La guerre des prix fait rage sur le marché chinois. La rentabilité des constructeurs chute. Avec des conséquences pour les équipementiers européens, là-bas et ici.
Lors du salon automobile de Munich, qui s’est achevé le 14 septembre, les champions allemands occupaient encore le centre-ville. BMW y exhibait son nouvel iX3, tandis que Mercedes-Benz y présentait le GLC restylé. Dans les halls d’exposition en périphérie, en revanche, les jeunes marques chinoises telles que BYD, Xpeng, Changan et Dongfeng, dominaient le terrain avec des modèles électriques plus avancés technologiquement et moins chers que leurs homologues occidentaux. Pas de doute, l’Europe apparaît clairement comme la principale cible de leur offensive à l’exportation.
Pourtant, cette assurance affichée sur le continent européen contraste fortement avec la situation en Chine: sur leur marché domestique, une guerre des prix acharnée fait rage, conséquence d’une surcapacité structurelle.
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Le succès de l’industrie automobile chinoise a commencé il y a quinze ans, grâce à des subventions massives. Pékin avait compris qu’elle ne pourrait jamais rivaliser avec les moteurs thermiques étrangers, mais elle pouvait bâtir une industrie nationale autour des véhicules électriques. Résultat: une vague d’investissements, des dizaines de nouveaux acteurs et un marché où, cette année, les voitures électriques représentent 60% des ventes.
130. Le nombre de constructeurs chinois produisant deux fois plus de voitures qu’il n’y a d’acheteurs.
Aujourd’hui, environ 130 constructeurs nationaux se disputent les clients. Lorsque leurs usines tournent à plein régime, ils peuvent produire deux fois plus de voitures qu’il n’y a d’acheteurs. Cet excédent provoque une guerre des prix impitoyable: le prix moyen des voitures a chuté de 19% en deux ans, et pour certains modèles, jusqu’à 35 %.
Bien que les ventes continuent d’augmenter –avec une prévision de 24 millions de véhicules en 2025– la rentabilité chute brutalement. Au cours des cinq premiers mois de 2025, le bénéfice net global du secteur a reculé de 12%. Même le leader du marché, BYD, a dû annoncer une baisse de 30% de ses bénéfices au deuxième trimestre, malgré une hausse du chiffre d’affaires. Pour les constructeurs occidentaux, la situation est encore plus dramatique. Leur part de marché en Chine est passée de 66% en 2020 à seulement 31% en 2025.
Les médias d’Etat chinois dénoncent cette «hypercompétition», et en juin, Pékin a exhorté les fabricants à cesser les rabais et à payer plus rapidement leurs fournisseurs. Dans les faits, ils continuent de pratiquer des promotions, souvent de manière subtile, entre autres via une assurance gratuite ou un financement sans intérêt.
Selon Stella Li, dirigeante de BYD, il y a encore beaucoup trop d’acteurs. Toutefois, les fusions se heurtent à la résistance des responsables provinciaux, soucieux de préserver emplois et recettes fiscales.
Entre-temps, les marques les plus solides ne cessent de se renforcer. BYD, Chery et Geely demeurent rentables, tout comme de nouveaux acteurs tels que Xpeng et Li Auto. Des géants technologiques comme Huawei et Xiaomi se sont également lancés avec succès dans la production automobile.
Ces entreprises se tournent de plus en plus vers l’exportation. Entre 2021 et 2024, les exportations chinoises ont quadruplé, permettant au pays de dépasser le Japon et de devenir le premier exportateur mondial de voitures. Rien qu’au premier semestre 2025, près de 3,5 millions de véhicules ont franchi les frontières.
Malgré les droits de douane élevés instaurés par l’UE en 2024, elle reste leur principal marché. En Europe de l’Ouest, la part de marché des marques chinoises est passée de 3,1 à 5,2% en un an.
Les constructeurs occidentaux sont pris en étau et perdent du terrain en Chine. Ils risquent le même sort sur leur propre marché. Seuls ceux qui font preuve d’une grande efficacité et d’une forte capacité d’innovation survivront.