surchauffe
La priorité accordée à l’isolation des logements a longtemps éclipsé la problématique de la surchauffe estivale lors des vagues de chaleur. © Illustration générée par intelligence artificielle via ChatGPT (OpenAI), août 2025.

Avec ou sans gros travaux, voici comment limiter la surchauffe de son logement lors d’une canicule

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

Bien moins énergivores par temps froid, les logements bien isolés ont eux aussi tendance à surchauffer quand les températures grimpent. Avant d’envisager une climatisation, d’autres étapes aident à limiter le phénomène.

Largement axée sur la réduction des besoins en chaleur, l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments (PEB) a sous-estimé un problème dont le secteur de la construction parlait peu il y a encore 20 ans: la surchauffe des bâtiments lors des vagues de chaleur. De plus en plus fréquentes, comme l’attestent les données historiques de l’IRM, celles-ci peuvent générer un inconfort nuit et jour dans les habitations, voire s’avérer mortelles pour les personnes à la santé fragile. Les probabilités que la chaleur s’engouffre dans un logement augmentent à mesure que les journées chaudes se succèdent et que les températures nocturnes demeurent elles aussi élevées.

En France, la réglementation énergétique 2020 (RE2020), imposant une série de normes aux logements neufs depuis 2022, a suscité la polémique pour cette raison. Afin de limiter leur «impact carbone», les habitations dotées d’une climatisation mécanique doivent souvent compenser le surplus de consommation d’électricité qui en résulte par des efforts plus onéreux sur d’autres postes: une pompe à chaleur plus performante, un meilleur isolant, des protections solaires… Cela a conduit des promoteurs ou propriétaires à ne pas déclarer la présence bien réelle d’une climatisation, pour rentrer dans les seuils définis dans la RE2020.

«Tout est à repenser dans cette norme qui manque totalement de pragmatisme, critiquait récemment le professeur Damien Ernst (ULiège), dans une interview au média français conservateur Atlantico. Elle conduit à la création de logements trop chers, invivables en été, et je m’inquiète aussi de leur durabilité.» Il pointe par ailleurs l’aberration d’une telle pénalité pour les solutions de climatisation, celles-ci fonctionnant surtout lorsque la production photovoltaïque, largement décarbonée, est abondante.

Les châssis fixes, «une très mauvaise idée»

En Belgique, rien de tel à ce stade, si ce n’est que la priorité accordée à l’isolation des logements a longtemps éclipsé la problématique de la surchauffe estivale. Comment la limiter? «La première chose, c’est de faire en sorte que la température ne monte pas dans l’habitation, expose Xavier Loncour, valorisation manager chez Buildwise, le Centre d’innovation du secteur de la construction. Car une fois que c’est le cas, il sera effectivement plus difficile de rafraîchir un bâtiment bien isolé.» Certains choix de conception n’aident pas à enrayer le phénomène. «Dans les bâtiments modernes, il y a cette mode d’installer de grands châssis fixes, souvent orientés vers le sud; c’est une très mauvaise idée», souligne l’expert. D’une part, ces châssis exposés en plein soleil accentuent le réchauffement du logement. De l’autre, ils ne peuvent contribuer à la solution la plus simple, à savoir ouvrir grand les fenêtres pendant la nuit. «En Belgique, le nombre de nuits tropicales reste encore limité pour le moment», poursuit Xavier Loncour.

Il serait faux de conclure que l’isolation est une alliée de la surchauffe. Dans les maisons peu ou mal isolées, la chaleur s’engouffre d’autant plus vite à l’intérieur. Principalement par le toit, puis par les fenêtres, et enfin par les murs. «L’isolation de la toiture est certainement un must quand on aménage des chambres dans les combles, à défaut de quoi vous avez véritablement un radiateur au-dessus de votre tête», relate l’expert de Buildwise. A côté des bons comportements, comme l’aération nocturne, il convient de limiter au maximum l’exposition directe au soleil. Les locaux orientés vers l’ouest sont eux aussi sensibles, du fait des rayons rasants de la fin de journée. Sur les pans concernés, il faut accorder une priorité à l’ombrage sous différentes formes: pergolas, débordements de toiture et bien sûr, les arbres.

Protéger ses fenêtres

Ensuite, il faut agir au niveau des fenêtres, et plutôt par l’extérieur. Dans le secteur de la construction, le coefficient de transmission thermique (Uw), exprimé en watts par mètre carré-kelvin, indique la proportion de l’énergie solaire qui rentre à travers une fenêtre. «Sur 100 watts à l’extérieur, un double vitrage classique en laisse rentrer 75 à l’intérieur, résume Xavier Loncour. Avec un store intérieur, vous passez à 50. Avec une protection solaire extérieure, vous passez de 75 à onze watts.» Si l’idéal consiste à installer des volets automatiques, une telle solution coûte assez cher, concède Buildwise. Sur les logements déjà dotés de bon vieux volets en bois, particulièrement efficaces, le centre d’innovation préconise de les garder. Si ce n’est pas le cas, il existe aussi des stores extérieurs à ventouses, bien plus abordables que les modèles fixes.

Presque standards dans l’Europe du sud, les ventilateurs plafonniers ne refroidissent pas un logement, mais ont le mérite de faire baisser la température ressentie. A la différence des climatiseurs ambulants, «cela ne coûte quasiment rien et beaucoup de modèles ne font aucun bruit», suggère Xavier Loncour. Dans certains logements, il est toutefois vrai que cet arsenal de solution ne suffira pas à éviter la fournaise. «Quand vous avez un plancher en bois, et un ou deux Velux seulement dans la toiture, il n’est pas facile de rafraîchir la pièce. Dans certains cas, il n’y a rien de tabou à placer une petite puissance de refroidissement. Il existe des systèmes performants.»

De meilleurs isolants?

Dans la panoplie des isolants que propose le secteur de la construction, certains matériaux biosourcés, comme la fibre de bois ou le chanvre, affichent un coefficient de transmission thermique légèrement plus faible que les solutions traditionnelles telles que le polyuréthane. Limitent-ils pour autant significativement le phénomène de surchauffe? «Dans les faits, c’est peanuts; les gains se chiffrent après la virgule, avance l’expert de Buildwise, en s’appuyant sur les mesures qu’effectue le centre d’expertise. L’important, c’est d’isoler bien et beaucoup

En cours de révision, la réglementation PEB doit évoluer en Wallonie et à Bruxelles d’ici au 29 mai 2026 au plus tard, soit le délai maximal de mise en conformité avec la directive européenne adoptée en mai 2024. Celle-ci devrait mieux prendre en compte la surchauffe dans les méthodes de calcul. A cette occasion, les Etats ou Régions peuvent en effet adapter les données météorologiques de référence, qui ont bien évolué ces dernières années.

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