Les magistrats du nord et du sud du pays laissent au gouvernement fédéral jusqu’au 13 novembre prochain pour négocier des « mesures concrètes et substantielles de nature à améliorer le fonctionnement de la Justice, dans l’intérêt des citoyens et de l’État de droit ». Sans avancée passé ce délai, le monde judiciaire se rassemblera à Bruxelles le vendredi 14 novembre pour dénoncer le sous-financement structurel dont pâtit le troisième pouvoir, a annoncé dimanche l’Association syndicale des magistrats (ASM).
Depuis le printemps, les acteurs et actrices du monde judiciaire dénoncent le sort qu’il leur est réservé dans la réforme des retraites annoncée par la coalition Arizona le 11 avril. Ils craignent notamment que les fonctions de magistrat, de greffier et autres membres du personnel judiciaire ne trouvent plus preneurs, alors que les conditions sont déjà difficiles (surcharge de travail, bâtiments délabrés, numérisation laborieuse…) et que les citoyens en paient le prix (alternatives à l’emprisonnement inaccessibles faute de moyens sur le terrain, prise en charge insuffisante des personnes internées, absence de solutions pour les mineurs en danger ou délinquants, etc.).
La logique de l’exécutif passe mal auprès des composantes de la Justice, au vu par exemple du budget alloué à la Défense. En juillet dernier, le Conseil des ministres a validé un investissement de près de 140 milliards sur neuf ans, maintenant les dépenses à 2% du PIB sous cette législature. De son côté, la proportion dédiée à la Justice stagne à 0,22% du PIB, en-deça du 0,31% de la moyenne européenne, souligne l’ASM.
Le doublement du budget n’est pas irréaliste
Or, pour garantir la sécurité intérieure, une « Justice forte et indépendante est indispensable ». « Ce besoin a été reconnu par des partis de la majorité, qui ont eux-mêmes estimé, en campagne électorale, que le budget de la Justice devait être augmenté et, selon certains programmes, approcher 0,5 % du PIB« , rappellent les magistrats.
« Le doublement du budget n’est pas irréaliste« , estime dès lors le président de l’ASM, Laurent Sacre.
S’ils soulignent l’ouverture consentie par leur ministre de tutelle, Annelies Verlinden (CD&V), les magistrats pointent le silence du ministre des Pensions Jan Jambon (N-VA) et espèrent que ce dernier « comprendra enfin la nécessité de s’asseoir à la table des discussions ».
Quant au Premier ministre, ils déplorent que Bart De Wever (N-VA) « se soit contenté d’adresser un accusé de réception » à la demande de rencontre formulée par les chefs de corps de la Cour de cassation qui, comme lui, représentent l’un des trois pouvoirs de l’État de droit.
Action le 14 novembre
À défaut d’être entendus par ces trois interlocuteurs, les magistrats et le personnel des greffes et parquets mèneront une action à Bruxelles le 14 novembre, à laquelle ils espèrent également rallier les avocats pour rassembler environ un millier de personnes.
Une réunion entre les associations est prévue la semaine prochaine pour discuter des modalités précises, a spécifié M. Sacre.
Le 27 juin, quelque 800 magistrats, greffiers, membres du personnel de justice, avocats ou encore traducteurs s’étaient rassemblés au palais de justice de Bruxelles à l’occasion d’une déclaration inédite des plus hauts magistrats du pays, appelant à remédier au plus vite à la dégradation des institutions judiciaires.