Flexibilisation du travail: le Vice-Premier David Clarinval, en charge de l’emploi, est parvenu à faire valider plusieurs mesures phares portées par son parti, le MR. © BELGA/BELPRESS

Accord de l’été: la flexibilisation du travail crispe les syndicats et ravit les patrons

Clément Boileau
Clément Boileau Journaliste

Les syndicats s’émeuvent de la suppression de l’interdiction du travail de nuit et de la limitation du préavis de licenciement, fixé à 52 semaines maximum quelle que soit l’ancienneté. Les associations patronales, elles, se disent satisfaites.

Ce n’est pas une surprise, l’Arizona table sur une flexibilisation du travail pour favoriser le taux d’emploi du Royaume. Ce 21 juillet, la coalition gouvernementale menée par Bart De Wever (N-VA) s’est donc retrouvée sur une dizaine de mesures visant à «moderniser et flexiliser le marché du travail», dixit le Premier ministre.

Au menu, une uniformisation et une augmentation du plafond d’heures supplémentaires — moyennant une augmentation du nombre d’heures défiscalisées, en particulier dans l’Horeca —, la suppression de la durée minimale de travail hebdomadaire, ou encore la fin de l’obligation, pour les employeurs, de faire appel à au moins un tiers de travailleurs à temps plein.

De quoi réjouir le secteur des PME et indépendants, notamment. «L’UCM se félicite surtout de la belle avancée dans le dossier des heures supplémentaires volontaires, système qui va devenir moins cher pour l’employeur, plus rémunérateur pour le salarié, et plus simple à mettre en place pour tous», estime l’association, qui y voit un «win-win pour les employeurs et les travailleurs», les employeurs pouvant  recourir «davantage à cette solution, avec une défiscalisation de 240 de ces heures (360 dans l’Horeca), ce qui simplifie la vie et permet de compenser d’éventuelles pénuries de main d’œuvre. Pour le travailleur, ces heures supplémentaires se font sur base volontaire, et leur rapporteront un surcroit de pouvoir d’achat.»

Partenaires sociaux exclus

Mais  un certain flou demeure sur d’autres mesures, telle la limitation du préavis de licenciement à 52 semaines, qui fait craindre rien moins qu’une «violation d’un accord entre partenaires sociaux», ainsi que le clame par exemple la CGLSB. Pourquoi? Parce que cette mesure ne tient pas compte de la solution trouvée «aux problèmes de discrimination entre les préavis des ouvriers et des employés, quand en 2013 un arrêt de la cour constitutionnelle a ouvert la voie à un alignement de l’ensemble des délais de préavis pour tout le monde, avec toute une méthode de calcul proportionnelle en fonction de l’ancienneté», argumente Olivier Valentin, secrétaire national de la centrale générale des syndicats.

«Les travailleurs aussi ont le droit de dormir la nuit et d’être payés correctement»

Ce dernier, comme d’autres porte-paroles syndicaux, s’émeut également de la redéfinition du travail de nuit (désormais pleinement autorisé dans l’e-commerce et la logistique), l’une des mesures phares de l’Arizona en matière de flexibilisation du travail. Auparavant fixé de 20 heures à 6 heures du matin, et désormais ramené de minuit à 5 heures, le temps de travail de nuit ainsi réduit fait craindre une perte de pouvoir d’achat pour ces travailleurs (moins de primes), bien que le gouvernement assure que ces mesures ne concerneront pas celles et ceux qui travaillent actuellement déjà de nuit. Sauf qu’«on ne sait pas comment le gouvernement va garantir le pouvoir d’achat en cas de changement d’employeur», fait valoir Olivier Valentin.

Et la CGLSB n’est pas le seul syndicat à voire venir une perte de pouvoir d’achat pour ces travailleurs, à l’instar de la FGTB, qui s’attend à un «recul social brutal» et prévient: «Les contrats en cours qui sont maintenus ne tiennent pas compte de la réalité: l’arrivée et le départ de nouvelles entreprises et le transfert de contrats. Les travailleurs qui sont actuellement occupés dans du travail de nuit ne sont pas préservés.»

Doper le commerce

Idem pour le grand syndicat chrétien CSC, dont les militants s’en sont allés, ces derniers jours, réveiller Yvan Verougstraete, chef des Engagés, ou David Clarinval (MR), le ministre de tutelle, à minuit et cinq heures du matin, pour leur rappeler que «les travailleurs aussi ont le droit de dormir la nuit et d’être payés correctement»

Pour Myriam Diegham, secrétaire nationale de la Centrale nationale des employés (CNE, membre de la CSC), il faut mettre ces mesures en parallèle avec la flexibilisation des horaires d’ouverture des magasins, qui en font un projet qui risque de «bousiller encore plus les acquis sociaux des travailleurs du commerce.» Qui ont «ont déjà, pour la plupart, des horaires flexibles et variables»…

Coméos, qui représente le patronat commerçant, ne s’y est d’ailleurs pas trompé, saluant pour sa part «l’assouplissement des règles concernant le travail de nuit, avec la possibilité de déployer du personnel jusqu’à minuit»… Tout bénéfice pour le secteur, qui se réjouit dans le même temps que «le gouvernement supprime le jour de fermeture hebdomadaire obligatoire et autorise les magasins à rester ouverts jusqu’à 21 h

«Les consommateurs peuvent tous faire leurs achats en ligne le soir, mais pas en magasin. Cet ajustement nous met enfin en phase avec nos pays voisins», ajoute Jan Delfosse, directeur général de Coméos. Qui salue, enfin, «la décision de réduire les cotisations patronales pour les salaires compris entre 1 900 et 3 100 euros», ce qui «répond directement à une demande formulée depuis des années par la fédération professionnelle Comeos. «Cette mesure n’est pas un cadeau, mais une correction nécessaire pour rendre nos entreprises résilientes dans un contexte de coûts élevés et de concurrence internationale», assure ce dernier, par voie de communiqué.

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