrence des acteurs chinois est particulièrement forte, ajoute le chief economist de Comeos. «Un énorme problème pour les magasins physiques en Belgique, s’inquiète-t-il, d’autant plus que les produits venus de Chine ne respectent pas les règles européennes ou sont simplement dangereux pour la santé du consommateur. On parle de millions de paquets qui arrivent chaque jour en Europe, dont une bonne partie par la Belgique. Un réveil politique sur le sujet est nécessaire», plaide-t-il.

Enfin, les petits commerçants font également face à l’efficacité croissante des grands groupes (logistique, coûts compressés). «Dans cette logique, c’est souvent le commerce moyen de gamme, à l’identité peu claire, qui souffre davantage.»

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