« Les pilules de 3e et 4e générations ne doivent être prescrites qu’en dernier recours »

Les pilules contraceptives seraient à l’origine de 20 décès et de 2500 accidents par an, a révélé ce mardi l’agence du médicament français. Explications avec Mahmoud Zureik, responsable de la pharmaco-vigilance au sein de l’organisation.

En janvier, vous annonciez que seulement 13 décès relatifs à la pilule avaient été enregistrés en 27 ans. Trois mois plus tard, le nombre de victimes est passé à 20 morts par an et 2500 accidents annuels. Comment expliquez-vous cette différence?
Ce ne sont tout simplement pas les mêmes chiffres. En janvier, nous nous basions sur le nombre de décès déclarés par les professionnels de santé. Ces signalements ne sont pas du tout exhaustifs: ils ont avant tout pour but de servir de signal d’alarme mais ne permettent pas d’estimer une fréquence. Nous avons, quant à nous, adopté une approche de pharmaco-épidémiologie. Nous avons calculé le nombre de victimes en nous basant sur de nombreuses observations: combien de femmes prennent la pilule, quel est leur âge, quels sont les risques de thrombose veineuse hors prise de la pilule, quels sont les sur-risques avec ces médicaments… Nous avons recoupé toutes ces informations pour calculer les risques de ces contraceptifs.

Qui sont les plus exposées à ces risques?
En théorie, le risque de phlébite est plus important chez les femmes d’un certain âge mais comme 60% des femmes qui prennent la pilule ont entre 20 et 24 ans, le public exposé est très large. En revanche, certains facteurs peuvent accroître les risques: les antécédents génétiques, la cigarette ou l’obésité…

Vous évoquez également 2500 accidents par an. De quoi s’agit-il? Il s’agit dans les deux tiers des cas de phlébites et d’embolies pulmonaires pour le reste. C’est un chiffre important mais le pronostic est plutôt bon dès le moment où les victimes arrêtent de prendre l’élément déclencheur, à savoir la pilule.

L’ANSM recommande-t-elle aux femmes d’arrêter de prendre la pilule? Pas du tout. Nous souhaitons seulement que les pilules de 3e et 4e générations ne soient prescrites qu’en dernier recours. Lorsqu’on regarde le détail de notre étude, on s’aperçoit que sur les 20 décès par an, 14 sont liés aux pilules de 3e et 4e générations contre seulement 6 pour les anciennes générations. On remarque d’ailleurs que les professionnels de santé ont déjà commencé à appliquer ces conseils: aujourd’hui, les pilules de 1e et 2e génération représentent 70% des prescriptions alors qu’il y a trois mois il ne s’agissait que de la moitié.

Votre étude ne parle que des cas de thrombose veineuse. Y a-t-il d’autres risques?
Oui, notamment au niveau artériel. Mais pour l’instant, nous n’avons pas suffisamment de données pour évaluer ce risque. Nous comptons mener une nouvelle étude à ce sujet d’ici à deux mois.

Caroline Politi, L’Express.fr

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire