Au 1er janvier 2026, seuls ceux qui chôment depuis plus de 20 ans seront exclus du chômage. Le ministre Clarinval et l’Arizona phasent la mesure clé de cette législature.
Tout vient à point à qui sait attendre, paraît il. L’Arizona a montré ce jeudi qu’elle était prête à attendre un petit peu plus longtemps que prévu sa réforme phare visant à exclure les bénéficiaires du chômage depuis plus de deux ans. Le big bang du 1er janvier 2026 n’aura pas lieu, mais le gouvernement fédéral n’abandonne pas son objectif pour autant. Au contraire.
Le premier jour de l’année prochaine marquera donc toujours l’exclusion des personnes au chômage depuis plus de 20 ans. Trois mois plus tard, le 1er mars, ceux qui ne travaillent pas (officiellement) depuis plus de huit ans les rejoindront. Le 1er avril, celles et ceux qui font valoir leur droit au chômage depuis plus de deux ans seront exclus à leur tour.
«Un petit 20.000» au CPAS le 1er janvier
Avec ce «lissage» de la réforme, David Clarinval montre qu’il a entendu les partenaires sociaux qui ont sonné l’alarme à travers les régions, les CPAS et les organismes de mises à l’emploi. «Sauf que pour nous, ça ne change pas grand chose, glisse Romain Adam, porte-parole d’Actiris. On doit toujours être prêt pour le 1er janvier. On reste dans la gestion de l’urgence.» En fait, l’agence bruxelloise de mise à l’emploi a déjà un plan établi en 20 points pour gérer cette urgence, mais doit patienter pour l’activer dans sa totalité. «Tant que l’Onem ne nous prévient pas que Monsieur X va sortir du régime d’ici peu, on ne peut pas le contacter pour entamer un suivi. Or l’Onem doit regarder les carrières de chacun au cas par cas, ce qui prend du temps.» L’Office National de l’Emploi ne serait en mesure d’accomplir cette mission qu’en septembre, ce qui laisserait trois mois à Actiris, au Forem et au VDAB pour activer les chômeurs inscrits depuis plus de 20 ans.
Combien seront concernés par la mesure au 1er janvier? Personne ne le sait encore avec certitude. «Mais on estime qu’il y aurait un petit 20.000 personnes concernées», chiffre le président de la FGTB, Thierry Bodson, qui déplore que la charge urgente reste sur les chercheurs d’emploi et les organismes de mise à l’emploi, «alors que les employeurs disent eux-mêmes que ça ne les intéresse pas d’engager des gens de plus de 55 ans». Le cabinet Clarinval annonce 25.000. La deuxième vague, en mars (huit à 20 années chômées), en amènerait 42.500. La troisième (deux à huit ans chômés), en avril, 45.000.
Win-win?
Tout cela contraste sérieusement avec la vitesse d’exécution et la radicalité montrée par l’Arizona depuis ses 100 premiers jours. Il n’empêche que le gouvernement fédéral pourrait s’avérer gagnant sur toute la ligne. «Les calculs de l’Onem avancent que les économies réalisées sur la réforme du chômage devraient rapporter deux milliards alors que l’Arizona n’en avait calculé que 900 millions», précise Bruno Van der Linden, professeur d’économie à l’UCLouvain et chercheur à l’Institut des recherches économiques et sociales.
Et pour les fameux effets retours, alors? L’Arizona planchait sur la remise à l’emploi pour relancer son économie, le démarrage plus lent que prévu de la réforme du chômage ne va-t-elle pas alléger les entrées? Thierry Bodson n’y croit pas, au vu de la proximité entre les phases. Et Bruno Van der Linden de confirmer l’avis de la Cour des comptes, estimant que les effets retours attendus par l’Arizona sont inadéquats et de toute façon surestimés.
Par ailleurs, «il n’y aura pas de file de 100 personnes devant le CPAS le 2 janvier, lâche Alain Vaessen, directeur général de la fédération des CPAS wallons. L’impact global de la limitation des allocations de chômage reste préoccupant, mais le phasage nous permet de respirer un peu». D’abord parce que tous les dossiers ne seront pas traités d’un seul coup, ensuite parce que l’accueil sera plus digne, enfin parce que les CPAS commenceront avec la vague la plus petite. C’est important, car les CPAS wallons ne savent toujours pas de quelle enveloppe ils bénéficieront pour 2026 –ils estiment avoir besoin de 425 millions mais l’Arizona les trouverait gourmands– pour couvrir les frais d’intégration ainsi que le recrutement nécessaire à l’accompagnement des 180.000 exclus annoncés par le ministre. Les CPAS attendent l’arrivée de 35 à 45% d’entre eux.