Cette question souvent entendue à propos de tout et de rien peut prêter à sourire. Pourtant, sous son apparente simplicité, cette expression spontanée du bon sens populaire répercute une évolution essentielle de notre système démocratique, à savoir le rôle de plus en plus prépondérant du pouvoir exécutif. Le phénomène est tel que le mot « pouvoir » désigne désormais exclusivement l’exécutif, alors que les démocraties naissantes, depuis les Révolutions américaine et française, avaient fait du législatif le pouvoir central.
Les raisons de cette évolution, notamment la complexité croissante des dossiers, sont multiples et mériteraient une étude exhaustive. Qu’il faille étudier cette évolution, à fortiori d’un point de vue libéral – en s’interrogeant, comme l’avait fait Jean Gol lors du Congrès de Tournai, sur le rôle de l’Etat – est évident. En sachant qu’une telle analyse doit également être prospective en tenant compte des inquiétudes et des aspirations des citoyens en matière de démocratie représentative, participative et directe.
Une recherche d’une pareille ampleur étant impossible dans les limites du présent texte, je m’en tiendrai au constat : notre système démocratique, à tous les niveaux de décision (du conseil communal au Conseil des ministres européens, en passant par les différents gouvernements de la Belgique fédérale) accorde un rôle essentiel, prépondérant à l’exécutif. Nous avons affaire désormais à une autre configuration du fonctionnement de la démocratie, configuration qui ne peut pas être assimilée ipso facto, comme le fait le sociologue Pierre Rosanvallon, à une perte de substance démocratique. A la condition d’assumer pleinement la conséquence qui en découle : l’attente de plus en plus grande et de plus en plus informée, de la population vis-à-vis de ceux qui gouvernent. Une attente en termes de transparence, d’honnêteté et d’efficacité. Attente dont le corrélat est la haute responsabilité qui est celle des gouvernants, tant au niveau de l’efficacité des décisions prises qu’au niveau du maintien de la confiance citoyenne en la démocratie.
Autrement dit la capacité de décision d’un gouvernement, dans le périmètre d’un système démocratique exerçant un plein contrôle sur celui-ci, est une qualité. Un gouvernement qui ne décide pas, qui n’assume pas ses choix, qui ne réforme pas ce qui doit l’être est davantage qu’un gouvernement inutile, c’est un poids pour l’ensemble de la société. Un poids qui à terme nuit à la confiance en la démocratie. Celle-ci garantit le pouvoir du peuple, la -cratie du démos, à travers les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire auxquels j’ai tendance à adjoindre le pouvoir de contrôle et d’explication d’une presse libre. Ces quatre piliers doivent exercer leur rôle : c’est de leurs forces respectives que résulte celle de la démocratie. Qu’un des pouvoirs faillisse, et le résultat est bancal et rapidement nuisible.
Mais je reviens à l’exécutif auquel je me suis limité. Il est nettement préférable dans cette forme de gouvernementalité et vu l’attente de plus en plus grande des citoyens à son égard, d’avoir un gouvernement qui agit, plutôt qu’un exécutif hésitant et sans véritable projet identifiable par tous. Est-ce à dire que toute loi est bonne ? Non, c’est pourquoi existe la possibilité de réformer et d’améliorer. Est-ce à dire que le pouvoir d’initiative législatif du parlement est suffisant ? Non, là aussi des idées fortes sont nécessaires. Mais ce que je prétends c’est, quel que soit le dossier en matière économique, sociale, budgétaire, dans le domaine de la défense ou de la sécurité, dans celui de l’immigration ou des classes moyennes…, rien n’est plus dommageable pour l’ensemble de nos concitoyens qu’un gouvernement qui n’a pas le souffle nécessaire pour avancer. Car la décision non prise à temps se transforme, un jour ou l’autre, en cauchemar pour ceux-ci. On peut citer les tunnels bruxellois, le RER, ou l’absence de riposte au phénomène de radicalisation…
Ce n’est pas par sa composition inédite que le gouvernement Michel marque une rupture, c’est par la démonstration d’une efficacité gouvernementale que l’on n’avait plus connue depuis très longtemps. Une efficacité telle que, sur tous les plans, les lignes ont bougé en un peu plus de trois ans : créations d’emplois, investissements à la hausse, confiance retrouvée dans l’entreprenariat, restructuration de la lutte antiterroriste, maîtrise de l’immigration et création de places d’accueil, financement assuré de la sécurité sociale et des pensions, augmentation des revenus des citoyens par le tax-shift, réduction de la dette de l’Etat, investissements dans les composantes Air-Terre-Mer de notre Défense…
Que fait le gouvernement Michel ? Avec le soutien de la majorité parlementaire, dont le MR, il recrée les conditions de la confiance démocratique.
Richard Miller