
Toyota, leader de l’automobile depuis 2006: les clés de sa domination
Depuis 2006, Toyota est le numéro un du monde automobile international, avec juste une interruption de quatre ans. Et il semble que le pionnier de l’hybride conservera encore un certain temps sa position de leader. Mais quel est le secret du succès du constructeur japonais?
En 2006, General Motors voyait prendre fin sa domination ininterrompue de 81 ans dans le monde automobile international. Le fait que GM soit détrôné par Toyota est lié au succès de ses modèles hybrides. Ceux-ci consomment moins de carburant et émettent moins de CO₂. De 2015 à 2020, Volkswagen est certes parvenu à éclipser Toyota de la première place, mais a complètement raté sa transition des moteurs thermiques vers les moteurs électriques.
Pour l’Europe, par l’Europe, en Europe
Tandis que Toyota anticipe de loin et livre en flux tendu, Volkswagen, lui, court après les faits. De plus, chez Toyota, tout est placé sous le signe de l’efficacité. Chaque investissement, petit ou grand, est minutieusement examiné pour son efficience, son efficacité, sa valeur ajoutée financière et industrielle. Les projets de prestige à la rentabilité douteuse n’ont aucune chance, même s’ils émanent du plus passionné des ingénieurs ou designers.
Dans la philosophie de la marque, seul le meilleur est acceptable. En matière de qualité, de sécurité et de fiabilité, aucune concession n’est faite. La multitude de contrôles qualité paraît peut-être excessive aux yeux des Occidentaux, mais elle aboutit à un niveau très élevé. Cela permet à Toyota d’offrir une période de garantie exceptionnelle de 10 ans. Aucun autre constructeur de volume n’atteint un score comparable en termes de satisfaction client.
Si Toyota est devenu, et est resté, numéro un mondial, c’est aussi parce que ses dirigeants au Japon ont très tôt compris qu’il ne suffisait pas de prendre en compte les réalités socio-économiques, mais qu’il fallait également accorder une importance sérieuse aux contextes culturels. Si une marque automobile veut réussir, elle doit s’adapter aux spécificités des différents marchés ainsi qu’aux préférences et goûts de la population locale. La création d’un centre de recherche et de développement à Zaventem et d’un studio de design à Nice prouve que Toyota est sérieux quant à sa devise: «Pour l’Europe, par l’Europe, en Europe».
«Si une marque automobile veut réussir, elle doit s’adapter aux spécificités des différents marchés ainsi qu’aux préférences et goûts de la population locale.»
Le Toyota Technical Centre de Zaventem existe depuis 1984 et couvre désormais une superficie de 26.000 m². Quelque 1.700 ingénieurs, scientifiques et designers hautement qualifiés y travaillent sur les modèles futurs destinés au marché européen.
Un quart d’entre eux sont belges, les trois quarts restants viennent littéralement des quatre coins du monde. Du plus bas au plus haut niveau, tout le monde doit se lever tôt en raison du grand décalage horaire avec le Japon. En été, il est de sept heures, en hiver de huit heures. Cela se traduit par de longues journées de travail, tant ici qu’au Japon.
Tous les collaborateurs portent la même tenue de travail grise et la langue de communication est l’anglais. Une centaine de règles veillent à ce que tout le monde reste dans le rang. Sortir du cadre n’est pas admis. Et alors? Le sentiment d’appartenance à l’entreprise est fort et le turnover du personnel est faible.
En retour, Toyota garantit à ses employés un quasi-emploi à vie, ce qui n’est pas anodin dans un monde automobile en pleine transition. Les collaborateurs se voient offrir toutes les opportunités d’évoluer ou de repartir dans un autre département ou domaine de compétence.
Last but not least: sept Toyota sur dix vendues en Europe, ainsi que leurs groupes motopropulseurs, sont produites dans l’une des huit usines Toyota situées en France, en Pologne, au Portugal, en Tchéquie, en Turquie ou au Royaume-Uni.
