Alors que voitures et poids lourds voient leurs ventes baisser, ce n’est pas le cas pour les véhicules utilitaires légers. Prisés pour les livraisons, ils présentent plusieurs avantages.
Depuis le début de l’année, le nombre de véhicules neufs immatriculés en Belgique est en baisse dans quasiment toutes les catégories, comparé à 2024. Cela concerne les voitures particulières (-9% cumulés entre 2024 et 2025), les véhicules utilitaires lourds (-5,4%) ou les deux-roues motorisés (-6%), selon les chiffres fournis début octobre par le SPF Mobilité et Transports et la Febiac, la Fédération belge et luxembourgeoise de l’automobile et du cycle.
Une seule catégorie résiste et enregistre même une hausse spectaculaire, avec plusieurs mois de croissance consécutifs: 61.753 nouveaux véhicules utilitaires légers (moins de 3,5 tonnes) ont été nouvellement immatriculés en Belgique entre le 1er janvier et le 1er novembre 2025, soit +10,6% cumulés comparé à la même période un an auparavant. Un chiffre qui confirme une tendance observée ces dernières années, avec une hausse significative de ces véhicules, utilisés notamment pour le transport de marchandises, sur les routes belges: entre 2017 et 2025, leur nombre a augmenté de 21,06% (1.000.883 contre 826.742 il y a huit ans), selon les chiffres de Statbel. Dans le même temps, le parc de véhicules de particuliers a certes progressé aussi, mais de façon beaucoup moins marquée (+6,06%).
Essor de l’e-commerce
«La principale raison, c’est l’essor de l’e-commerce», explique Philippe Degraef, directeur général de la Fédération professionnelle des transporteurs et de sociétés de logistique belges (Febetra), au moment d’évoquer le «boom» de ces camionnettes. «Il y a toujours plus de marchandises à transporter. On parle ici de petits ou de moyens colis surtout, pour lesquels on ne va pas utiliser un camion en ville.» Surtout que ces véhicules plus légers sont autorisés à circuler sur tous les axes routiers ou presque.
«Depuis quelques années, on constate que l’accès urbain est de plus en plus compliqué pour les poids lourds, dont ces véhicules ont pris la place. Un camion de douze tonnes, par exemple, a été remplacé par trois ou quatre camionnettes», illustre Michel Martens, directeur du centre de connaissances de la Febiac. Et tant pis pour le trafic, pas facilité par l’afflux de ces véhicules qui peuvent parfois provoquer un bouchon en se stationnant n’importe comment pour une livraison «expresse».
Pas de tachygraphe, ni de taxe kilométrique
Ces véhicules faisant moins de 3,5 tonnes, ils n’ont pas besoin de tachygraphe, l’appareil servant à enregistrer les temps de conduite et de repos des conducteurs, un autre «atout». La réglementation européenne va certes évoluer au 1er juillet 2026, rendant le tachygraphe obligatoire dans les véhicules dont la masse maximale autorisée sera supérieure à 2,5 tonnes, mais cela concernera seulement les utilitaires servant pour le transport international de marchandises. «Cela aura des conséquences pour les transporteurs étrangers circulant dans le pays, mais pas vraiment pour les conducteurs belges d’utilitaires légers. Ils utilisent surtout leur véhicule pour des déplacements régionaux, pas pour aller dans un autre pays», précise Philippe Degraef.
D’autres avantages sont avancés sur les plans financier ou logistique comparé à un véhicule plus lourd. «Un permis B suffit pour les conduire», rappelle ainsi le représentant de la Febetra. «Un permis C, pour les poids lourds, coûte environ 6.000 euros, ce qui est très cher. Il est également plus difficile à obtenir, ce qui explique pourquoi il y a une pénurie de chauffeurs le possédant.» Ces véhicules utilitaires ne sont également pas soumis à la taxe kilométrique, qui s’applique aux poids lourds de 3,5 tonnes ou plus. «Pour la Febetra, cette taxe devrait s’appliquer à tous les véhicules, y compris les voitures des particuliers. C’est un système tout à fait honnête: plus on circule, plus on paye. Ce principe de “l’utilisateur payeur” est déjà accepté à d’autres niveaux: plus on consomme d’eau, plus on paye, par exemple. Cela devrait être aussi le cas pour la mobilité.»
Moins avantageux pour les particuliers
Les propriétaires de véhicules utilitaires légers doivent toutefois mettre la main au portefeuille chaque année pour la taxe de circulation. Celle-ci, basée sur la masse maximale autorisée à être transportée, est comprise entre 38,64 (de zéro à 500 kg) et 148,76 euros (de 3.001 à 3.500 kg). A Bruxelles, ils n’ont pas non plus à payer de taxe de mise en circulation (TMC): c’est aussi le cas en Wallonie si ce véhicule est utilisé dans un cadre professionnel, ce qui les exonère alors également d’écomalus. «Un VUL utilisé par un particulier est taxé comme une voiture (selon la cylindrée et la puissance), avec TMC et écomalus. Cette réglementation vise essentiellement les pick-up», rappelle la Febiac sur son site internet.
Ce changement de fiscalité, intervenu en 2022, a eu un impact sur les achats de véhicules utilitaires légers par les particuliers, revus à la baisse depuis, explique Michel Martens. Mais pas chez les professionnels. «Nous sommes ici sur un marché “de remplacement”, avec des chiffres un peu en-deçà du pic connu entre 2015 et 2020, grâce à l’explosion du commerce en ligne et des livraisons. Ici, les véhicules achetés à cette époque commencent doucement à être remplacés», juge le représentant de la Febiac.
Avec 30% de parts de marché (contre 26% en 2024) grâce à ses marques Fiat Pro, Opel, Citroën et Peugeot, Stellantis est leader dans ce secteur en Belgique, mais aussi en Europe. Preuve de l’importance des utilitaires, le groupe automobile franco-italo-américain a lancé en 2023 Stellantis Pro One, une division qui leur est spécialement dédiée et qui compte également les marques Opel/Vauxhall et Ram Trucks. «Les entreprises augmentent les parcs de véhicules utilitaires légers déjà existants, en raison de la croissance», précise ainsi Joël Bichara, light commercial vehicles manager au sein de Stellantis Belgium, optimiste pour le futur: «Il y a une demande de plus en plus forte pour les véhicules utilitaires légers électriques, même si cela représente une petite part des ventes. Mais cela va continuer de croître.»