L’Otan s’apprête à imposer une participation à 5% du PIB des Etats membres, alors que la Belgique vient péniblement d’atteindre les 2%. Mission impossible dans le contexte budgétaire actuel?
Le Premier ministre, Bart De Wever, s’est employé à mettre les points sur les « i » à propos de la future norme de dépense de l’OTAN. Elle ne « tombe pas du ciel », elle est le résultat d’un processus entamé depuis plusieurs années et qui repose sur des plans précis de défense du continent européen, a-t-il fait remarquer à la Chambre, entouré des ministres des Affaires étrangères et de la Défense, Maxime Prévot et Theo Francken.
C’est en 2014 que l’objectif de 2% a été assigné aux pays de l’Alliance. Les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas atteint ce seuil et celui-ci sera porté dans quelques jours au sommet de La Haye à 5%, soit 3,5% affectés aux dépenses militaires pures et 1,5% aux dépenses de résilience (infrastructure, cybersécurité, etc.).
L’effort à fournir sera considérable. Le chef du gouvernement fédéral l’a comparé à un « saut quantique pour rattraper le peloton ». « Il faudra vraiment se mettre en danseuse », a-t-il annoncé. « Nous devrons intensifier nos efforts et assumer notre contribution au sein de l’Alliance. C’est notre devoir d’investir, nous n’avons pas d’autre choix ».
Lors d’une réunion des ministres des Affaires étrangères à Antalya il y a un mois, la Belgique s’est trouvée isolée à plaider la modération dans les dépenses au sein de l’Alliance. Le débat porte maintenant sur les modalités de cet effort à fournir. « La Belgique n’obtiendra rien en s’opposant frontalement à cet objectif », a affirmé M. Prévot. Le conseil des ministres s’est d’ailleurs accordé sur ce point vendredi.
Dans l’opposition mais aussi la majorité, cet effort a pourtant été remis en cause. Le MR, Vooruit et le CD&V ont eu des mots forts ce week-end, le président des libéraux francophones allant jusqu’à parler d' »hystérie collective ». « Tout le bruit produit et qui perturbe le message accroît le risque de ne pas atteindre les objectifs », a averti le Premier ministre.
À La Haye, la Belgique essaiera d’obtenir des Alliés « la plus grande flexibilité possible » dans le trajet vers les 5%. Que ce soit dans le délai -l’échéance de 2032 est jugée intenable, la Belgique préférerait 2035- ou dans l’échelonnement – ajouter 0,2% par an aux 2% du PIB déjà convenus pour cette législature paraît tout aussi intenable.
Le gouvernement veut par ailleurs inclure les Régions afin qu’elles assument une partie des dépenses de résilience et maintenir la prise en compte du soutien bilatéral à l’Ukraine dans l’effort. Il entend également obtenir un retour sur investissement pour son économie et son industrie de la défense.
Les 5% annoncés passent mal dans l’opposition de gauche. Une norme « folle » imposée par Donald Trump, a lancé Ecolo-Groen. « Ce sera pris dans les pensions », a prédit Peter Mertens (PTB). « Pas question de remettre en cause la protection sociale », a réclamé le PS qui a accusé le gouvernement de dépenser l’argent qu’il n’a pas. Il s’inquiète des futurs investissements.
L’aviation est le point fort de la Défense belge et des F35 supplémentaires seront acquis selon toute vraisemblance. « Vous préférez tout miser sur les Etats-Unis », a affirmé Lydia Mutyebele Ngoi. Devant les députés, le gouvernement s’est voulu lucide devant la menace à laquelle l’Europe fait face et qui a changé ces dernières années. Avec la fin de la Guerre froide, les dépenses militaires se sont significativement réduites et portées sur des opérations menées hors du continent. L’annexion de la Crimée en 2014 et l’invasion à grande échelle de l’Ukraine il y a trois ans ont changé la donne. « Dans les années qui viennent, la Russie sera en mesure de tester l’OTAN et peut-être même de l’attaquer », a averti le Premier ministre.