Le virage de Toyota
Tout fonctionne-t-il parfaitement chez Toyota? Poser la question, c’est y répondre. Chez Toyota aussi, tout ne roule pas toujours comme sur des roulettes. Jusqu’à il y a quelques années, la société n’arrivait pas à créer une identité de marque cohérente. Extérieurement, les différentes gammes de modèles présentaient peu ou pas de liens de parenté, si bien qu’elles n’étaient pas perçues dans l’espace public comme appartenant à la grande famille Toyota. Toyota manquait d’une identité de marque clairement reconnaissable. Ce temps est désormais révolu.
Les responsables marketing se sont également trompés à plusieurs reprises. Ainsi, ils ont changé le nom du modèle populaire Corolla en l’insignifiant Auris. Une erreur de débutant qui, à ce niveau, est inacceptable. Et quel plaisantin a eu l’idée de baptiser «bZ4X» le premier modèle entièrement électrique de la marque? Il s’avère que les lettres « bZ » font référence à la sous-marque «Beyond Zero», que le chiffre 4 désigne le segment D et que la lettre X correspond au segment SUV. Compris?
C’est un secret de Polichinelle que l’ancien dirigeant Akio Toyoda a toujours été un partisan tiède de la motorisation électrique, préférant l’hydrogène pour atteindre l’objectif de zéro émission.
Si Toyota a malgré tout pris un virage et s’engage désormais également sur la voie de l’électrique, c’est avant tout en raison de décisions politiques qui rendent l’électromobilité fiscalement avantageuse pour les entreprises et les indépendants. Une marque automobile qui veut occuper une position de tête ne peut se passer d’une solide présence sur le marché des voitures de société, ce qui exige une offre électrique attractive.
C’est pourquoi Toyota a présenté ses (nouveaux) modèles électriques lors du récent Kenshiki Forum organisé à Bruxelles, afin de renforcer la présence de la marque japonaise sur ce marché d’une importance immense. Chez les particuliers, Toyota occupe de toute façon une place de choix.
Le bZ4X a subi un restylage discret et est désormais équipé du nouveau système multimédia avec écran de 14 pouces. Et les Urban Cruiser et C-HR+ sont entièrement nouveaux. Ce dernier est déjà connu en version hybride mais apparaît, dans sa version électrique, avec un design moins extravagant. L’intérieur est complètement renouvelé. Les acheteurs potentiels pourront choisir entre trois variantes: une version à traction avant de 167 ch et une autre de 224 ch, avec des batteries respectives de 57,7 et 77 kWh. La version haut de gamme dispose de 343 ch, d’une batterie de 77 kWh et d’une transmission intégrale. L’autonomie WLTP atteint jusqu’à 600 kilomètres et la recharge rapide est possible jusqu’à 150 kW.
Le virage de Toyota ne signifie pas que la marque renonce à d’autres formes de propulsion alternatives, comme l’hydrogène, qui reste, selon Toyota, une meilleure solution pour certains marchés et certaines applications. Toyota continue donc à privilégier l’ouverture technologique.
L’œuf de Toyota
Peut-être que l’attraction la plus marquante à Bruxelles était-elle la Toyota FT-Me, une citadine électrique qui donne un nouveau contenu à la mobilité urbaine. Ce concept-car a été entièrement développé et dessiné au Toyota Technical Centre de Zaventem par une équipe d’ingénieurs et de designers sous la direction du Flamand Stijn Peeters, Head of New Mobility Planning & Development, fort de plus de vingt ans de service –une fois chez Toyota, toujours chez Toyota.
«De plus en plus de gens s’installent en ville, et ils sont de plus en plus nombreux à opter pour l’usage d’une voiture plutôt que pour sa possession. Pour beaucoup de jeunes, posséder une voiture n’est plus une aspiration suprême. Trop cher, peu pratique et trop polluant. C’est une critique que nous prenons à cœur et à laquelle nous cherchons une réponse appropriée. Dans le cas de la FT-Me, nous proposons une biplace électrique de moins de 2,5 mètres de long et moins de 1,5 mètre de large, extrêmement maniable et flexible, nécessitant peu d’espace de stationnement.»
