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Une mystérieuse maladie pulmonaire touche les vapoteurs

On a longtemps accordé à l’e-cigarette le bénéfice du doute. Cependant, comme beaucoup d’experts le soupçonnent depuis un certain temps, les vapeurs de ces appareils ne sont pas inoffensives.

Une personne qui vapotait a succombé à une maladie pulmonaire grave aux États-Unis, selon les autorités américaines, qui peinent à identifier la cause des maladies de près de 200 autres patients adeptes des cigarettes électroniques. « Nous avons été informés du décès d’un adulte qui avait été hospitalisé pour une grave maladie respiratoire inexpliquée, après avoir vapoté », a déclaré la directrice médicale de l’État américain de l’Illinois. Les autorités sanitaires fédérales ont recensé depuis fin juin 193 cas potentiels de maladies pulmonaires sévères dans 22 des 50 États américains, associés à du vapotage.

Le Centre américain pour le contrôle et la prévention des maladies étudie de près le nombre de cas remarquablement élevé de cette mystérieuse maladie qui pourrait être liée aux vapeurs et à l’utilisation de l’e-cigarette. Les symptômes comprennent la difficulté à respirer, l’essoufflement et/ou des douleurs thoraciques. Dans certains cas, la maladie s’accompagne de vomissements, de diarrhée et de fatigue.

Les autorités américaines restent dans le flou quant au produit ou à la substance à l’origine des problèmes de santé constatés. La cause des maladies n’a pas été découverte, mais tous les malades avaient récemment utilisé des cigarettes électroniques pour inhaler de la nicotine et souvent du cannabis. Une grande proportion de patients ont déclaré avoir utilisé des produits contenant du THC (le constituant psychoactif de la marijuana), peut-être acheté sur le marché noir. Il est donc possible que l’explication puisse être trouvée dans une interaction dangereuse avec le THC.

Un marketing qui cible les (très) jeunes ?

Cette mystérieuse pathologie touche principalement les adolescents et les jeunes adultes. Bien que l’e-cigarette ait été lancée il y a une dizaine d’années comme « alternative moins nocive » à la cigarette, ses couleurs vives et ses saveurs à la mode la rendent très populaire auprès des jeunes, même s’ils n’ont jamais fumé auparavant. Des études montrent qu’un quart des jeunes qui vapotent aujourd’hui n’avaient jamais fumé auparavant. C’est donc par ce dispositif que ces jeunes entrent pour la première fois en contact avec la nicotine. La revue spécialisée JAMA Pediatrics écrit que près de la moitié des adeptes de la populaire e-cigarette Juul sur Twitter sont des mineurs.

Juul Labs, la start-up qui domine le marché du vapotage aux États-Unis, est par ailleurs sous le coup d’une enquête de l’agence fédérale de protection des consommateurs, a indiqué cette semaine le Wall Street Journal. Le quotidien affirme que les enquêteurs tentent de déterminer si Juul a employé des méthodes de marketing trompeuses, en visant des jeunes ou en employant des influenceurs.

La société affirme coopérer pleinement et explique n’avoir « jamais promu ses produits auprès des jeunes » et affirme avoir totalement changé ses méthodes de marketing après qu’une campagne menée en 2015 auprès d’adultes âgés de 25 à 34 ans a « pu être perçue comme attrayante pour des mineurs ». Les cigarettes électroniques de Juul très stylées et épurées accompagnées de « jus » de nicotine aux parfums très populaires rencontrent un énorme succès aux États-Unis. L’entreprise est souvent accusée d’inciter les jeunes à vapoter, ce dont elle se défend vigoureusement. Elle a d’ailleurs annoncé toute une série de mesures pour combattre l’accès à ses produits pour les jeunes n’ayant pas l’âge légal.

Arômes nocifs

Les cigarettes électroniques n’incluent pas de nombreuses substances cancérigènes que l’on trouve dans les cigarettes normales, comme le goudron. Mais la vapeur contient des particules fines qui pénètrent les poumons, et dont l’effet n’est pas encore bien connu. De nombreuses sont « potentiellement toxiques », selon un rapport des Académies américaines des sciences publié en 2018.

Il n’y a eu jusqu’à présent que peu de recherches à long terme sur les cigarettes électroniques et les vapeurs. Néanmoins, on sait que ces dispositifs contiennent des substances préoccupantes comme le benzène, le formaldéhyde et l’acétaldéhyde, dont nous savons qu’ils causent des maladies pulmonaires, ainsi que des métaux lourds comme le nickel, le plomb et l’étain.

De plus, l’effet sur les poumons des nombreuses saveurs chimiques, telles que la mangue, l’orange et la pastèque, présentes dans les fumées n’a jamais été étudié chez l’être humain. Nous ne savons pas exactement quels dommages les arômes, qui sont inhalés à de fortes concentrations invisibles, causent dans les poumons lorsqu’ils sont chauffés ou évaporés. Selon une étude sur les souris publiée l’an dernier dans l’American Journal of Physiology, les arômes des e-cigarettes présents sur le marché ne sont pas sans danger, même pour une utilisation limitée.

Les liquides contiennent aussi souvent de la nicotine, bien étudiée depuis des décennies: elle est addictive et affecte le développement du cerveau avant 25 ans.

Une réputation qui s’étiole

L’e-cigarette a la réputation d’être « meilleure » que les vraies cigarettes parce qu’il n’y a ni goudron ni fumée. Elle peut efficacement aider les gens à s’éloigner du tabagisme, qui cause indéniablement diverses formes de cancer. Mais la perception d’un produit « plus sain » semble s’étioler progressivement. En plus des cas récents de maladie pulmonaire identifiés – qui n’ont pas encore été liés officiellement à l’e-cigarette -, des décès ont déjà été signalés à cause de dispositifs qui ont explosé au visage des utilisateurs.

Surtout pour les jeunes vapoteurs, qui n’ont pas d’antécédents de tabagisme, l’e-cigarette représente toute une série de risques potentiels pour la santé dont nous n’avons probablement vu que la pointe de l’iceberg. Il suffit de regarder la cigarette classique qui a pris pas moins de 50 ans pour être reconnue comme gravement cancérigène par des médecins indépendants. De plus, le système respiratoire des personnes de moins de 18 ans n’est pas encore complètement développé, ce qui les rend encore plus vulnérables que les autres aux effets des substances inhalées. Les scientifiques appellent donc à davantage de recherches sur la sécurité et la toxicité de ce marché mondial en pleine croissance.

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