Les syndicats sont énervés, mais ll’Arizona veut limiter les salaires en 10 mesures © BELGA

Pourquoi les syndicats comptent de moins en moins d’affiliés en Belgique (mais ça pourrait changer)

En Belgique, les syndicats comptent de moins en moins d’affiliés, selon une étude allemande. Ils peinent à attirer les jeunes.

Si le taux d’affiliation à des syndicats chez les travailleurs est en recul dans la plupart des pays européens entre 2016 et 2023., c’est en Belgique que la baisse se révèle la plus forte, ressort-il d’une étude de l’Institut allemand d’études économiques IW (Institut der deutschen Wirtschaft), basé à Cologne. L’Institut a examiné le taux d’adhésion des travailleurs à un syndicat (hors chômeurs et pensionnés) dans quatorze pays européens. Ce taux a diminué dans treize pays entre 2016 et 2023.

En Belgique, le taux de syndicalisation est passé de 52,4 % en 2016 à 39 % en 2023, avec des différences entre secteurs (54,2% dans le secteur manufacturier et de 35 % dans celui des services). Les chiffres sont cependant à prendre avec des pincettes, puisque l’IW a puisé ses sources chez European Social Survey, qui ne dispose que d’échantillons et non de chiffres bruts. «Cela indique tout de même une tendance à la baisse, analyse François-Xavier Lievens, chercheur en droit du travail à l’UCLouvain. La principale difficulté, et particulièrement pour la CSC, est de convaincre les jeunes.» L’IW le confirme: en Belgique, 24,5 % des salariés âgés de 16 à 30 ans étaient syndiqués en 2023, contre 39,8 % chez les 31 à 50 ans et 47,4 % pour les 51 à 65 ans.

Vers une refonte des syndicats en Belgique ?

Selon François-Xavier Lievens, cette tendance baissière s’explique également par la question salariale. En Belgique, le mécanisme d’indexation des salaires donne l’illusion au travailleur que son salaire augmente, alors qu’il suit simplement l’inflation des produits de consommation. «L’indexation des salaires est pourtant une conquête syndicale, confirme le chercheur. Mais comme les gens voient leur salaire augmenter, ils n’ont pas spécialement l’impression d’avoir besoin d’un syndicat, alors que le gouvernement a bloqué l’augmentation des salaires.» Parmi les pays étudiés, seule l’Autriche enregistre une hausse, le taux y passant de 27,8% à 32,1%. «Et ce n’est pas anodin, car la place des syndicats et des patrons dans la concertation sociale autour des salaires y est très importante.»

La Suède est le pays le plus syndiqué (72,3% en 2023), devant la Finlande (67,8%), la Norvège (57,5%) et la Belgique (39%). En queue de classement, on trouve la France  (9,1%), la Pologne (7,8%) et la Hongrie (5,6%). «Un faible taux de syndicalisation n’implique pas spécialement l’impossibilité des actions syndicales», note François-Xavier Lievens en prenant l’exemple de la CGT, capable de grosses actions en France. François-Xavier Lievens estime que la partie n’est pas perdue pour les défenseurs des travailleurs en Belgique, mais qu’il n’est pas impossible qu’une refondation des syndicats, qui vont peut-être imaginer laisser le versement des allocations de chômage à la Capac suite à la réforme du chômage, soit à venir.

En revanche, le contexte politique belge reste défavorable aux syndicats, et ce n’est pas neuf. «Le gouvernement Michel et le gouvernement De Wever sont antisyndicaux, peut-être un peu plus que le gouvernement De Croo. Ils assument une politique qui ne veut pas laisser leur place aux représentants des travailleurs.» Paradoxalement, les mesures antisyndicales pourraient pousser à la syndicalisation. La manifestation nationale de ce mardi, forte de 140.000 personnes, illustre bien l’enjeu pour les syndicats belges de regrossir leurs rangs, y compris auprès des jeunes qui étaient nombreux à défiler. «D’autant que, contrairement aux partis politiques, les Belges font encore majoritairement confiance aux syndicats.»

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