«Ce véhicule léger (550 kg, batterie comprise) utilise des plastiques recyclés eux-mêmes réutilisables. Comme la FT-Me est très légère, elle consomme extrêmement peu d’électricité et une petite batterie suffit. Une partie de l’énergie est d’ailleurs produite par un panneau solaire situé sur le toit de la voiture, garantissant une autonomie de 20 à 30 km. La recharge peut évidemment aussi se faire via une prise, offrant alors une autonomie bien supérieure.»
«La vitesse maximale de la FT-Me est de 45 km/h, ce qui est largement suffisant pour un environnement urbain. La vitesse moyenne dans une grande ville est inférieure à 40 km/h. Comme la FT-Me ne dépasse pas les 45 km/h, un permis cyclomoteur suffit, et elle peut être conduite par des jeunes dès l’âge de 16 ans. La FT-Me s’adresse ainsi à un groupe cible intéressant qui envisage différemment la possession et l’usage de la voiture par rapport à la génération précédente.»
«La FT-Me est inclusive, en ce sens que le siège passager peut être retiré en un rien de temps, permettant d’embarquer un fauteuil roulant. L’accélération et le freinage se font via le volant et non plus via des pédales. En tant que conducteur, on dispose d’une vue à 360° sur son environnement immédiat. Il est important de savoir que toutes les fonctions de la FT-Me sont commandées via le smartphone.»
Quand la FT-Me entrera-t-elle en production et combien coûtera-t-elle ?
Stijn Peeters: La FT-Me est un modèle d’étude qui apporte une réponse à un certain nombre de questions et de défis liés à la mobilité urbaine future. Avec cette initiative, Toyota prouve qu’il prend ces défis au sérieux.
Une prochaine étape consistera à ouvrir le dialogue avec les autorités, qui devront créer un cadre légal autour de la micromobilité. Pour des catégories en dehors du cadre actuel du quadricycle léger à moteur (L6e), il faudra encore plusieurs années. Ce n’est qu’ensuite qu’une décision sera prise concernant la mise en production du modèle d’étude. Si l’on regarde le marché actuel, le prix client devrait se situer entre 10.000 et 12.000 euros. Personnellement, je crois davantage à une formule de location à l’heure, à la journée ou au mois, afin d’atteindre un taux d’utilisation et une efficacité aussi élevés que possible. Le dernier mot n’a pas encore été dit concernant le modèle économique. Que le marché soit prêt, j’en suis assez certain.
Toyota en Belgique
Avec ses 6.000 collaborateurs, Toyota est l’un des plus grands employeurs industriels du pays. Ce n’est pas seulement le Toyota Technical Centre qui est installé à Bruxelles, c’est également le siège européen de Toyota (TME). Le centre européen de distribution des pièces détachées est situé à Diest. Dans notre pays, Toyota ne doit laisser passer que Dacia et Volkswagen comme marques les mieux vendues auprès des particuliers.
Si elle n’a pas encore acquis ce statut sur le marché des véhicules de société, c’est en raison de la particularité du marché automobile belge. Les véhicules de société y sont surreprésentés, ce qui profite surtout aux marques premium allemandes. Leurs modèles possèdent traditionnellement une haute valeur résiduelle, ce qui fait que le montant mensuel du leasing reste relativement bas par rapport à leur prix de facture et à leur image. Une voiture onéreuse dans l’allée laisse supposer que son propriétaire a un emploi bien rémunéré ou une pratique prospère. Certaines personnes y attachent beaucoup d’importance.
En Belgique, Toyota est importée par le groupe automobile indépendant Inchcape, l’un des plus grands distributeurs automobiles au monde.
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