Italian Brainrots © combo https://www.icls.edu/blog/italian-brainrot-characters-the-wildest-way-to-learn-italian

Les Italian Brainrots, des personnages venus de l’IA et devenus phénomène mondial

Dans une boutique de bibelots à Tokyo, un présentoir est dédié à des personnages criards et souvent absurdes: les Italian Brainrots, héros de vidéos partagées des milliards de fois en ligne par les adolescents. Tous générés par l’intelligence artificielle.

Un requin déambulant en baskets surdimensionnées, un gorille au corps de banane épluchée ou une « Ballerina Cappuccina » avec une tasse de café au lait en guise de tête figurent parmi ces étranges stars virales.

Si les « Italian Brainrots » n’ont d’italien que leurs noms à vague consonance italienne, le mot « Brainrot » (cerveau pourri) fait référence à l’effet délétère bien réel que peut produire le fait de faire défiler compulsivement les publications sur les réseaux sociaux.

L’avalanche de vidéos réalisées par des inconnus à travers le monde à l’aide de l’IA générative a commencé à se déferler en janvier sur TikTok, portée par l’engouement des Générations Z et Alpha.

« Maman! Bombardino Crocodilo! »

Désormais, le succès des Italian Brainrot est planétaire, de la Corée du Sud à l’Espagne en passant par le Kenya. Des dizaines de créatures sont devenues des mèmes, inspirant un flux de nouveaux contenus tels que le « Brainrot Rap », visionné 116 millions de fois sur YouTube. Une vidéo YouTube montrant comment dessiner des Italian Brainrot, dont un croisement entre un cactus et un éléphant nommé « Lirili Larila », a été visionné 320 millions de fois.

Leur univers ne s’arrête pas à leur aspect. « Ces personnages ont tout un tas mots à eux », explique Yoshi Yamanaka-Nebesney, un adolescent de 16 ans venu dans cette boutique du centre de Tokyo avec sa mère, qui n’a aucune idée de ce dont parle son fils.

Pour Idil Galip, spécialisé dans les nouveaux médias à l’Université d’Amsterdam, « il n’y a jamais eu autant d’enfants et de jeunes sur internet », d’où une évolution de la culture numérique vers des contenus « perçus comme plus puérils ».

Certaines des vidéos les plus populaires font référence à l’Indonésie, pays de 280 millions d’habitants qui compte une population jeune et très active sur les réseaux. Nurina, une Indonésienne de 41 ans, employée d’une ONG, raconte à quel point son fils de 7 ans adore les Italian Brainbots. « Parfois quand je vais le chercher à l’école ou quand je travaille à la maison, il crie « Maman! Bombardino Crocodilo! », du nom d’un personnage d’avion bombardier avec une tête de crocodile. « Je sais que c’est amusant à regarder, affirme Nurina. Mais je dois aussi lui faire comprendre que ce n’est pas réel« , relève-t-elle.

Certaines vidéos ont été critiquées pour contenir des références qui échappent aux jeunes spectateurs, comme les bombardements à Gaza concernant « Bombardino Crocodilo ». « Le problème est que ces personnages sont intégrés à des contenus pour adultes » et « beaucoup de parents ne sont pas assez à l’aise avec la technologie » pour repérer les dangers des messages, met en garde Oriza Sativa, une psychologue clinicienne basée à Jakarta.

Tung Tung Tung Sahur

Le personnage Brainrot indonésien le plus connu, « Tung Tung Tung Sahur » ressemble à un long tambour appelé kentongan, utilisé pour réveiller les musulmans afin de prendre le sahur, le repas avant l’aube pendant le Ramadan.

Noxa, le TikTokeur indonésien derrière le clip original « Tung Tung Tung Sahur », est dorénavant représenté par un collectif parisien d’artistes, d’avocats et de chercheurs, Mementum Lab, selon qui cette production a été vue 10 milliards de fois. « Noxa est un créateur de contenu âgé de moins de 20 ans », explique Mementum Lab à l’AFP, qui n’hésite pas à le qualifier d' »artiste contemporain ». « Je ne voulais pas que mon personnage soit juste une blague passagère. Je voulais qu’il ait du sens, » affirme Noxa, dans des commentaires fournis par la société.

Les nuances culturelles peuvent cependant être perdues à grande échelle, à l’instar de ce touriste de 12 ans à Tokyo qui pensait que plutôt qu’un bâton frappant le tambour « Tung Tung Tung Sahur » tenait.. une batte de baseball.

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