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«Il n’y a pas de risque de black-out à cause des voitures électriques jusqu’en 2030»

Erik Raspoet Journaliste Knack

Comment éviter les black-out lorsque, demain, l’ensemble du parc automobile sera branché?

Fin 2024, la Belgique comptait, selon Statbel, près de 400.000 véhicules électriques (EV), soit un doublement en à peine un an. Et les ventes ne feront que croître. Elia, le gestionnaire du réseau belge à haute tension, a lui estimé dans sa récente Adequacy and Flexibility Study qu’environ 3,4 millions de véhicules électriques –voitures particulières, utilitaires et camions inclus– rouleront dans le pays d’ici à 2035.

Si jusqu’ici, le déploiement du parc de véhicules électriques s’est déroulé sans les black-out redoutés par certains, «la courbe est raide, estime Joannes Laveyne, expert en énergie et réseaux à l’UGent. «Heureusement, la transition est un processus graduel. Jusqu’à présent, les problèmes se sont limités à des surcharges locales dans quelques régions. C’est un phénomène temporaire: de nouvelles cabines de moyenne tension viendront prochainement renforcer les points faibles du réseau. L’enjeu est de maintenir le rythme face à la demande croissante. Jusqu’en 2030, nous sommes préservés.»

3 gigawatts de puissance de pointe seront nécessaires d’ici à 2035, ont calculé les experts.

Mais après? «La répartition sera le grand défi, annonce le scientifique. Si nous chargeons tous en même temps à pleine puissance, des coupures pourraient avoir lieu. Mais je ne crois pas que cela se produira. Il existe des raisons d’être optimiste.» Vraiment? «La recharge collective à pleine puissance n’est pas seulement mauvaise pour le réseau, elle l’est aussi pour le portefeuille de l’utilisateur, poursuit-il. La charge intelligente sera la clé, et elle fonctionne de mieux en mieux. Le tarif capacitaire, on l’a constaté en Flandre (NDLR: le tarif incitatif, basé sur les heures de consommation, n’entrera en vigueur en Wallonie qu’en 2026), a peu d’influence sur la consommation traditionnelle, mais il exerce bel et bien un effet incitatif sur le comportement de charge des propriétaires de véhicules électriques. C’est logique: les batteries sont gourmandes, l’incidence sur la facture est donc significatif. Cependant, il existe des logiciels intelligents qui permettent de programmer la charge lorsque les prix de l’électricité sont bas, c’est-à-dire aux moments où la production excède la demande. Eneco et Engie proposent déjà cela via une application gratuite, et d’autres fournisseurs suivront certainement. L’effet de ces mesures est d’ores et déjà mesurable: Fluvius, le gestionnaire de réseau flamand, a revu son facteur de simultanéité –la probabilité que nous chargions tous en même temps– de 60 à 45%.»

Rencontrera-t-on plus de problèmes d’ici à 2035? «Pas vraiment, assure Joannes Laveyne. Malgré tous les incitants, la recharge se fera surtout le soir, la nuit et sur le lieu de travail durant les heures de bureau. En hiver, et lors de journées avec peu de production d’énergie renouvelable, la situation deviendra toutefois plus tendue en soirée. Mais on peut partiellement résoudre cela grâce au stockage dans des batteries. Après 2030, la charge bidirectionnelle –qui permet à la batterie d’un véhicule de restituer de l’électricité au réseau– sera un véritable «gamechanger». Néanmoins, une capacité supplémentaire sera indispensable, et pour l’instant, elle devra malheureusement provenir de nouvelles centrales à gaz. Celles-ci sont déjà en cours d’installation: à Flémalle, la première est en phase de test. Selon les prévisions, et dans le scénario idéal, il nous faudra trois gigawatts supplémentaires de puissance de pointe. Sans charge intelligente, nous serions rapidement confrontés à un déficit de huit à dix gigawatts. La répartition sera donc réellement essentielle.»

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