Plus de deux tiers des enseignants du secondaire inférieur se disent satisfaits de leurs conditions d’emploi et de rémunération, révèle une enquête publiée mardi. Un constat bien supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE. Les profs belges souffrent toutefois d’un sérieux manque de valorisation et d’une surcharge administrative.
Le métier d’enseignant ne ferait plus rêver. Pénibilité, rémunération trop faible ou manque de valorisation auraient d’ailleurs conduit à une désertification de la profession. En 2024, à peine 3.562 jeunes entamaient des études pour devenir instituteur ou enseignant du secondaire inférieur en Fédération Wallonie-Bruxelles, soit 31% de moins que deux ans plus tôt (5.146 inscrits).
Une récente étude de l’OCDE vient toutefois nuancer ce sombre tableau. Et amène à repenser les causes profondes de cette crise de la vocation. Les professeurs belges ne seraient en réalité pas si mal lotis, pointe l’enquête internationale Talis menée sur plus de 280.000 enseignants et chefs d’établissement d’enseignement secondaire inférieur à travers le monde. En voici les cinq points à retenir.
1. Une formation de qualité
Dans l’ensemble, les jeunes diplômés belges se disent bien préparés à exercer le métier d’enseignant, selon l’étude. 74% des profs ayant achevé leur formation initiale au cours des cinq années précédant l’enquête se disent ainsi «d’accord» ou «tout à fait d’accord» pour affirmer que la qualité de leur formation initiale était globalement élevée. Un pourcentage quasiment identique à la moyenne des pays de l’OCDE (75%). A noter que l’enquête ne distingue pas les systèmes du Nord et du Sud du pays, ce qui empêche d’évaluer précisément la qualité de la formation initiale en Fédération Wallonie-Bruxelles.
Dans le détail, trois quarts des jeunes diplômés déclarent que leur cursus les a bien préparés au contenu des matières (74%) et à la pédagogie générale (75%). Par contre, à peine 30% s’estiment bien formés à enseigner dans un environnement multiculturel ou multilingue, et 35% à soutenir le développement social et émotionnel des élèves.
2. Un statut et un salaire satisfaisants
En Belgique, 82% des enseignants ont un contrat fixe (ou sont «nommés», en Fédération Wallonie-Bruxelles). Cette sécurité d’emploi, légèrement supérieure à la moyenne européenne (81%), conduit 68% des enseignants belges à se dire «satisfaits» ou «très satisfaits» de leurs conditions d’emploi. Un chiffre qui a toutefois baissé par rapport à la dernière étude datant de 2018 (71%). Une proportion qui pourrait encore diminuer avec la disparition annoncée de la nomination des futurs enseignants dès 2027 en Fédération Wallonie-Bruxelles, même si la ministre Glatigny assure que son remplacement par un CDI offrira plus de stabilité.
La satisfaction des enseignants à l’égard de leur salaire a par contre relativement augmenté (+5 points de pourcentage) par rapport à 2018. Près de sept profs sur dix (69%) s’estiment ainsi «satisfaits» ou «très satisfaits» de leur rémunération. Un pourcentage bien plus élevé que la moyenne de l’OCDE, qui plafonne à 39%.
3. Une charge de travail inférieure à la moyenne
Les profs belges du secondaire inférieur travailleraient moins que leurs homologues internationaux, souligne encore l’étude Talis. La charge de travail hebdomadaire totale des enseignants à temps plein serait ainsi de 37,8 heures, contre 41 heures en moyenne dans l’OCDE. Un temps de travail identique à celui de 2018, et qui est consacré, outre à la dispense des cours, à la préparation de ceux-ci (6,3 heures par semaine), aux corrections et notations (4,6 heures par semaine) et aux tâches administratives (2,2 heures). Ces tâches ont d’ailleurs augmenté depuis 2018, un alourdissement que les enseignants et directions d’école déplorent régulièrement.
4. Une forte instabilité et une surcharge administrative
La surcharge administrative fait d’ailleurs partie des sources de stress les plus importantes chez les enseignants belges. 70% des sondés se plaignent de ces tâches, soit un pourcentage bien supérieur à la moyenne de l’OCDE (51%). Les exigences changeantes des autorités (communautaires et régionales) constituent une autre source de stress pour 59% des enseignants, tout comme les révisions fréquentes des programmes scolaires (51%).

Plus d’un prof sur deux (55%) déclare d’ailleurs qu’il aimerait bénéficier d’une période de stabilité avant que ne soient introduits de nouveaux changements dans leur établissement (contre 44% dans l’OCDE). Un constat peu surprenant au vu du vaste chantier qu’a représenté l’introduction du Pacte d’excellence et des doutes qui subsistent quant à la prolongation du tronc commun jusqu’en troisième secondaire.
Au total, quelque 20% des profs belges disent ressentir «beaucoup» de stress dans leur travail, et 10% déclarent que leur travail a «beaucoup» d’impact négatif sur leur santé mentale. Deux pourcentages similaires à la moyenne de l’OCDE.
5. Une (trop) faible valorisation
Dernier constat pointé par l’étude: les profs belges se sentent mal perçus par la population. A peine 15% des enseignants estiment que leur métier est valorisé ou très valorisé au sein de la société, un chiffre inférieur à la moyenne de l’OCDE (22%). Enfin, seuls 13% des enseignants estiment que les responsables politiques accordent de l’importance à leur avis. Un pourcentage, une fois encore, inférieur à la moyenne internationale (16%).
L’OCDE rappelle pourtant qu’une valorisation sociale plus importante du métier d’enseignant «peut contribuer à attirer des candidats de haut niveau» vers cette profession et à «retenir les professeurs expérimentés» dans le secteur. Il n’est donc guère surprenant que la proportion d’enseignants pour qui l’enseignement constituait le premier choix de carrière ait chuté en Belgique, passant de 60% en 2018 à 51% en 2024.